Algérie

Les nouveaux députés vont-ils déroger à la règle '



Les nouveaux députés vont prendre place au sein de l'APN et commencer leurs travaux bientôt. Ceux-ci sont sensés être au-dessus de tout soupçon et déclarer leur patrimoine dans un souci de transparence, comme l'exige la réglementation. Contactés par nos soins, des acteurs de la scène politique, de la justice et de la société civile réagissent et apportent des précisions quant à l'application de cette loi. Un texte qui n'impose pas de délais. Cette faille est fortement soulignée.
Selon Djamel Aïdouni, président du Syndicat des magistrats, la déclaration du patrimoine reste contraignante. Entrée en vigueur le 20 février 2006, la loi n° 06/01 vise à «prévenir et à combattre la corruption, promouvoir l'intégrité, la responsabilité et la transparence dans la gestion des secteurs public et privé, faciliter et appuyer la coopération internationale et l'assistance technique aux fins de la prévention et de la lutte contre la corruption, y compris le recouvrement d'avoirs».
Il précise que cette loi concerne la totalité des cadres de la nation et obligatoire y compris pour le président de la République.
Dans l'article 6 de la loi, les parlementaires et les élus des assemblées locales sont concernés. Le texte fait obligation aux élus de déclarer leur patrimoine par affichage public pendant un mois. «La déclaration de patrimoine des présidents et des membres élus des Assemblées populaires locales s'effectue devant l'organe et fait l'objet de publicité par voie d'affichage pendant un mois au siège de la commune ou de la wilaya, selon le cas», stipule l'article 6.
Un texte coercitif
Pour ce qui concerne les cas de manquement à la loi, les sanctions sont lourdes. Ainsi, l'article 36 énonce qu' «est puni d'un emprisonnement de six mois à cinq ans et d'une amende de 50 000 DA à 500 000 DA, tout agent public, assujetti légalement à une déclaration de patrimoine et qui, deux mois après un rappel par voie légale, n'aura pas fait, sciemment de déclaration de son patrimoine,
ou aura fait une déclaration incomplète, inexacte ou fausse, ou formulé sciemment de fausses observations ou qui aura délibérément violé les obligations qui lui sont imposées par la loi».
M. Aïdouni précise que la déclaration de patrimoine engage le député et non sa formation politique. Cette action s'inscrit dans le cadre de la lutte contre la corruption.
«La loi est claire. Pour éviter tout soupçon de possession de biens illicites, il faut les déclarer avant la prise de fonction.
Si elle est appliquée par les députés, elles les préservent de poursuites pour corruption.» Notre interlocuteur ne connaît pas le nombre de députés qui s'y ait astreint mais pense que ce sont tous les députés qui ont dû le faire. Et de relever que «le traitement des déclarations de patrimoine prennent du temps.
Le député après son entrée en fonction doit remplir les imprimés, les enregistrer et les transférer vers le président de la Cour suprême. Tout cela prend du temps». Concernant les sanctions encourues en cas de non-respect de la loi, M. Aïdouni pense que la majorité des députés ne sont pas hors la loi et au cas où certains sont poursuivis, ces derniers encourent de lourdes sanctions pénales.
Au sujet de la précédente APN, il admet ne pas savoir si tous les députés avaient fait leur devoir de déclarer leurs biens.
De son côté, Maître Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH) estime que cette «loi est des plus justes». «Le député doit déclarer officiellement sur l'honneur la totalité de ses biens pour que l'on sache s'il s'est enrichi illicitement ou non. C'est une mesure morale qui n'engage que «l'élu».
Et de préciser : «Cette loi va dans le bon sens. Elle va décourager ceux qui veulent profiter de leur mandat pour s'enrichir.» Il ajouta : «Cette législation est en cours d'élaboration dans de nombreux pays. Il faut l'appliquer car personne ne peut protester une telle loi.» Cependant, Maître Ksentini relève que «la loi n'est pas encore contraignante et je souhaite qu'elle le devienne afin qu'elle assainisse le climat politique.»
L'avis des partis
Des cadres de parti, contactés par nos soins, soutiennent la nécessité de respecter la loi et de l'appliquer de manière scrupuleuse pour tous sans exception. Le porte-parole du FLN, Kassa Aïssi, n'a pas d'avis particulier sur cette question, mais insiste sur l'application stricte de la loi. Maître Bouchachi, élu FFS d'Alger, nous indique, quant à lui, que ce n'est pas au parti d'appeler à la déclaration du patrimoine, car c'est une obligation pour tous. Et de préciser : «Tous les députés sont dans l'obligation d'accomplir ce devoir.
L'appartenance ou non à un parti politique n'est pas une raison de s'abstenir.» Selon lui, cette loi est bonne dans le sens qu'elle incite à la mise en place d'une gestion transparente des affaires publiques que les Algériens peuvent constater. «Les Algériens ont le droit de connaître le patrimoine de leurs élus avant et après leur mandature. C'est une façon de savoir comment le député s'est enrichi.
C'est aussi une manière de détourner le politicien de toute tentative de corruption, dans la mesure où il ne doit pas utiliser sa fonction pour s'enrichir», souligne-t-il. Questionné sur sa situation vis-à-vis de la loi, ce dernier nous a précisé que l'APN n'est pas encore installée. Il se dit prêt à le faire avant de signaler qu'il n'y a pas de délais impartis dans la législation algérienne.
«La logique voudrait tout de même que les choses se décantent autour de 3 à 6 mois après l'installation des députés», précise-t-il.
Djelloul Djoudi, porte-parole du Parti des travailleurs (PT), pense que la majorité des députés feront leur devoir car «personne n'est au-dessus des lois». Le député se doit d'être transparent et respecter ses élus, appuie-t-il estimant que l'application de cette loi est un moyen de savoir si les députés utilisent leur mandat à d'autre fin que celle de servir leur pays.
La majorité des cadres politiques interrogés à ce sujet ignorent si des députés avaient rendu publiques leurs déclarations de patrimoine au cours de la précédente législature. Malgré le caractère coercitif de ce texte, sa promulgation depuis 6 ans, les sanctions n'ont jamais été appliquées aux élus. Ce qui faire dire à certains que les parlementaires disposent d'une quasi-immunité. Les nouveaux élus vont-il se montrer à la hauteur de leur fonction et déclarer leurs biens '




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