Algérie

Les pays du sud de la Méditerranée ne sont pas encore arrivés à une gestion durable de l'eau



Les pays du sud de la Méditerranée ne sont pas encore arrivés à une gestion durable de l'eau
La demande en eau dans les pays du sud de la Méditerranée ne cesse d'augmenter, à cause des effets cumulés de l'urbanisation, d'une littoralisation croissante des populations, ainsi que du développement de l'irrigation. La gestion de l'or bleu est donc devenue un enjeu majeur pour ces pays. Dans ce contexte fragile, la puissance publique a un rôle de régulateur très important à jouer, a soutenu Jean-Luc Redaud, ingénieur français des Ponts, des eaux et des fôrets, et membre de l'Académie de l'eau, lors d'une conférence donnée samedi 20 octobre, à Alger.
« La gestion de l'eau en Algérie est sûrement la plus difficile des trois pays du Maghreb, à cause d'une forte concentration des ressources disponibles, qui appelle la mise en place d'une politique ambitieuse et organisée de transferts. Et il y a surtout le problème du Sahara», a déclaré Jean-Luc Redaud, en marge de la conférence organisée à Alger sur le thème de la « gouvernance de l'eau ».
L'Algérie serait-elle donc en état de « stress hydrique », c'est-à-dire confrontée à un manque structurel de ressources en eau ' L'ingénieur français n'a pas voulu se prononcer, et a préféré répondre plus généralement que la « situation de stress hydrique était le plus souvent liée à une mauvaise gestion des équipements publics, entraînant un énorme gaspillage, plutôt qu'à un manque de ressources en eau ».
Dans de telles conditions, les choix d'exploitation de l'eau dans le pays ont été déterminants. « Les unités de dessalement ont permis de répondre rapidement à une situation devenue insoutenable dans les années 80-90 », a estimé Jean-Luc Redaud, tout en admettant que « le rejet des eaux de saumure extrêmement salées dans la mer n'était pas très bon ». Par ailleurs, ces unités coûtent très cher, même si de nouvelles techniques d'exploitation, notamment l'utilisation de la membrane, ont permis une baisse sensible des coûts.
Les barrages offrent une solution moins coûteuse, mais les effets du changement climatique menacent leur efficacité, a déclaré Jean-Luc Redaud. « Le barrage stocke l'eau excédentaire. Il faut donc s'assurer que le bassin d'alimentation soit suffisamment grand pour le remplir. Or, avec le réchauffement climatique et la multiplication des sécheresses, on n'est plus sûr d'y arriver », a-t-il poursuivi, en prenant l'exemple du Maroc dont les perspectives à l'écoulement des barrages ont été fortement réduites.
La troisième solution, l'exploitation des nappes fossiles du Sahara, n'a été qu'effleurée. « Tout dépend de la puissance de la nappe », a répondu le membre de l'Académie de l'eau, précisant que « son exploitation devra s'en tenir à ses capacités de renouvellement ».
Un secteur d'investissement sur le long terme
L'eau, ressource renouvelable et partagée, se trouve donc au coeur d'un système économique complexe, dans lequel intervient à la fois la puissance publique, des entreprises privées et les usagers, a expliqué Jean-Luc Redaud. « La mise en place d'un réseau d'assainissement et de gestion de l'eau a un coût. La question est de savoir qui paie. On a le plus souvent affaire à un mixte entre les impôts, la taxe pour services rendus (prix de l'eau) et la taxe d'intérêt collectif, même si chaque pays choisit son propre fonctionnement ». La tarification repose sur un équilibre difficile à trouver, a-t-il dit: « Si elle s'avère utile pour encourager l'usager à un comportement vertueux, elle doit aussi préserver l'accessibilité aux plus pauvres. Mais des services sous-tarifiés aboutissent à une mauvaise maintenance des ouvrages qui tombent en panne », a-t-il affirmé.
Face à ces enjeux économiques de taille liés à l'eau - gestion, équité sociale, récupération des investissements, création de recettes pérennes, partenariat public-privé ' les Nations Unies ont élaboré le Rapport Camdessus lors du sommet de Kyoto en 2003. « Ce rapport économique fixait des objectifs très ambitieux, à savoir réduire de moitié, d'ici 2015, le nombre de personnes ne disposant pas d'un accès minimal à l'eau potable, estimé à plus d'un milliard de personnes», explique Jean-luc Redaud. Pour cela, 300 milliards d'euros devaient être investis. Mais touchés par la crise économique, les principaux pourvoyeurs de fonds ont réduit leur aide internationale, et l'appel de Camdessus aux aides publiques de développement n'a pas été entendu.
Reste la voie de la coopération entre pays du nord de la Méditerranée et ceux du sud. Le projet Transmed, lancé par l'agence nationale de la recherche, s'inscrit dans cette volonté d'échange de compétences afin que les pays du sud de la Méditerranée se rapprochent de l'état de stabilité de demande en eau acquise chez leurs voisins de la rive nord.
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