«Les pouvoirs marocain et algérien marchent sur des œufs»

«Ces pouvoirs (marocain et algérien) marchent sur des œufs. Ils se rendent compte que les choses ont changé et  cherchent à  accompagner le changement à  l'intérieur du système en place», analyse, pour l'AFP, Didier Le Saout, maître de conférences à  l'université Paris 8, spécialiste des mouvements sociaux au Maghreb. C'est plus d'un mois, souligne l'AFP, après l'annonce par le roi Mohammed VI d'une réforme constitutionnelle que Bouteflika se présente aux Algériens et évoque des réformes politiques. Revenant sur la levée de l'état d'urgence, Didier Le Saout note que cette «mesure de communication, destinée essentiellement à  l'international, n'avait rien changé au plan des libertés publiques, les manifestations restant interdites à  Alger». Quant à  l'historien Pierre Vermeren, spécialiste du Maghreb, il estime que «le grand tournant a été la manifestation des étudiants du 12 avril qui a réussi à  rassembler plus de
10 000 personnes à  Alger. Cela a été un électrochoc et Bouteflika a réagi à  cela». La réaction de Bouteflika est jugée «très tardive et témoigne d'une volonté de colmater les brèches». Pour Haoues Seniguer, du Groupe de recherche et d'études de la Méditerranée, basé à  Lyon (France), interrogé par l'AFP, ce discours «ne visait de fait qu'à déminer le terrain». «Le contenu est vide. Ces annonces n'aboutiront pas à  terme à  un changement de régime», note le spécialiste en appelant aussi à  la prudence au sujet des ouvertures esquissées par Mohammed VI, évoquant «des luttes» de pouvoir «dans son entourage». En proposant de valider les réformes par un référendum, les pouvoirs algérien et marocain «cherchent le plébiscite, en espérant faire à  terme d'un mouvement de contestation l'instrument d'une consolidation du pouvoir», poursuit Didier Le Saout. Ceci et d'ajouter que «la tâche s'annonce difficile dans les deux pays, où les attentes de la jeunesse sont très fortes et où, notamment en Algérie, le discours politique est discrédité».