Le moment de désarroi des riches (le G8) est bien fini. Ce désarroi qui a
accompagné la crise financière a été celui où le G20, c'est-à-dire les riches
plus les économies émergentes, a donné l'illusion d'un déplacement ou d'un
élargissement de la gouvernance économique. Réunis à Toronto, après une réunion
du G8, les émergents du G20 constatent que la messe a été déjà dite. Aux
économies avancées - les Etats-Unis ayant cédé sur le sujet - on assigne le but
de la résorption des déficits, aux émergents la mission de tirer la croissance.
Le rejet d'une taxe sur les
banques ne peut même pas être mis au compte du G20, c'est le G8 qui l'a décidé.
Entre le premier G20, fin 2008 au cÅ“ur de la tornade financière, et celui de
Toronto, on ne peut que constater que les plus riches, ceux du G8, ont repris
toute l'assurance, un moment ébranlée. Et si le G20 - réduit au rang d'un
«majliss echourra saoudien», selon la formule assassine d'un expert algérien -
n'est pas décrété désuet, cela ne tient qu'à un souci des convenances
médiatiques et peut-être à l'idée vague qu'il peut encore servir, un jour…
Pour l'instant, le G8 a rappelé
qu'il ne partage pas son pouvoir. «Le G8 a montré qu'il est capable de
concevoir des approches crédibles pour relever les défis de notre temps.
Pendant plus de 30 ans, il a montré que sa volonté collective peut être un
catalyseur puissant du changement durable et du progrès». C'est ainsi que le G8
parle de lui-même.
Vague place de comparse
Faussement généreux, le Premier ministre néoconservateur canadien Stephen
Harper note que le «G20 a fait un superbe boulot pour contrer la crise
économique mais il y a franchement des limites à ce que vous pouvez faire et
obtenir dans un groupe de 20». La conclusion des dirigeants du G8 est claire,
le pouvoir est à eux, les émergents devront se contenter de la vague place de
comparse qui leur est concédée… Jusqu'à la prochaine crise… Pour l'instant, le
G20 fait mine de discuter des décisions entérinées par le G8… Cela n'empêchera
pas les réalistes de constater que le G8 est encore très vivant et que le G20
n'est pas encore né… L'illusion a été de courte durée. Le pouvoir de la Chine,
non membre du G8, ne tient pas à son statut de membre du G20 mais de celui de
membre permanent du Conseil de sécurité. Officiellement, l'absence du président
brésilien Luiz Inacio Lula da Silva est due aux graves inondations dans le
nord-est de son pays, mais beaucoup y voient un refus de servir d'alibi. Il est
vrai que l'épisode de l'accord sur le nucléaire iranien conclu avec Téhéran par
le Brésil et la Turquie et les réactions outragées qu'il a provoquées chez les
Occidentaux a été édifiant pour Lula. Aucune surprise de voir le G20 reprendre
les discussions arbitrées - et tranchées - par le G8.
En début d'après-midi, un projet
de communiqué du G20 évoque un accord sur une réduction de moitié de leurs
déficits sur une période de trois ans, avec une marge de manÅ“uvre propre à
chaque pays. Ils auraient ainsi jusqu'à 2013 pour assainir leurs finances. Le
débat, déjà clôturé au G8, entre réduction des déficits et relance, est évoqué.
«Il y a le risque qu'un ajustement budgétaire synchronisé de plusieurs grandes
économies impacte négativement la reprise. Il y a le risque aussi que l'absence
d'une consolidation nécessaire nuise à la confiance et entrave la croissance».
Voix discordantes et… vaines
Le G20 va par ailleurs appeler «les pays émergents avec un excédent» à
«accroître la flexibilité» de leur taux de change, précise encore le projet de
communiqué final. La déclaration du G20 intervient une semaine après l'annonce
par la Banque centrale chinoise de son intention d'assouplir son régime de
changes, ce qui devrait permettre une revalorisation mineure de la monnaie
chinoise. La faiblesse du yuan est régulièrement dénoncée par les Etats-Unis
qui ont même menacé de prendre des sanctions à l'encontre de la Chine accusée
de soutenir ainsi artificiellement ses exportations et de décourager les
importations. En tout état de cause, l'option du G8 est strictement avalisée
même si le ministre brésilien des Finances Guido Mantega, qui préside la
délégation de son pays, montre qu'il n'est pas dupe des intentions des
Européens. «Ces pays, au lieu de stimuler la croissance, prêtent plus d'attention
à l'ajustement budgétaire, et s'ils sont exportateurs, ils le feront cet
ajustement à notre détriment…».
C'est une priorité «totalement fausse», a souligné pour sa part Cristina
Kirchner, la présidente argentine. Ces voix discordantes n'ont pas la moindre
des chances d'être entendues dans un système qui s'est refermé dès qu'il a jugé
que la crise qu'il avait lui-même provoqué, était achevée.
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Posté Le : 28/06/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : K Selim
Source : www.lequotidien-oran.com