Algérie

Les rebelles chiites du Yémen font monter la tension : Guerre froide entre Riyad et Téhéran



Depuis une semaine (le 3 novembre) l'Arabie Saoudite s'est engagée militairement contre les rebelles « houthis », une branche du chiisme, accusés de s'être infiltrés au niveau de ses frontières à Jabel Al Doukhane. Une intrusion couplée à la mort d'un garde-frontière saoudien tué par des rebelles qui s'étaient infiltrés à Jebel Al Doukhan. Le royaume a donc déployé les grands moyens pour mater les rebelles chiites soupçonnés d'êtres téléguidés par l'Iran voisin.Le ministre adjoint saoudien de la Défense, le prince Khaled Ben Sultan, s'est félicité que les raids aient permis de repousser les infiltrations des « ennemis de leur pays (Yémen) et du royaume » tout en démentant que son armée ait bombardé les positions des rebelles sur le sol du Yémen. Il a reconnu également que les combats à la frontière se sont soldés par sept morts côté saoudien, dont trois militaires. Mais au-delà de la riposte de l'Arabie Saoudite au motif que sa frontière avec le Yémen a été violée par les chiites houthis, se profile une guerre à distance entre Riyad et Téhéran accusé de sponsoriser le mouvement rebelle pour abattre le gouvernement au Yémen et déstabiliser le royaume wahhabite.Les spécialistes n'ont pas hésité à interpréter l'intervention de l'Arabie Saoudite contre les rebelles yéménites comme un « avertissement » à l'Iran pour le dissuader de s'immiscer dans la région. C'est aussi un signe que le royaume panique face à l'affaiblissement du pouvoir de Ali Abdellah Saleh grâce à l'appui dont bénéficient les chiites armés de la part de l'Iran. La crainte est que les rebelles chiites s'emparent du pouvoir au Yémen et ouvriraient ainsi une porte d'accès au royaume à Téhéran. C'est pourquoi le royaume saoudien a « discrètement » aidé les forces yéménites dans leur opération contre les rebelles lancée le 11 août, d'après des experts militaires.« Pire que les juifs »'Selon le magazine spécialisé Gulf States Newsletter, Riyad a contribué à hauteur de 1,2 million de dollars par mois à l'offensive gouvernementale baptisée « Terre brûlée », déclare à l'AFP Jon Marks, directeur de la rédaction du magazine. Ce dernier estime que l'intervention de l'Arabie Saoudite « est un signal clair qu'elle en a assez. Il y a une déception croissante vis-à-vis de Saleh et de sa capacité à gouverner », ajoute-t-il. Mais c'est aussi, selon lui, « un tournant vers une nouvelle guerre froide » entre l'Arabie Saoudite et ses alliés d'une part et l'Iran de l'autre. Sanaâ a accusé des « parties iraniennes » de soutenir les rebelles et a annoncé le 28 octobre l'arrestation de cinq Iraniens à bord d'un bateau iranien chargé d'armes au large du nord du Yémen.Les médias saoudiens proches du gouvernement ont également multiplié les mises en garde contre l'interventionnisme de l'Iran. « L'Iran se positionne à la frontière sud des pays arabes du Golfe après avoir avalé le Liban et s'être installé en Irak », écrit le quotidien Asharq Al Awsat. Et comme par hasard les autorités du royaume ont bénéficié hier d'un appui aussi bizarre qu'inespéré du mouvement Al Qaîda. En effet, Mohammed Ben Abdel Rahmane Al Rachid, chef du groupe Al Qaïda dans la péninsule arabique (AQAP) a qualifié hier la menace chiite de « pire » que celle des juifs et des chrétiens. « La menace (des chiites) contre l'Islam et son peuple est bien plus importante que celle des juifs et des chrétiens », a-t-il affirmé dans un enregistrement sonore, selon le site Intelligence group.Ce faisant, il a appelé « la nation à être aux côtés des (sunnites) avec tous leurs moyens contre le danger de l'Iran et des fidèles à la foi (chiite) dans la région ». Cette prise de position inédite d'Al Qaîda apporte de l'eau au moulin de l'Arabie Saoudite qui accuse presque ouvertement l'Iran d'être derrière les houthis du Yémen. En effet, elle accuse les chiites (comprendre l'Iran) de vouloir prendre le pouvoir dans les pays musulmans et d'« annihiler les sunnites » après avoir « facilité » les interventions américaines en Afghanistan et en Irak.Pendant ce temps, Paris et Washington se sont empressés de dénoncer la « violation » des frontières saoudiennes. C'est que dans un contexte marqué par l'impasse sur le dossier nucléaire iranien, cette guerre froide entre Riyad et Téhéran, par Yémen interposé, constitue un moyen de pression supplémentaire contre le pays des mollahs. C'est aussi une première étincelle entre deux pays qui se regardent depuis longtemps en chiens de faïence.


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