Algérie

Les prix à la consommation risquent de flamber


La chute du dinar impactera directement les prix à la consommation, dès lors que la plupart des matières premières exploitées dans la production locale sont importées en devises.Les prix de certains produits agroalimentaires devront connaître des hausses dès l'année prochaine, sous l'effet de divers facteurs, dont notamment la dépréciation du dinar. Outre les méfaits de la crise sanitaire liée à la Covid-19, la dévaluation du dinar a eu un impact négatif direct sur la situation des entreprises de l'agroalimentaire. Celles-ci ont ainsi vu leur chiffre d'affaires diminuer de manière sensible car elles utilisent, pour leurs différentes productions, essentiellement des intrants importés en devises.
La tendance haussière du taux de change de l'euro et du dollar américain par rapport à la monnaie nationale a réduit les marges de man?uvre des producteurs. "Cette dévaluation est devenue incompréhensible. La plupart des matières premières exploitées dans la production sont importées en devises. Ce qui va engendrer un impact direct sur le prix du produit fini", souligne Abdelwahab Ziani, président de la Confédération des industriels et producteurs algériens (Cipa).
Les entreprises, indique-t-il, ne peuvent plus établir un business plan sur quelques années à cause de cette instabilité du dinar. Ainsi, les industriels répercutent inévitablement cette parité défavorable de la monnaie locale sur leur prix de vente et c'est le consommateur final qui, en définitive, subit ce renchérissement des prix. "Le chef d'entreprise ne peut plus concevoir de plan de développement étant donné toutes ces perturbations liées à la monnaie", relève encore Abdelwahab Ziani.
Les économistes et autres experts financiers doivent, suggère-t-il, approfondir la réflexion pour déterminer la vraie valeur du dinar. "Cette dévaluation n'est absolument pas la bienvenue parce qu'elle ne fait qu'accentuer davantage les dommages provoqués déjà par la double crise économique et sanitaire due à la pandémie de Covid-19", estime le président de la Cipa.
Résultat des courses : l'entreprise aura à gérer un autre problème et non des moindres, à savoir une mévente de ses produits. En outre, les marges bénéficiaires des producteurs restent toujours minimes et, de ce fait, ne peuvent atténuer les contrecoups de cette chute de la monnaie nationale. "L'on estime cette dévaluation du dinar à environ 20%.
C'est ingérable pour une société qui active dans l'agroalimentaire dont les marges bénéficiaires ne dépassent pas les 5%", avoue Abdelwahab Ziani. Ce qui constitue un autre facteur qui va accélérer davantage la chute du chiffre d'affaires de ces producteurs, estimée déjà à 60% durant le premier trimestre 2020, précise notre interlocuteur. En dépit de toute cette problématique, les PME affectées, affirme-t-il, continuent d'exercer leurs activités.
Mais elles doivent bénéficier d'un accompagnement de l'Etat, notamment d'une assurance au niveau des banques pour qu'elles puissent faire face à cette dépréciation du dinar. En tout cas, des solutions doivent être trouvées afin de contenir, préconise-t-il, cette instabilité de la monnaie nationale et permettre aux entreprises d'avoir une meilleure visibilité pour leur avenir. Une chose est sûre, "quand le dinar est faible, c'est l'Algérie qui s'affaiblit", conclut le président de la Cipa.
Perte de compétitivité
Le président du Cercle d'action et de réflexion pour l'entreprise (Care), Slim Othmani, mesure, lui aussi, parfaitement l'impact de la chute du dinar face au dollar et à l'euro, sur les entreprises locales. "Quand 30% des intrants d'une entreprise sont libellés en monnaies étrangères, une dévaluation du dinar aura inévitablement un impact négatif sur ses coûts de production", indique Slim Othmani. Une PME va forcément perdre en compétitivité et en rentabilité sur le marché national car elle sera obligée d'augmenter ses prix.
"Quand on dévalue la monnaie nationale on rend le produit exportable plus compétitif sur les marchés étrangers mais dans le même temps, on affecte la rentabilité de l'entreprise. Or, cette rentabilité sert à son développementet sur le marché local et à l'international", fait savoir le président du Care. En un mot, résume-t-il, "la dépréciation du dinar impacte positivement la compétitivité extérieure d'une entreprise, mais elle influe aussi de manière négative sur sa rentabilité".
L'impact sera d'autant plus palpable sur l'industrie agroalimentaire qui, selon Ali Daoudi, enseignant chercheur à l'Ecole nationale supérieure d'agronomie d'El-Harrach, demeure exposée, vu que la majeure partie des matières premières exploitées est importée. En effet, pour la transformation des céréales, du lait, de certains jus et autres produits, une bonne partie des intrants provient de l'étranger.
"Il va y avoir nécessairement une incidence sur le coût de production de ces produits", relève-t-il. En revanche, les coûts de production ne seront pas ressentis de la même façon pour les céréales, le lait et les produits subventionnés par l'Etat qui prendra en charge la différence. "L'on peut s'attendre à un renchérissement des autres produits non subventionnés dès 2021", remarque-t-il. Les industriels vont, par conséquent, transférer les effets de cette dépréciation sur le consommateur final.
Des hausses sont ainsi prévues, notamment pour les dérivés du lait, tels que les yaourts, et certains jus dont la pulpe est importée. Pour contourner cette problématique, Ali Daoudi, propose l'élaboration d'une politique agricole cohérente et efficiente qui inciterait les industriels agroalimentaires à s'approvisionner, pour leurs intrants, auprès des agriculteurs locaux.

Badreddine KHRIS
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