Algérie

Les Oranais et les viandes importées de l'Inde: Entre réticences et nécessité



Interrogée sur la viande de provenance de l'Inde, une ménagère nous servira la réponse suivante: «hors de question que j'avale ça» ! La raison qu'elle invoquera est des plus étonnantes: «qui me garantit que ces bêtes ne se sont pas abreuvées dans les fleuves pollués par la cendre des morts». Visiblement, cette dame connaît les pratiques religieuses de ce sous continent asiatique. Elle ajoutera: «je préfère un ramadan sans viande que de manger cette chair». Après renseignement, on s'apercevra qu'elle est cadre dans une entreprise, que son mari exerce une fonction libérale et qu'elle ne vit pas dans une famille élargie. Un autre sondé nous assénera une autre réponse empreinte de jugement de valeur. «La viande en provenance du Soudan, ça peut passer, parce que c'est un pays musulman. Mais de l'Inde, un pays où on vénère les cobras ! Non, merci». Et de conclure: «durant le mois de Ramadan, hors question de courir un tel risque». Il a balayé d'un bloc nos explications disant que l'Algérie a envoyé une mission pour égorger les bêtes selon le rite musulman. Un troisième abondera dans le même sens et dira: «j'aurais aimé ne pas connaître la provenance de cette viande pour pouvoir la consommer. Les images de ce pays diffusées par la télévision, peu reluisantes, se présenteront à mes yeux quand je voudrais en manger». Ce dernier reconnaîtra qu'il consomme d'habitude la viande congelée. «Elle vient des pays européens», s'interrogera-t-il. Notre interlocuteur nous fera part de sa conviction que les marchands européens sont plus à cheval sur le respect de la norme que les autres pays de l'hémisphère sud. Il profitera pour nous relater une émission vue à la télévision sur la contrefaçon du médicament, très courante en Inde. Un autre ira chercher son argument de rejet de la viande en provenance de l'Inde sur un autre registre. «Par principe, j'ai décidé de ne pas l'acheter», dit-il. Il se déclare persuadé de l'existence d'un lobby qui a opté en dernière minute pour l'Inde, aux lieu et place du Soudan, pour la fourniture de la viande. Il citera, pour confirmation, un article paru dans un quotidien arabophone.         Un autre, presque surpris par notre question, nous dira: «une vache est une vache.          Elevée en Inde ou en Russie, elle a le même aspect et se nourrit des mêmes produits». Il généralisera ainsi: «moi je mange et je ne me pose pas de question». Un chauffeur de taxi nous assénera une autre réponse: «moi, je ne fais pas confiance aux nôtres. Sinon, les produits importés ne me posent aucun problème». Sollicité d'expliciter davantage sa pensée, il lancera sur un ton presque excédé, «vous vous souvenez d'un ramadhan où on nous a fait manger de la viande hachée d'ânes ?». Plus réaliste, un chef de famille se limitera à dire que «si quelqu'un arrive à me convaincre que cette viande est «halal, je l'achèterai». Il avouera «mes conditions financières ne me permettront pas de me payer la viande bovine fraîche». Mais qui est en mesure de le convaincre ? «Peut-être l'imam de la mosquée», lance-t-il. Notre question semblera saugrenue à un boucher. «Quand il s'agit de se remplir la panse, les gens cessent de formuler les exigences», remarquera-t-il. «Rares sont ceux qui m'ont interrogé sur la viande congelée que je vends depuis des années, alors que dire durant le mois de carême où le cerveau se déplace vers le ventre? »

 Mis au courant des résultats de notre simple sondage, un intellectuel nous fera la réflexion suivante: «il est intéressant de relever dans ce cas de figure que les réticences proviennent des personnes issues des couches moins démunies». Il ajoutera: «généralement ce sont ces couches qui se montrent plus enclines et plus favorables au changement du modèle de consommation». Dans ce sens, il nous recommande les analyses d'un collègue à lui, liant l'ère de la consommation du surgelé à la prolifération du discours sur la libération des femmes.          Mais il admettra que nous sommes en présence d'une autre réalité…




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