Algérie

Les prix malgré les assurances Un avant-goût de Ramadhan



La pomme de terre est devenue un abcès de fixation, qui cache mal le désarroi des pouvoirs publics devant une hausse de plusieurs produits de large consommation à laquelle ne sont opposés que des palliatifs, en l'absence d'une stratégie claire qui inscrit la stabilité des prix dans la durée. Le ministre du commerce El-Hachemi Djaaboub s'est montré ce samedi rassurant, en affirmant qu'il n'y aura pas d'augmentation du prix du lait et du pain. L'Etat continuera à soutenir ces deux produits de base, malgré la flambée des prix de la farine et de la poudre de lait sur le marché mondial. Personne ne trouverait à redire si l'on venait à affirmer que nombreuses sont les familles qui font de ces deux produits l'essentiel de leur alimentation, sans pour autant arriver à joindre les deux bouts. Un simple calcul peut édifier sur la part des dépenses consacrées au lait et au pain quotidiennement pour un standard de 7 membres d'une famille algérienne. A supposer que chaque membre se contente d'une baguette de pain et d'un litre de lait chaque jour que Dieu fait, c'est quand même 200 dinars pratiquement incompressibles qui sont déboursés. Autant dire que pour un smicard, c'est déjà la moitié de la paie qui est engloutie. Et si l'idée venait au père de famille d'acheter rien que deux kilogrammes de pommes de terre chaque jour, l'on mesure la portée des assurances du ministre du Commerce. El-Hachemi Djaaboub annonçait également ce samedi qu'une réflexion est menée pour réduire la taxe douanière et la TVA sur la pomme de terre et la semence de la pomme de terre importée pour faire baisser les prix. Voilà encore une solution intermédiaire qui ne résoudra pas le problème. Tout comme ne l'avait pas résolu l'importation massive de la patate (25.000 tonnes entre le mois de juin et le mois de juillet). En effet, le problème des prix est resté entier. Même si le coût du produit importé est réduit, il y a lieu de s'interroger pour savoir si le grossiste, le détaillant et tous les intermédiaires feront de même ! Ce qui est loin d'être évident. D'autant moins que l'Etat reste désespérément absent des circuits empruntés par les fruits et légumes. La spéculation, et tout le monde le sait, a de tout temps profité de ce dérèglement participant à accentuer la situation. Chez nous, la hausse des prix échappe singulièrement à la règle de l'offre et de la demande pour avoir ses propres repères. Paradoxalement, le mois de Ramadhan est le mois de l'année qui ne connaît jamais de pénurie de produits alimentaires, malgré la forte demande. L'augmentation des prix intervient toujours d'une manière très brutale et n'a absolument rien à voir avec les tendances du marché. Car la fluctuation des prix obéit plutôt à un autre rapport de force qui met en jeu les acteurs intervenant dans le circuit de distribution, prenant ainsi en otage le citoyen consommateur. Aujourd'hui, c'est la pomme de terre qui tient le haut du pavé, parce qu'elle a toujours été considérée comme le refuge du pauvre. Autant dire le meilleur indicateur de la fluctuation des prix des fruits et légumes. Ce qui voudra dire que si la pomme de terre prend l'ascenseur, c'est tout le marché qui lui emboîtera le pas. La tomate à 50 dinars, le poivron à 60 dinars, les courgettes à 40 dinars, c'est toujours une affaire de spéculation car la hausse des prix ne saurait trouver une explication dans une augmentation sur le marché international. Ils sont produits chez nous et en quantités suffisantes. El-Hachemi Djaaboub déclare que son département a tracé une feuille de route portant sur la régulation du marché et des prix de la pomme de terre, qui sera remise prochainement au gouvernement. Mais l'expérience a montré que l'importation, quelle que soit la stratégie qui la supporte, a toujours ses limites. Le ministre le soulignera d'ailleurs lui-même: « L'importation n'est pas une solution ». Quelle est alors la solution pour que l'Algérie soit autosuffisante en production de lait par exemple ou pour se mettre à l'abri des caprices des cours internationaux de blé ? C'est bien que l'Etat soutienne le prix du lait. Pour cette année, de l'aveu de Djaaboub, l'Etat déboursera 16 milliards de dinars pour les subventions accordées aux producteurs de lait. Mais que proposent les responsables concernés pour promouvoir et développer la filière lait ? L'Algérie a toujours été dépendante de l'étranger pour satisfaire ses besoins en lait. Idem pour le blé dur et le blé tendre. Notre pays a tous les moyens pour assurer son indépendance alimentaire. Mais pourquoi alors tous les efforts consentis pour le développement du secteur de l'agriculture, la promotion de l'industrie agroalimentaire locale, l'organisation des marchés et la régulation des prix sont restés invariablement stériles ? Le pouvoir d'achat est en train de reculer inexorablement et le citoyen risque même l'asphyxie financière avec le Ramadhan qui approche. Etant dit que ce mois est toujours l'occasion des grosses spéculations autour de l'alimentation générale. A court terme, les autorités semblent avoir pris des mesures énergiques pour tempérer les choses. Mais le danger d'une situation de crise plane toujours. Car il ne faut pas oublier que le marché national demeure l'objet d'une déréglementation permanente, qui plus est reste sous le diktat de monopoles qui dictent leurs propres lois.


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