Les mesures de facilitation d'accès aux crédits, au foncier ainsi que le coup de pouce fiscal aux entreprises tardent à se concrétiser sur le terrain.Les opérateurs attendent toujours la mise à exécution des mesures et autres facilités promises par le gouvernement pour redémarrer la machine économique. Les producteurs locaux s'impatientent de connaître les priorités de l'exécutif, les délais impartis pour leur mise en ?uvre et surtout les textes d'application liés aux décisions prises en faveur des entreprises.
"Il est grand temps que les choses se mettent en place", déclare Ali Hamani, président de l'Association des producteurs de boissons (Apab). Pour lui, les producteurs nationaux sont toujours dans l'expectative, alors que "l'économie n'attend pas". Le président de l'Apab pointe du doigt une administration bureaucratique à l'origine de toutes ces lenteurs. Les investisseurs déplorent aussi la mauvaise interprétation ou une application erronée des décisions des hautes autorités du pays. Ali Hamani cite l'exemple de l'interdiction du fromage à l'exportation pour cause d'utilisation de matière première (poudre de lait) subventionnée.
Cette mesure, estime-t-il, ne doit pas s'appliquer aux exportateurs qui importent eux-mêmes la matière première sans passer par l'Office national interprofessionnel du lait (Onil). "Pourquoi priver cette catégorie d'opérateurs de leur part de marché à l'extérieur, notamment ceux qui ont des commandes à honorer '", s'interroge-t-il. Ce type de problèmes aurait été réglé si les institutions concernées avaient pris attache avec les producteurs dans le cadre d'une concertation.
Pourtant, le président de la République et le Premier ministre ne cessent d'appeler au dialogue entre l'administration publique et les hommes d'affaires pour une meilleure mise en ?uvre des décisions arrêtées, fait constater notre interlocuteur. "Malheureusement, les ministres et autres directeurs centraux au sein des ministères croient que leur autorité diminuera s'ils dialoguent ou négocient avec les opérateurs économiques", tient à préciser Ali Hamani. Ce n'est pas le cas ailleurs, sous d'autres cieux, souligne-t-il, où le dialogue et la négociation entre les deux parties se font dans l'intérêt de l'économie et du pays.
Une situation intenable
"Aujourd'hui, les opérateurs sont dans l'expectative. En attente des crédits promis par le gouvernement, des facilitations accordées en termes de fiscalité et de parafiscalité... l'exécution de ces décisions traîne encore", constate le président de cette organisation.
Quelles sont les répercussions de toutes ces lenteurs bureaucratiques sur les entreprises et l'économie ' "L'impact est direct", lance Ali Hamani. La majorité des entreprises n'a pas travaillé pendant six mois à cause de la crise sanitaire. "Un jour sans production est un jour de perdu pour une PME", constate-t-il. "L'Etat a obligé les sociétés à libérer 50% des effectifs à cause de la Covid-19, mais nous avons continué quand même à payer les salaires des employés. Sur le plan de la trésorerie, il y a eu des dépenses sans qu'il y ait de recettes", relève-t-il.
Par conséquent, ces entreprises, précise Ali Hamani, ont besoin d'argent, de facilités de caisse pour s'approvisionner en matière première, afin de pouvoir relancer leur appareil de production. Il ne faut surtout pas considérer, indique le président de l'Apab, que toute entreprise qui souffre de trésorerie est en faillite. Cette catégorie de PME doit bénéficier au contraire d'un soutien de l'Etat pour sa survie. "En Algérie, il existe deux situations : soit l'entreprise est en vie, soit elle est morte", ironise-t-il. En revanche, la PME a besoin actuellement d'une "bouffée d'oxygène, d'un peu de trésorerie pour pouvoir redémarrer". Car, argue-t-il, elle détient des créances au sein de sa clientèle. Et si son client ne commercialise pas ses produits, affirme-t-il, il ne peut, de ce fait, la payer. C'est toute une chaîne.
Des solutions existent, pense Ali Hamani, qui cite l'exemple de la France qui a mis des milliards d'euros dans les banques qui serviront de garantie pour les crédits à accorder aux entreprises. Une chose est certaine, l'Etat algérien n'a pas intérêt à ce qu'une entreprise créatrice de richesses et d'emplois meure en ce moment. L'Etat a intérêt à maintenir les unités de production en vie, sinon tout ce qui les entoure, dont le produit, la main-d'?uvre, la fiscalité, disparaîtra avec elles.
Persistance des écueils
Pour sa part, Siad Mohamed, P-DG des établissements Siad, spécialisés dans le domaine de l'automobile, avoue qu'en tant qu'opérateur économique, il attend toujours la mise en application des mesures sur lesquelles s'est engagé l'Exécutif tout en affichant sa "confiance" en les pouvoirs publics. "Nous attendons impatiemment, mais nous avons confiance en nos autorités", dit-il. La situation est difficile surtout pour les entreprises qui disposent d'effectifs étoffés. L'Etat doit les accompagner notamment en cette période délicate que traverse le pays. Sinon, de manière générale, les mêmes problématiques auxquelles fait face la PME algérienne restent toujours posées.
L'entreprise algérienne est souvent confrontée à des contraintes bureaucratiques, à la difficulté, voire à l'impossibilité d'accès au foncier et au crédit, ... autant de facteurs de blocage à lever impérativement si l'on veut réellement concrétiser la relance économique à laquelle aspirent les pouvoirs publics. "Il ne faut pas confondre opportunité qui est dans la nature humaine et l'opportunisme qui émane du diable", souligne Mohamed Siad. Pour cet opérateur, il faut que l'Etat, à travers tous ses démembrements, affiche une réelle volonté politique. Il évoque l'indispensable solidarité entre tous les exécutants avec une même feuille de route dans une "transparence et une probité totales".
À l'instar des autres sociétés activant dans l'automobile, son groupe vit en ce moment une période difficile. À vrai dire, ces difficultés remontent à l'année 2015. "Nous continuons à payer nos employés même s'ils ne travaillent pas. Nous vivons depuis quelques années un stress permanent. Nous avons atteint le fond. Mais c'est cela la vie d'un investisseur, d'un opérateur économique, s'il tombe, il doit se relever", témoigne-t-il. Mohamed Siad qui tient, par ailleurs, à dénoncer les erreurs commises par les experts chargés de l'élaboration du cahier des charges relatif à l'automobile. "Ils ont mélangé les véhicules avec les engins. Je pense que même au ministère de tutelle, ils ont bien compris ces anomalies. Ces fautes demeurent toutefois corrigeables pour peu qu'il y ait une volonté d'améliorer les choses", atteste-t-il.
Badreddine KHRIS
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Posté Le : 06/09/2020
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Badreddine KHRIS
Source : www.liberte-algerie.com