Présentation de l'éditeur
Depuis le début des années 1990, trente ans après la fin de la guerre d'Algérie, le travail de mémoire sur cette atroce " guerre sans nom " n'a cessé de s'étendre, redonnant la parole à ceux qui en furent les acteurs du côté français : appelés du contingent, officiers tortionnaires, harkis, pieds-noirs, responsables politiques..
Mais celle de ceux qu'on a appelés les " porteurs de valises ", une petite minorité de femmes et d'hommes dont le rôle fut pourtant important, ne s'était encore guère faite entendre. En France, en Belgique et en Suisse, plusieurs centaines de jeunes militants courageux, venus d'horizons très divers, ont alors choisi de s'engager aux côtés des Algériens en lutte pour l'indépendance de leur pays. Jacques Charby, qui fut des leurs, a recueilli les témoignages de plus de soixante d'entre eux et les présente dans ce livre sans équivalent. En dépit de leur peu de goût pour les récits d'" anciens combattants ", chacune, chacun, raconte " sa " guerre d'Algérie avec vérité et précision. Ils ont tous assumé, pour la plupart dans le " réseau Jeanson " ou le " réseau Curiel ", des tâches dangereuses, et les ont parfois payées de nombreuses années de prison. Contribution décisive à l'histoire d'une guerre qui, malgré des milliers d'écrits, est encore loin d'être complète, ce livre est aussi un document majeur pour comprendre les ressorts de l'engagement. A l'heure où tant de jeunes s'interrogent sur les raisons et les façons de se battre contre l'inacceptable, ils y liront des pages inégalables : les " porteurs d'espoir ", s'ils n'ont jamais surestimé la portée de leurs actions, et quelles que soient leurs déceptions sur le devenir de l'Algérie indépendante, y expliquent, non sans émotion, leur sentiment d'avoir été utiles à une " juste cause ".
Ils sont l’honneur du peuple français Aux côtés des Algériens en guerre, les membres des réseaux de soutien dits «Jeanson» et «Curiel» se sont engagés dans des actions clandestines.
Le temps semble avoir pris assez son temps et l’histoire ses ambitions de vérité pour que des esprits justes et libres - ceux de l’autre rive de la Méditerranée -( puissent maintenant, comme dans le passé, exercer leur ferme volonté d’accomplir un travail (ou mieux un devoir) de mémoire très utile à tous. Ils ont à dire «la guerre d’Algérie» et à se dire avec la même modestie, la même pudeur, le même courage qu’il a fallu à ceux qui, comme Francis Jeanson, ont dénoncé «la guerre de reconquête coloniale» menée de 1954 à 1962 par les gouvernants français successifs et ont parlé «dès le début de l’insurrection algérienne «d’une guerre anachronique perdue d’avance»».
C’est la sincérité de ce choix, la fidélité coûte que coûte à la cause juste, que Jacques Charby tente de restituer à ses lecteurs à travers des témoignages saisissants réunis sous le titre Les Porteurs d’espoir (*), - et non sans apprécier «le travail considérable de Hervé Hamon et Patrick Rotman pour leur ouvrage pionnier Les Porteurs de valises (1979). Mais pour mieux cerner le but de l’ouvrage, un mot sur l’auteur est indispensable.
Jacques Charby est né en 1929 à Paris. Son père, membre du Parti communiste duquel il démissionne en 1924, était typographe, sa mère enseignante. La guerre de 39-45, «se déroule avec des épreuves familiales affreuses, dont le suicide de la mère de Jacques pour échapper à la Gestapo». Après un court passage dans les Jeunesses socialistes, Jacques Charby est très attiré par le théâtre. Il se marie en 1953 avec Aline Bouveret, une étudiante du grand ami de l’Algérie, le professeur André Mandouze, et il se passionne bientôt pour «les événements» qui ensanglantent l’Algérie.
Son engagement pour l’indépendance de l’Algérie le fait rejoindre le réseau de «Vincent» (celui-ci n’est autre que Francis Jeanson lui-même). Jacques Charby activera sous le nom de «François» et dira comment, en 1958, il s’est retrouvé dans un réseau de soutien au Front de libération nationale algérien.
«J’ai appris, confie-t-il, à estimer ces intellos qui ne se contentent pas de discourir. Tout de suite, j’ai été pris dans la bourrasque : notre journal, non autorisé bien entendu (Vérités pour...), le transport des militants algériens, les transferts d’argent, les refuges, les voitures, les diverses liaisons et, surtout, le recrutement.
Je n’étais pas clandestin, je continuais d’exercer mon métier de comédien, ce qui était pratique, justement, pour recruter. Bien entendu, je ne m’adressais pas à n’importe qui mais, généralement, je n’avais pas trop de peine à convaincre mes camarades. Après d’indispensables précautions (je «tournais autour du pot»), je me dévoilais, et je dois dire qu’alors je n’y allais pas par quatre chemins :
1) être pour la paix sans agir n’a pas de sens ;
2) la seule source de paix en Algérie est l’indépendance, elle ne peut être arrachée que par la lutte menée exclusivement par le FLN ;
3) ne pas aider le FLN, c’est refuser la paix et l’indépendance.
C’est ainsi que bon nombre de comédiennes, de comédiens, de cinéastes - recrutés par moi et par d’autres - nous ont rejoints pour diverses tâches [...] A mesure que la répression policière s’étendait, nous étions de plus en plus sollicités par nos camarades algériens (de jour comme de nuit). La sécurité des Algériens et la nôtre, et l’acheminement de l’argent étaient les priorités.»
Le livre de Charby présente des témoignages d’une grande authenticité (dont celui de Francis Jeanson) qui permettent de comprendre pourquoi et comment et de savoir dans quelles conditions se sont créés d’abord en France, puis en Belgique et en Suisse, les réseaux de soutien au FLN pendant la guerre d’Algérie.
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Posté Le : 05/01/2005
Posté par : nassima-v
Ecrit par : Kadour M´HAMSADJI
Source : www.lexpressiondz.com