Algérie

Les politiques adoptées ont échoué



Plusieurs chercheurs estiment que la subvention à la consommation constitue un frein au développement de la production locale.Les politiques laitières, coûteuses, adoptées en Algérie, ont montré leur échec. "Comme impact de la politique laitière algérienne, si l'on se réfère aux trois indicateurs d'analyse choisis (faute d'accès aux chiffres de la filière), à savoir (augmentation de la production, réduction des importations et les objectifs fixés, notamment la collecte), nous pouvons sans ambages juger qu'il est modeste", estiment Kousseila Bellil, chercheur au Cread (Centre de recherche en économie appliquée pour le développement), et Moussa Boukrif, du laboratoire de recherche en management et techniques quantitatives de l'Université de Béjaïa.
"En matière de lait, et au fil des années, plusieurs programmes ont été instaurés par les autorités dont l'objectif est de promouvoir la production nationale et réduire la facture alimentaire. Aujourd'hui, après tant d'efforts et de budgets, la filière tarde à se défaire de son extraversion et reste indéfiniment assujettie au marché mondial", constatent les deux chercheurs, dans une analyse publiée dans le dernier numéro de la revue Les cahiers du Cread. Cela est affirmé, relèvent-ils, par "la facture substantielle des importations, non seulement en matière de lait (1 245,91 millions dollars en 2019 selon le rapport du Cnis), mais aussi de la majorité des intrants de la filière (vaches laitières, aliments, vaccins, équipements, etc.)".
Les deux chercheurs s'interrogent sur le maintien de ces mêmes politiques, malgré leur inefficacité. Les politiques "importatrices" adoptées par les pouvoirs publics s'apparentaient plus à des politiques alimentaires visant à "nourrir la population" et donc "alimentaires" qu'à des politiques de développement d'un secteur porteur. De telles politiques ont eu des répercussions sur le niveau de consommation, puisque ce dernier a connu une augmentation considérable, au détriment de la production qui est restée toujours limitée faute de compétitivité. Ce qui a généré une déconnexion entre la production et la consommation, et ainsi, une forte extraversion de la filière.
L'analyse du schéma de développement de la filière lait dans la durée pose plusieurs interrogations. Elle a bénéficié d'une masse d'investissements relativement importante, tandis que son taux de croissance reste très modeste, notamment dans les maillons production et collecte. Selon les deux chercheurs, les différentes mesures incitatives, qui ont été mises en ?uvre par les autorités pour promouvoir la production locale, n'ont pas eu l'impact attendu. L'intégration du lait cru dans la transformation industrielle ne représente qu'une infime partie (environ 16% de la production bovine totale).
En amont de la filière, l'élevage à vocation laitière n'a pas connu une évolution significative. Il est conduit en hors sol, extensif et demeure peu productif (3 200 litres/vache/an), malgré les efforts d'amélioration génétique déployés. "On y voit immédiatement comment les politiques mises en ?uvre dépendent de l'importation", souligne-t-on. Les raisons d'un tel déficit peuvent être imputées à la faiblesse de la production au niveau des étables et à l'insuffisance ou à la déficience des politiques mises en place, ainsi qu'aux contraintes économiques que rencontrent les éleveurs (insuffisances de ressources financières).
L'ensemble de ces facteurs ainsi que la forte concurrence des activités et cultures à forte valeur ajoutée font que la spécialisation dans l'activité laitière est une stratégie rare, développée par quelques exploitations qui fonctionnent difficilement et connaissent les plus grandes contraintes financières. Bon nombre de chercheurs estiment que la subvention à la consommation constitue un frein au développement de la production locale.
Dans l'optique de surpasser cette dépendance vis-à-vis de la subvention, les deux chercheurs recommandent de réfléchir à promouvoir la coordination horizontale (coopératives) et verticale entre les acteurs de la filière. Cette coordination devrait permettre aux industriels de mieux contrôler leurs approvisionnements, ainsi que la qualité des matières premières fournies, et aux éleveurs d'améliorer leurs revenus grâce, notamment, à la forme coopérative.

Meziane RABHI


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