Algérie

Les questions qui meritent débat au Parlement


Les questions qui meritent débat au Parlement
Pour détourner l'attention sur les véritables dysfonctionnements contenus dans le projet de loi de finances pour l'année 2015, le gouvernement a jeté aux députés des «os à ronger», destiné à polariser leurs griefs sur l'accessoire et les détourner de l'essentiel.Il s'agit, on l'a bien compris, de l'article alignant les producteurs et importateurs sur un même taux d'IBS (23%) et celui prévoyant une augmentation démesurée du prix du timbre de passeport. Ce sont des dispositions que les parlementaires ne trouveront pas de difficulté à torpiller, mais qui ont l'avantage de retenir l'attention des médias et de l'opinion publique. Ils constitueront des motifs de diversion qui permettront d'occulter les gros problèmes de politique économique et d'équilibres financiers porteurs de graves périls que comporte le projet de budget.Les plus gros problèmes que comporte ce projet de loi, mais dont on parlera sans doute très peu dans l'hémicycle, résident en effet dans la dérive du budget de fonctionnement qui passe d'une année à l'autre de 4714 à 4972 milliards de dinars (+5,5%), entraînant ainsi la fonction publique dans une spirale de sureffectifs. Les effectifs de fonctionnaires gonflent ainsi d'année en année, pour faire de la fonction publique le plus gros employeur (environ 2,5 millions employés) et, par conséquent, le plus important poste de dépenses de l'Etat. C'est ainsi que durant l'année 2015, l'Etat prévoit de dépenser 2104 milliards de dinars pour rémunérer cette masse de fonctionnaires dont une bonne partie attend, de surcroît, des augmentations de salaires et indemnités ainsi que les avantages découlant de l'abrogation de l'article 87 bis.Les recrutements à tour de bras de fonctionnaires (notamment les corps constitués et l'enseignement) qui s'appuient sur les disponibilités financières présentes ne semblent pas du tout préoccuper le gouvernement d'un éventuel retournement de conjoncture qui infléchirait les encaisses d'hydrocarbures et par conséquent les moyens de payer régulièrement cette pléthore d'agents publics. S'il venait à être évité à brève échéance, ce «casse-tête» qu'il faudra une année ou l'autre assumer sera évidemment légué aux prochaines générations qui ne manqueront de reprocher au gouvernement et à la classe politique actuels d'avoir manqué de vision, mais aussi et surtout d'esprit de responsabilité à leur égard.L'autre problème et non des moindres, qui ressort d'une lecture attentive de ce projet de loi de finances, a trait aux transferts sociaux pour le moins ruineux (493 milliards de dinars) visant à soutenir les prix d'un certain nombre de produits de première nécessité dont les quantités augmentent en volume et en valeur chaque année, sans pour autant profiter aux nécessiteux pour lesquels ils sont en principe destinés. Ces produits dont profitent allègrement les riches comme les pauvres, mais également de nombreux pays voisins, alimentent bien souvent les contrebandes et autres malversations favorisées par le différentiel de prix entre ceux, très bas soutenus par l'Etat, et ceux, autrement plus élevés, pratiqués sur les marchés étrangers. De colossales rentes de situations sont ainsi constituées à la faveur de ces transferts sociaux qui saignent chaque année un peu plus nos finances publiques. Ne serait-il pas temps d'y remédier 'Les parlementaires oseront-ils, par ailleurs, soulever l'épineuse question des réévaluations de projets au profit desquelles la loi de finances réserve pas moins de 760 milliards de dinars ' Les débats houleux autour des problèmes secondaires évoquées plus haut passeront certainement sous silence la question centrale des réévaluations de projets qui coûtent, bon an mal an, environ un milliard de dollars à l'Etat.Autre question méritant débat : l'assainissement financier des entreprises publiques. Ces renflouements financiers récurrents qui ont déjà englouti pas moins de 30 milliards au cours de ces vingt dernières années sans pour autant remettre à flot ces sociétés insolvables, se poursuivra encore l'année prochaine avec un budget de 534,3 milliards de dinars qui leur sera expressément destiné, notamment pour mettre en ?uvre une nouvelle restructuration (fin des SGP et création de nombreux groupes industriels) que le gouvernement a décidé d'entreprendre.Il serait toutefois étonnant que ce grave problème de dilapidation de deniers publics fasse l'objet d'un intense débat dans l'hémicycle, nos parlementaires étant comme on le sait majoritairement acquis au principe selon lequel il faut soutenir le secteur public, quel que soit le prix à payer. Une autre question importante mérite attention : celle des restes à réaliser des programmes antérieurs (863 milliards de dinars) représentant environ 21% du budget d'équipement. Ces chantiers qui traînent en longueur pour diverses raisons, dont notamment la déficience managériale, engendrent non seulement des surcoûts, mais, plus grave encore, privent le pays des retombées économiques et sociales attendues.Il serait enfin important que nos parlementaires provoquent un débat clarificateur sur la question centrale de la faiblesse de la croissance économique attendue par rapport aux faramineuses dépenses d'équipement et de fonctionnement que l'Etat compte engager en 2015. L'Etat prévoit de dépenser environ 100 milliards de dollars durant l'année prochaine pour ne récolter au bout du compte que 3 à 4 milliards de valeur ajoutée. En mettant les ressources financières au service des industriels étrangers, les importations qui atteindront 65,4 milliards de dollars (en augmentation de 6,2%) en seraient en grande partie la cause. Souvent traité par la presse et les économistes, cet épineux problème d'efficience économique qui entrave le développement de l'Algérie mériterait d'être énergiquement relayé par la classe politique, à commencer par sa représentation au sein de l'Assemblée nationale et du Sénat. Il y va de l'avenir du pays.


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