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Les options de Boeing apres l'accord sur le CSeries : Nouvel avion, alliance avec Embraer '


Les options de Boeing apres l'accord sur le CSeries : Nouvel avion, alliance avec Embraer '
Boeing pourrait riposter à l'alliance Airbus/Bombardier en s'associant au brésilien Embraer dans le moyen-courrier tout en lançant un nouvel avion pour contrer les ambitions américaines de son rival européen."Tout ce qui est bon pour Airbus est mauvais pour Boeing", confie Jim Corridore, expert chez CFRA, résumant le sentiment général dans le monde de l'aéronautique après l'annonce inattendue dans la nuit de lundi à mardi d'un partenariat stratégique Airbus/Bombardier.
Ce rapprochement permet au premier d'ajouter dans son catalogue le segment moyen-courrier de 100 à 150 places à moindre coût car l'accord lui offre 50,01% des parts dans le programme CSeries du second sans qu'il ne débourse un centime.
Airbus pourra en outre désormais se concentrer sur le haut de sa gamme du moyen-courrier, des avions de 180 places et au-delà, et conforter son avance dans ce secteur sur Boeing, qu'il domine déjà avec les A320neo remotorisés. "Nous pensons qu'Airbus veut mettre la pression sur Boeing dans les moyen-courriers et étendre sa présence nord-américaine", en déduit Chris Higgins, analyste chez MorningStar.
Cette alliance ressemble à "un accord discutable entre deux concurrents dépendant grandement des subventions de l'Etat pour contourner" les récentes décisions américaines d'imposer des droits compensatoires et antidumping au Cseries, a réagi Boeing.
L'avionneur américain était silencieux mardi et examinait, selon une source proche du dossier, ses options.

'Déloyal'
Il devrait sans surprise demander aux autorités de la concurrence de s'opposer à l'accord, dont il devrait ressentir les conséquences à l'horizon 2025, date à laquelle les ventes du monocouloir 737 MAX sont appelées à se tasser, avance Michel Merluzeau, chez Air Insight.
"Je ne vois pas la base juridique sur laquelle les régulateurs vont se fonder pour empêcher l'alliance", fait valoir Jim Corridore.
C'est surtout sur le terrain technologique que Boeing devrait répondre à ses rivaux car Airbus va mettre les moyens pour accompagner le développement et le succès commercial du CSeries, s'accordent les experts.
D'autant qu'une version allongée de ce programme, le CSeries 500, bardé des dernières technologies, devrait arriver sur le marché d'ici 2025 pour concurrencer le 737 MAX 8 de Boeing pouvant transporter jusqu'à 200 passagers.
"Boeing va devoir renouveler beaucoup plus tôt que prévu sa gamme de monocouloirs s'il veut garder l'initiative technologique", souligne Michel Merluzeau, tandis que Chris Higgins estime que l'avionneur n'a plus d'autre choix que de combler le trou dans son catalogue entre le 737 MAX (jusqu'à 220 passagers) et le 787 (à partir de 250 sièges) en lançant un nouvel avion.
"Nous pensons que les chances de lancement d'un nouveau programme par Boeing dans les 12 prochains moins ont désormais augmenté et sont au-dessus de 50%", estime M. Higgins.
"Je suis convaincu que ça va se faire maintenant", renchérit M. Merluzeau.
En juin, Boeing a laissé entendre qu'un tel projet, le "MoM" (milieu du marché), était dans les tuyaux pour répondre à la demande des compagnies aériennes qui veulent des monocouloirs pouvant effectuer de longues distances.
Boeing pourrait également renforcer ses liens avec l'avionneur brésilien Embraer, dont le monocouloir E2 est un concurrent direct du CSeries. Les trois versions de cette famille E2 (E175, E190 et E195) doivent entrer en service entre 2018 et 2020. "Il est dans l'intérêt d'Embraer de s'associer à Boeing car battre Bombardier avec son offre de E2 n'était pas difficile quand l'avenir du CSeries était incertain mais la donne a changé", argumente Chris Higgins.
Les deux constructeurs aéronautiques travaillent déjà ensemble sur l'avion de transport militaire KC-390, Boeing s'occupant notamment de la partie commerciale et marketing. Le rapprochement Airbus/Bombardier intervient au moment où le second est soumis à une forte pression des Etats-Unis qui ont imposé des droits préliminaires de 220% sur ces avions CSeries importés sur leur sol, ainsi qu'une taxe antidumping de 80%. Boeing accuse Bombardier de fabriquer ces avions grâce à des subventions publiques et de les avoir vendus à perte à Delta Air Lines.
Pour soutenir les ventes du CSeries, Airbus et Bombardier projettent d'installer aux Etats-Unis une ligne d'assemblage aux Etats-Unis, à Mobile (Alabama, sud), où Airbus est déjà implanté.
"Boeing voulait faire savoir que Bombardier bénéficiait d'un avantage concurrentiel déloyal et ça semble finalement se retourner contre lui", constate Jim Corridore.

