Algérie

Les raisons de la colère



Les raisons de la colère
Dans un contexte national marqué par la fermeture du jeu politique, où le monologue officiel alterne avec la guerre de tranchées entre les clans au pouvoir, l'envoi, la semaine dernière, d'une délégation interministérielle pour prendre le pouls de la société civile à Béjaïa a surpris les observateurs.Cette initiative apparaît comme une «preuve de vie» du pouvoir, à un moment où l'on croyait que les institutions de l'Etat étaient gagnées par la sclérose, atteintes par le syndrome de l'inertie qui a mis en veilleuse les activités des plus hautes autorités du pays. Cette soudaine découverte des vertus du dialogue et de l'écoute intervient un mois après l'épisode de la protestation des policiers, à Ghardaïa et Alger, qui avait montré les limites et les risques d'un recours permanent à l'usage de la force publique pour éteindre les foyers de tension sociale.Aussi, le pouvoir, qui est en train de gérer l'action de l'opposition politique par la diatribe et la diabolisation, sait qu'il n'y aura aucune parade possible face à une explosion sociale, la seule véritable hantise des systèmes autoritaires. Alors, les promesses d'ouverture sont intégrées dans le discours des officiels, accompagnées par quelques actions de terrain, comme celle entreprise à Béjaïa, une région qui a vécu un long cycle de protestations.Il y a une vingtaine de jours, le ministre de l'Intérieur installait un «groupe de travail» interministériel chargé de trouver des «mécanismes et des dispositifs qui permettent aux citoyens de participer à la gestion des affaires de leurs communes et wilayas». Si le gouvernement veut peser de tout son poids pour faire participer le citoyen à la gestion de la collectivité locale, cela sonne comme un aveu de l'exclusion, passée et présente, de la population des affaires qui la concernent. Ainsi, on réinvente et on convoque la «démocratie participative» pour convaincre de la bonne foi des autorités dans leur ?uvre de développement en faveur des populations.Ce retour inattendu vers le peuple, alors que les «assemblées populaires» sont censées le représenter, illustre également les dégâts de la dernière trituration des codes communal et de wilaya qui ont réduit le principe de la représentation populaire à sa plus simple expression, à travers un dispositif arithmétique abscons, donnant naissance à d'improbables majorités.Résultat : les assemblées locales, quand elles ne sont pas elles-mêmes la cible des protestations, se retrouvent incapables de jouer leur rôle de médiateur entre la population et l'administration, qui détient et gère la plus grande partie des programmes de développement. En plus d'avoir transféré l'essentiel des prérogatives des élus locaux vers le wali et son représentant omnipotent, le chef de daïra, le nouveau code communal (en vigueur depuis deux ans) a ceci de pervers d'avoir démocratisé la clientélisation.L'octroi de salaires confortables aux élus, présidents de commission compris, a pour objectif d'aider ces derniers à accepter de gérer le vide, au risque de drainer plus de colère que de satisfaction. C'est le même pouvoir qui a miné le terrain en manipulant les textes de loi, depuis la Constitution jusqu'au code communal en passant par la loi sur les associations, qui se propose aujourd'hui de comprendre les raisons de la colère.




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