Les non-dits

Résumé : Rédha ouvre son c?ur. Il n'est plus comme avant. Il a changé, et ce, depuis le jour où il l'a rencontrée. Jamais il n'a voulu faire souffrir sa mère et encore moins elle. Fadhéla le croit. Elle n'a pas parlé de leurs problèmes car elle avait honte. La colère passée, elle écoute son c?ur. Elle allait lui donner une nouvelle chance pour que Walid puisse grandir entouré de ses deux parents.Le lendemain matin, Rédha se rend au cimetière. Il dépose des fleurs sur la tombe de sa mère. Il s'assoit tout près, appuyant la tête sur la stèle en marbre.
-Bonjour yemma... Yemma laâziza, j'ignore si tu peux me voir ou m'entendre de là où tu es. Je sais que c'est fou, mais je l'espère de tout c?ur. Tu sais, je t'imagine au Paradis, dans un jardin d'arbres fruitiers assise sur une bergère. En fait, tu ne peux pas être ailleurs qu'au Paradis. Je prie chaque instant pour ton repos éternel, car ici-bas, je t'ai fait vivre bien des déceptions. Yemma, je le regrette. Jamais je n'ai voulu te voir souffrir et encore moins, que tu puisses quitter ce bas monde, sans ma présence. Et surtout, tu étais fâchée... Je sais que tu n'as pas supporté que je sois différent des autres. Moi-même, j'en souffrais. Tu avais tout fait pour me sauver. Je peux même te dire que tu as réussi. Je te le jure, depuis que je suis reparti à Londres, je suis normal et ai une relation normale avec ma femme. Et j'adore Walid, je sais que tu l'aurais adoré. Tu étais encore fâchée, tu n'as pas voulu revenir à Londres où tu avais des mauvais souvenirs. Yemma, j'ai vraiment changé. Dommage que tu ne sois plus là, pour le voir de tes propres yeux. Tu aurais quitté ce bas monde le c?ur tranquille. Je regrette qu'on n'ait pas pu se revoir. Tu me manques tellement. Tu sais, il y a trois jours, Fadhéla a découvert les photos que tu avais cachées et elle est partie fâchée, décidée à divorcer et à me prendre mon fils. J'ai failli les perdre. J'ai pensé à me suicider, je ne voulais pas les perdre. Yemma, ne t'inquiète pas, Fadhéla et moi avons beaucoup parlé, et on s'est entendus. Elle a accepté qu'on tourne la page et qu'on aille de l'avant. Yemma, j'espère que tu m'entends... Je promets de prendre soin d'eux. Je te le jure. Je voulais te le dire avant de partir à Londres. Dans quelques heures, je serais loin d'ici, mais mon c?ur, je le laisse là. Repose en paix et au Paradis. Je t'aime yemma. J'espère que tu m'as pardonné. C'est tout ce que je voulais entendre "rak msamah wlidi".
Un bruit de pas, derrière lui, le fait sursauter. Il se lève en tournant la tête. Ce n'est que Samra. Elle l'a suivi au cimetière et elle est restée à bonne distance. Elle a tout entendu.
-Rédha khoya, elle t'a pardonné. Tu peux avoir le c?ur tranquille.
-Elle est partie le c?ur lourd de peine, de colère et de déception à cause de moi, dit Rédha. Elle ne m'a jamais pardonné d'être... d'avoir été... Elle qui était si fière de moi... Je crois que je suis mort pour elle depuis le jour où elle avait tout découvert. Je voulais qu'elle voie que j'ai changé.
-Khoya, tu viens de le dire.Tu as changé. C'est tout ce qu'elle voulait. Je suis sûre que si elle te voyait maintenant, elle serait fière et son pardon, elle n'avait pas besoin de te le dire. Elle t'aimait malgré tout. Elle voulait que tu prennes soin de toi et de ta famille. Fais-le ! Ils t'attendent pour partir.
Ils récitent une prière et ils ne tardent pas à quitter le cimetière. Hacène qui attend dans la voiture, les ramène à la maison. Sa belle-famille est venue leur souhaiter un bon voyage. Ils ont tous un mot réconfortant. Rédha ne peut pas retenir ses larmes au moment de quitter la maison où il avait été heureux avec sa mère et sa s?ur.
Plus rien ne sera comme avant. Fadhéla suit les conseils de sa belle-s?ur et ne le laisse pas s'enfermer dans son silence. Elle l'encourage à aller au bureau et organise des sorties.
-Tu as raison, lui dit-il. La vie continue, même ma mère, Allah yarhamha, serait d'accord avec toi.
Le bébé se met à gigoter sur le tapis d'éveil où elle l'avait installé. Malgré sa tristesse, Rédha a un sourire. Son regard va de son fils au grand portrait de sa mère qu'il a accroché sur le mur d'en face, tout près de la télé.
-Tu vas grandir sous son ?il protecteur. Même si elle n'est plus là, tu vas grandir avec elle, tu la connaîtras. Je lui parlerai si souvent d'elle, confie-t-il à sa femme, qu'il aura l'impression ou le sentiment de la connaître.
Ce qu'il ne dira pas à son fils, c'est ce qu'elle n'avait pas osé raconter aux autres. Le sujet tabou renforcé par une société pleine de préjugés dictés par les croyances religieuses. Les principaux concernés n'osent pas en parler et cachent leur orientation sexuelle. En plus d'être rejetés, ils craignent de se retrouver en prison.
Ces non-dits les poussent à aller vivre ailleurs, sous des cieux plus tolérants et plus cléments.
Cette nouvelle, difficile à écrire, inspirée de faits véridiques sur des sujets sensibles et tabous, a connu les modifications des prénoms, des professions et des villes.

Fin
T. M
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