L'accord ne dissipe pas le trouble chez Airbus
Airbus a réussi un joli coup en prenant le contrôle du programme d'avions de ligne CSeries de Bombardier pour seulement un dollar mais le trouble qui prévaut en interne chez l'avionneur européen, visé par des enquêtes pour corruption présumée, nourrit les interrogations sur sa capacité à tirer pleinement profit de cet accord.
Airbus a convaincu Bombardier de lui laisser le contrôle du CSeries, dans lequel le groupe canadien a déjà investi à perte six milliards de dollars, en promettant de mettre à disposition de l'appareil sa force de frappe commerciale.
Les équipes commerciales d'Airbus sont pourtant ébranlées par le recul des ventes du groupe et par les enquêtes internes et externes ouvertes pour des soupçons de corruption.
Tom Enders, président exécutif de l'avionneur européen, a invité ses troupes à garder leur sang-froid malgré les accusations de versements d'argent à des intermédiaires dans des ventes d'avions civils et de fraude dans un contrat Eurofighter.
L'ambiance au siège du groupe à Toulouse reste cependant morose.
"Bombardier a appelé une ambulance et Airbus a envoyé un corbillard", a dit une personne étroitement liée à l'avionneur.
L'attention portée aux enquêtes a permis de garder le secret sur les négociations autour du CSeries. Des rumeurs ont circulé fin août selon lesquelles Tom Enders et l'un de ses collaborateurs se trouvaient à Paris pour y rencontrer des enquêteurs. Ils étaient en fait venus participer au premier de plusieurs dîners de travail avec Bombardier.
Le scandale de corruption présumée commence néanmoins à peser sur les ventes. Dans son duel face à l'américain Boeing, Airbus traverse une passe difficile et ses ventes n'ont représenté que 35% des livraisons mondiales d'avions sur les neuf premiers mois de l'année.

Airbus dément toute déstabilisation
Les équipes commerciales d'Airbus sont démoralisées et désorientées, affirment de multiples sources du secteur aéronautique, certains reprochant à Tom Enders d'avoir tiré une balle dans le pied du groupe en décidant d'alerter les autorités sur les versements présumés à des intermédiaires à la suite d'une enquête interne.
D'après deux sources, la situation est tellement tendue que certains employés préfèrent s'abstenir de conclure des contrats dans certains pays jugés problématiques plutôt que de courir le risque d'être ensuite concernés par l'enquête ou soumis à de rudes interrogatoires par les avocats d'Airbus.
L'emblématique directeur commercial John Leahy, qui a prévu de partir prochainement à la retraite, a été prié de rester jusqu'à la fin de l'année pour stabiliser la situation mais son successeur n'a toujours pas été officiellement confirmé ce qui nourrit un sentiment de vide parmi les équipes.
John Leahy a désigné son adjoint Kiran Rao comme son successeur cette année mais les turbulences actuelles ne sont pas jugées propices à des annonces d'une telle importance.
Airbus avait prédit de longue date un ralentissement de ses ventes cette année après une période faste en termes de commandes.
Un porte-parole a démenti toute instabilité au sein du groupe. "Nous avons une équipe commerciale de valeur (...) mais il est pleinement admis qu'ils ne peuvent répéter les records tous les ans; et l'année n'est pas terminée", a dit ce porte-parole.
Airbus affirme n'avoir découvert aucune preuve de corruption durant son enquête interne mais Tom Enders est déterminé à revoir les pratiques commerciales historiquement partagées entre Toulouse et Paris.
Du côté de Bombardier, une source proche du groupe canadien admet qu'Airbus connaît une période perturbée mais elle s'attend à ce que les choses rentrent dans l'ordre d'ici la conclusion de la transaction autour du CSeries l'an prochain.
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