Les nouveaux profils de la migration

Les émigrés algériens sont stigmatisés. Ils ne sont pas valorisés. Ils ne sont pas bien vus par l'Etat, qui est d'essence nationale.Ce sont là les conclusions de Aïssa Kadri, sociologue et chercheur, mises en exergue, hier à Alger, lors d'une table ronde organisée à l'Institut français d'Alger (IFA) sur le thème «Les nouveaux modèles migratoires en Méditerranée». Khelifa Messamah, économiste et maître de conférences, et Mustapha Hazoune, journaliste et écrivain, ont coanimé le débat.Aïssa Kadri a exposé les différents paramètres à l'origine des nouveaux processus d'émigration. Il indique qu'il est à distinguer entre «la vieille émigration, de profil ouvrier, et celle qui a commencé à prendre forme à partir des années 1990». «Depuis la chute du Mur de Berlin, l'émigration vers l'Europe concerne, entre autres, une catégorie de jeunes qualifiés qui se sont émancipés de la famille, de la tribu et de l'Etat-nation. Il y a un processus d'individuation», observe le chercheur. D'autres facteurs expliquent également cette tendance. «S'émanciper, vivre en liberté, s'épanouir, ou des raisons tout simplement politiques poussent ces jeunes vers d'autres horizons», ajoute Aïssa Kadri. L'universitaire souligne, dans le même sillage, que «le processus d'émigration se féminise».«Nous constatons, poursuit-il, un flux migratoire composé de femmes qualifiées, souvent encouragées par leurs familles.» Une troisième catégorie de migrants a été définie par le conférencier : les réfugiés climatiques et politiques. Dans la foulée, Aïssa Kadri a précisé que «les pays du Maghreb sont devenus des pays d'accueil, alors qu'ils étaient des pays de transit». «Même la France et des pays européens sont devenus des pays de transit, après avoir été longtemps des pays d'accueil. Des migrants choissent ces pays, puis décident d'aller vers l'Europe du Nord (Danemark, Suède) ou vers l'Amérique du Nord (Etats-Unis, Canada)», a-t-il affirmé.