Algérie

Les mille et une nuits



Billet du prince Camaralzaman à la princesse de Chine CLXXXXIIe nuit (Suite) Behram, accompagné de ses matelots, arriva à la ville des Mages la même nuit qu’Assad s’était arrêté dans le cimetière et retiré dans le tombeau. Comme la porte était fermée, il fut contraint de chercher aussi dans le cimetière quelque tombeau, pour y attendre qu’il fût jour et qu’on l’ouvrît. Par malheur pour Assad, Behram passa devant celui où il était. Il y entra, et il vit un homme qui dormait, la tête enveloppée dans son habit; Assad s’éveilla au bruit, et, en levant la tête, il demanda qui c’était. Behram le reconnut d’abord. «Ah! ah! dit-il, vous êtes donc celui qui est cause que je suis ruiné pour le reste de ma vie! Vous n’avez pas été sacrifié cette année, mais vous n’échapperez pas de même l’année prochaine. «En disant ces paroles, il se jeta sur lui, lui mit son mouchoir sur la bouche, pour l’empêcher de crier, et le fit lier par ses matelots. Le lendemain matin, dès que la porte fut ouverte, il fut aisé à Behram de ramener Assad chez le vieillard qui l’avait abusé avec tant de méchanceté, par des rues détournées où personne n’était encore levé. Dès qu’il y fut entré, il le fit descendre dans le même cachot d’où il avait été tiré et informa le vieillard du triste sujet de son retour et du malheureux succès de son voyage. Le méchant vieillard n’oublia pas d’enjoindre à ses deux filles de maltraiter le prince infortuné plus qu’auparavant, s’il était possible. Assad fut extrêmement surpris de se revoir dans le même lieu où il avait déjà tant souffert, et, dans l’attente des mêmes tourments dont il avait cru être délivré pour toujours, il pleurait la rigueur de son destin lorsqu’il vit entrer Bostane avec un bâton, un pain et une cruche d’eau. Il frémit à la vue de cette impitoyable et à la seule pensée des supplices journaliers qu’il avait encore à souffrir toute une année, pour mourir ensuite d’une manière pleine d’horreur. Bostane traita le malheureux prince Assad aussi cruellement qu’elle l’avait déjà fait dans sa première détention. Les lamentations, les plaintes, les instantes prières d’Assad, qui la suppliait de l’épargner, jointes à ses larmes, furent si vives, que Bostane ne put s’empêcher d’en être attendrie et de verser des larmes avec lui. «Seigneur, lui dit-elle en lui recouvrant les épaules, je vous demande mille pardons de la cruauté avec laquelle je vous ai traité ci-devant et dont je viens de vous faire sentir encore les effets. Jusqu’à présent, je n’ai pu désobéir à un père injustement animé contre vous et acharné à votre perte; mais enfin je déteste et j’abhorre cette barbarie. Consolez-vous: vos maux sont finis, et je vais tâcher de réparer tous mes crimes, dont je connais l’énormité, par de meilleurs traitements. Vous m’avez regardée jusqu’aujourd’hui comme une infidèle; regardez-moi présentement comme une musulmane. J’ai déjà quelques instructions qu’une esclave de votre religion, qui me sert, m’a données. J’espère que vous voudrez bien achever ce qu’elle a commencé. Pour vous marquer ma bonne intention, je demande pardon au vrai Dieu de toutes mes offenses par les mauvais traitements que je vous ai faits, et j’ai confiance qu’il me fera trouver le moyen de vous mettre dans une entière liberté».   A suivre…


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