Les non-dits

Résumé : Samra encourage sa mère à déposer sa demande de visa, en même temps que Fadhéla. Nedjma est bien triste quand elle part chez elle. Fadhéla tente de la réconforter, lui rappelant qu'elle est aussi sa fille. Elles regrettent toutes deux le silence de Rédha, qui ne prend pas leurs appels. Elles espèrent obtenir un visa touristique et lui faire la surprise...Quelques semaines plus tard, Nedjma et Fadhéla débarquent à Londres. Elles ont loué une chambre double dans un petit hôtel non loin du quartier où résident Rédha et Bryan. Fadhéla se débrouille avec le peu d'anglais qu'elle connaît. Le taxieur habitué aux touristes parle le français. Fadhéla, complètement dépaysée, murmure quelques mots en arabe à sa belle-mère, étonnée par la propreté.
- Sah, benti, dit le taxieur avec un sourire, leur parlant en arabe, pour les mettre à l'aise. Ce n'est pas comme au pays où chaque coin de rue regorge de poubelles. Si avant Alger était une des plus belles capitales, maintenant, win t'rouhi telka z'bel, hachakoum. Pourtant, les maisons à l'intérieur brillent de propreté. Même dans les bidonvilles on pose la dalle de sol et la faïence ; koulech m'neqqi à l'intérieur. Mais dehors, les eaux usées, les poubelles... Alors, l'hiver, n'en parlons pas.
- C'est vrai, reconnaît Nedjma. C'est désolant. Les mauvaises odeurs des poubelles nous parviennent, même quand on habite au dernier étage. Si chacun d'entre nous y mettait du sien, rien qu'en balayant devant sa porte, cela changerait du triste spectacle qu'ils donnent au quotidien.
- D'où venez-vous, ma s?ur '
- D'Alger. Et vous '
- Khiar ness, dit-il. Moi, je suis de la région de Boumerdès.
Nedjma a eu un coup au c?ur, lorsqu'il a parlé en arabe. Elle a été très émue de retrouver un compatriote.
- Ma s?ur, je suis à votre service. Visite familiale ou touristique '
- Un peu des deux, répond Nedjma. Nous avons fait une réservation d'hôtel.
- En bon frère, si vous n'avez pas encore payé, je vous conseillerai un petit cottage, tenu par un vieux couple. Moins cher et le service est de qualité. Vous n'aurez aucun problème pour vos déplacements. Je vous donnerai ma carte et vous pourrez m'appeler quand vous aurez besoin de sortir. Je le ferai avec plaisir. Nedjma saisit la carte qu'il lui a tendue. Elle accepte de résider dans ce petit cottage dont il a fait l'éloge. Si cela ne leur plaît pas, elles pourront toujours louer ailleurs. Le chauffeur de taxi prend une autre route. Durant le trajet jusqu'à un vieux quartier, ils font plus ample connaissance. Il parle de ses enfants qu'il envoie au pays chaque fois qu'il le peut, pour qu'ils nouent des liens forts avec leur famille. Il regrette de passer les fêtes religieuses loin des siens.
- L'Aïd au pays a une ambiance et une odeur particulières. Je donnerai tout pour les célébrer au pays, entouré des miens, des enfants de mon village natal.
- Les vieux ont toujours la nostalgie du pays, dit Nedjma. Mon fils n'est jamais venu durant les fêtes. Trois fois en huit ans, confie-t-elle. J'ai souffert de son absence mais je ne le lui ai jamais fait ressentir.
- Ah les jeunes !, soupire-t-il. Il viendra le jour où il regrettera de ne pas profiter de ses parents. Mais... puis-je vous poser une question ', dit-il, un peu hésitant.
- Oui '
- Votre fils n'est pas venu à l'aéroport. A-t-il eu un empêchement '
- On lui fait une visite-surprise.
Le chauffeur secoue la tête, le lui déconseillant.
- Ici, ils n'apprécient pas les visites-surprises. Ce n'est pas comme au pays où on peut se rendre chez la famille ou les amis sans les avoir prévenus. Là-bas, tout le monde est le bienvenu à n'importe quel moment. Ici, dit-il, il faut aviser avant.
- Mais j'y tiens, dit Nedjma.
Le chauffeur insiste, lui conseillant d'appeler avant, si elles ne veulent pas être mal accueillies...


(À SUIVRE)
T. M.
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