Algérie

Les religieux investissent la rue



A l'appel du Haut-Conseil islamique du Mali, le nouveau code des personnes et de la famille est rejeté par des dizaines de milliers de citoyens de ce pays voisin de l'Algérie, dont 90% de la population est musulmane. Depuis plus de dix ans, le projet était dans les tiroirs. D'amendements en amendements, la loi a finalement été adoptée début août par l'écrasante majorité des députés. Mais pour être applicable, elle doit encore être promulguée par le chef de l'Etat, Amadou Toumani Touré. Le président du Haut-Conseil islamique du Mali, l'imam Mamoud Diko, a lancé un appel au président A. T. Touré pour qu'il ne le fasse pas, afin de « préserver la paix et la quiétude » dans le pays. Engageant des consultations, le président « temporise le jeu, il veut mettre l'unité nationale au-dessus de tout », explique un conseiller à la présidence. « A y voir de près, ce ne sont pas forcément les avantages accordés aux femmes qui posent problème, mais le débat a un fort lien avec le culturel et le religieux », commente le sociologue malien Mamadou Samaké, cité par l'AFP.Samedi dernier, elles étaient environ 50 000 personnes à se rassembler au stade du 26 Mars de la capitale, Bamako, pour « maudire » le nouveau texte, présenté comme « une insulte au Coran ». La manifestation s'était déroulée sans incident et sur des calicots et banderoles, on pouvait lire « non à ce code qui divise les Maliens », « la femme reste femme et l'homme reste homme » ou encore « la civilisation occidentale est un péché ». En présence de nombreuses femmes voilées, le meeting était rythmé par des chants religieux interrompus par un animateur scandant régulièrement : « Respectez Dieu ! » ; le public lui répondait : « Dieu est grand. »A l'issue de la manifestation, les imams et érudits musulmans du Mali ont publié une déclaration affirmant que « le code viole, en plusieurs de ses articles, les dispositions du Coran, livre sacré des musulmans, et les valeurs traditionnelles des Maliens ».Plusieurs manifestations de rejet du nouveau code avaient déjà été organisées à l'intérieur du Mali pour dénoncer l'adoption nouveau code des personnes et de la famille. Les associations musulmanes contestent notamment le fait que le mariage religieux ne soit pas juridiquement reconnu. « Nous demandons dans toutes les mosquées la relance du mariage religieux comme si de rien n'était », écrivent les imams dans leur déclaration. Ils ont même promis de « boycotter les députés » ayant voté pour la réforme : « Nous ne ferons plus pour eux ou leur famille de cérémonies de baptême ni de prières en cas de décès. Ils ont trahi Allah ! », ont-ils écrit. La Fédération nationale des collectifs d'organisations féminines du Mali (Fenacof), qui avait approuvé le nouveau code, a souhaité que de « larges consultations » soient organisées « afin de mettre l'unité nationale au-dessus de tout ». « Dans notre pays, tout le monde est pour la promotion de la femme. Mais quand il y a incompréhension, il faut s'asseoir pour discuter », juge la présidente de la Fenacof, Dembélé Oulématou Sow. « Il faut expliquer davantage le contenu du code pour éviter toute interprétation tendancieuse », conclut-elle. Face aux protestations et incompréhensions, le politologue Amadou Kéita constate : « On a beau être dans un pays laïc, toute loi dans notre contexte doit refléter le point de vue de la majorité, sinon, c'est une crise sociale terrible qui va s'installer. » « Sinon regardez, dans le code, il y a des articles courageux, comme celui sur la nationalité : un Béninois peut avoir la nationalité malienne et participer ici à des élections, c'est l'intégration qui est en marche », dit-il.


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