Algérie

Les réformes et Torquemada



Les réformes et Torquemada
Si les retombées de la récente tripartite se font jour du côté des entrepreneurs d'une série de corporations et de services publics, et ressenties par les retraités, le champ politique n'en finit pas de faire parler de lui. Les «bidouillages» à l'APN sont publiquement exposés par le ministre de l'Intérieur qui apprend à l'opinion publique que le président de la République en personne est intervenu à propos des amendements infligés à la loi électorale, surtout à l'article 93 de la loi en question qui oblige les ministres candidats à la députation de démissionner de l'Exécutif trois mois avant le scrutin. M. Bouteflika, qui est intervenu pour que cette disposition soit validée, s'est vu contesté par un parti de sa majorité présidentielle qui est lui-même dominant dans les assemblées élues. Ce parti qui entend garder ses ministres au sein de l'instance législative a comme président le chef de l'Etat en personne. La cacophonie qui se développe à l'APN n'est pas de bon augure pour les prochains scrutins et donne du grain à moudre à l'opposition et aux observateurs étrangers. L'image du pays que M. Bouteflika entend donner à ses pairs en Afrique à travers le mécanisme d'évaluation par les pairs et au reste du monde est ainsi défigurée à bon escient. Ces pratiques, et d'autres, ne peuvent que fragiliser l'Algérie à l'extérieur dans un monde mondialisé à souhait où les pressions des puissants ne peuvent être balayées par des amendements scélérats qui font régresser le pays alors que le Chef de l'Etat engage des réformes systématiques, dévoyées régulièrement par nombre de ceux qui ne juraient que par la réussite des programmes présidentiels. Ce qui remet, encore une fois, au goût du jour l'ancienne revendication d'une constituante, forcément précédée par la mise en place d'un gouvernement de transition formé de compétences et de technocrates au-dessus de tout soupçon et vierges de toute attache partisane. De tous les vrais décideurs de l'Exécutif et à la tête de l'Alliance, seul M. Bouteflika est passé par le suffrage universel, quelle que soit l'appréciation portée sur son élection. Au moment où les grèves se multiplient, où les émeutes se succèdent à propos de tout et de rien, la majorité se paye le luxe d'étaler des divisions sur la base d'intérêts partisans, sonnants et trébuchants au bout du compte au mépris de l'intérêt général. Les résultats sont évidents comme en atteste le ras-le-bol des citoyens qu'écoute le Conseil national économique et social (CNES) dans sa tournée à travers le pays. La fragilisation de l'Etat, les incohérences des politiques publiques, la marginalisation des élites, des créateurs, des entrepreneurs à l'échelon local, la verticalité de la gouvernance et la faillite de la TV unique, l'absence de démocratie à la base et l'attachement à l'unité nationale sont les principales sonnettes d'alarme que tirent les citoyens sans pour autant être écoutés. Devant l'échec des partis de l'Alliance présidentielle qui ne peuvent plus cacher les courtisans et de nombreux fonctionnaires sans initiative ni imagination, l'opposition affiche sa stérilité. Cette dernière, en dehors des communiqués de presse, n'arrive pas à formaliser une alternative ou encore moins à la faire connaître au plus grand nombre. La fermeture de la TV n'est plus une excuse car ce média est encore contre-productif pour la majorité. Il ne reste plus que le volontarisme politique, l'abnégation de la société civile et une fine analyse des enjeux mondiaux, à un moment déterminant pour que le pays renoue avec de véritables réformes qui ne peuvent être réalisées par des rentiers conservateurs et des Torquemada qui ne sont inquiétés ni par la justice ni par la police, et aucun prix Nobel ne leur sera décerné pour leurs appels à la haine.
A. B.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)