Algérie

Les mises au point de Ksentini



Le rapport annuel sur l'état des droits de l'Homme en Algérie qui réserve une partie importante à la défense des droits économiques et sociaux des citoyens, sera rendu public à la mi-janvier 2012. C'est ce qu'a affirmé, hier, Me Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH).

Ce dernier a été invité à la radio Chaîne 3, à l'occasion du 63ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'Homme. L'invité de la radio insiste aussi sur le dialogue et la concertation qui constituent «des armes efficaces» pour dénouer les tensions et parvenir à une «meilleure compréhension» des réalités nationales. Selon Me Ksentini, ce rapport se base sur les droits de la jeunesse, en matière de formation et surtout d'emploi. Evoquant les droits de l'Homme, Me Ksentini souligne que ces derniers «s'améliorent dans le bon sens», soulignant le fait que «l'Algérie est un Etat de droit en voie de développement». Cela dit, «beaucoup reste à faire» selon lui, et ce, dans plusieurs domaines tels que la justice, les droits sociaux, la presse, la santé…

« Les droits sociaux vont mal», insiste-t-il. Me Ksentini évoque la question du logement, considérée comme «une urgence». Sur la situation des droits de l'Homme, Me Ksentini affirme: «je ne dis pas que les droits de l'Homme vont bien, mais qu'ils vont mieux». «Le discours jugeant l'Algérie comme étant un Etat de non droit ne reflète pas la réalité. La réalité est que nous sommes au milieu du gué», dit-il. Et de s'en prendre à certaines ONG étrangères qui critiquent l'Algérie. «Leur rôle ne doit pas consister à se substituer aux agences de notation», ironise-t-il. Et de faire une autre mise au point par rapport à la presse : «je ne conteste pas les opinions de la presse qui est libre, mais je suis libre de ne pas partager le discours négationniste servi à souhaits, par quelques journaux, pour lesquels il n y a rien de positif qui est fait en Algérie. La vérité est ailleurs», critique-t-il. «C'est un reproche amical», précise-t-il, toutefois.

Il évoque aussi la réforme de la justice qu'il juge comme «une avancée dans l'amélioration de la situation des droits de l'Homme», même s'il soutient que cette réforme «a tout de même accusé beaucoup de retard dans sa concrétisation». Me Ksentini tient à démentir des déclarations que lui ont prêtées certains journaux. «Je démens les déclarations que m'ont prêtées certains médias. Je n'ai jamais parlé ni de corruption ni d'incompétence, ni de régionalisme dans la justice», dit-il. «J'ai tout simplement appelé à une lutte contre l'inflation des recours judiciaires. Si les affaires de justice sont bien traitées, en première instance, il y aurait moins de recours. Cela suppose des magistrats bien formés. Les textes sont très bons, mais leur application est parfois étriquée. J'ai plaidé pour une justice de qualité», explique-t-il. Interrogé sur les réformes consacrées dans les projets de lois qui sont actuellement en phase d'adoption, au parlement, Me Ksentini dit avoir «un Å“il critique.» «Une critique positive», précise-t-il. «Les réformes restent à parfaire», estime-t-il. Il trouve que les projets de loi sur l'information et sur les avocats ne sont pas suffisamment mûris. «En témoignent, dit-il, les réserves émises tant par la corporation des journalistes que celle des avocats». «Les avocats et les journalistes n'ont pas été suffisamment consultés et écoutés», déplore-t-il. Concernant la loi sur les avocats, Me Ksentini dit «ne pas contester entièrement le texte mais ne pas être d'accord avec certaines dispositions qui remettent en cause les droits de la défense».

Me Ksentini appelle, par ailleurs, le gouvernement à décriminaliser l'acte de «harga» et à remplacer la peine de prison, actuellement encourue, par une amende symbolique.

Dans son rapport annuel de 2010 sur les droits de l'Homme en Algérie, la commission dirigée par l'avocat Farouk Ksentini estime qu'il est «inconcevable» qu'un problème social reçoive «pour seule réponse, une action répressive, privative de liberté». La loi datant de 2006, considère «la harga» comme un délit. Pour la CNCPPDH, le phénomène des «harraga» constitue le reflet «d'une mauvaise prise en charge des problèmes de la jeunesse, notamment le chômage et le mal-vivre». Elle déplore le fait que les actions entreprises par les pouvoirs publics en faveur des jeunes soient souvent prises entre les «tenailles de la bureaucratie et les différentes formes de corruption», selon le rapport.

Le président de la CNCPPDH plaide pour un «véritable programme national spécial jeunesse dont l'urgence, l'importance et la réalisation sont capitales pour la stabilité et l'avenir de l'Algérie».




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