Algérie

Les mille et une nuits


Réponse du prince de Perse à Schemselnihar CLXVe nuit (Suite) «Ah! quelle obligation, s’écria-t-elle, n’avons-nous pas, le prince de Perse et moi, à l’honnête homme dont vous me parlez! je veux le connaître, le voir, pour entendre de sa propre bouche tout ce que vous venez de me dire, et le remercier d’une générosité inouïe envers des personnes à qui rien ne l’oblige à s’intéresser avec tant d’affection. Sa vue me fera plaisir, et je n’oublierai rien pour le confirmer dans de si bons sentiments. Ne manquez pas de l’aller prendre demain et de me l’amener. «C’est pourquoi, seigneur, prenez la peine de venir avec moi jusqu’à son palais.» Ce discours de la confidente embarrassa le joaillier. «Votre maîtresse, reprit-il, me permettra de dire qu’elle n’a pas bien pensé à ce qu’elle exige de moi. L’accès qu’Ebn Thaher avait auprès du calife lui donnait entrée partout, et les officiers, qui le connaissaient, le laissaient aller et venir librement au palais de Schemselnihar; mais moi, comment oserais-je y entrer? Vous voyez bien vous-même que cela n’est pas possible. Je vous supplie de représenter à Schemselnihar les raisons qui doivent m’empêcher de lui donner cette satisfaction, et toutes les suites fâcheuses qui pourraient en arriver. Pour peu qu’elle y fasse attention elle trouvera que c’est m’exposer inutilement à un très grand danger.» La confidente tâcha de rassurer le joaillier. «Croyez-vous, lui dit-elle, que Schemselnihar soit assez dépourvue de raison pour vous exposer au moindre péril, en vous faisant venir chez elle, vous de qui elle attend des services si considérables ? Songez vous-même qu’il n’y a pas la moindre apparence de danger pour vous. Nous sommes trop intéressées en cette affaire, ma maîtresse et moi, pour vous y engager mal à propos. Vous pouvez vous en fier à moi et vous laisser conduire. Après que la chose sera faite, vous m’avouerez vous-même que votre crainte était mal fondée.» Le joaillier se rendit aux discours de la confidente et se leva pour la suivre; mais, de quelque fermeté qu’il se piquât naturellement, la frayeur s’était tellement emparée de lui, que tout le corps lui tremblait. «Dans l’état où vous voilà, lui dit-elle, je vois bien qu’il vaut mieux que vous demeuriez chez vous et que Schemselnihar prenne d’autres mesures pour vous voir; et il ne faut pas douter que, pour satisfaire l’envie qu’elle en a, elle ne vienne ici vous trouver elle-même. Cela étant ainsi, seigneur, ne sortez pas; je suis assurée que vous ne serez pas longtemps sans la voir arriver.» La confidente l’avait bien prévu: elle n’eut pas plus tôt appris à Schemselnihar la frayeur du joaillier, que Schemselnihar se mit en état d’aller chez lui. Il la reçut avec toutes les marques d’un profond respect. Quand elle se fut assise, comme elle était un peu fatiguée du chemin qu’elle avait fait, elle se dévoila et laissa voir au joaillier une beauté qui lui fit connaître que le prince de Perse était excusable d’avoir donné son cœur à la favorite du calife. Ensuite elle salua le joaillier d’un air gracieux et lui dit: «Je n’ai pu apprendre avec quelle ardeur vous êtes entré dans les intérêts du prince de Perse et dans les miens, sans former aussitôt le dessein de vous en remercier moi-même. Je rends grâce au ciel de nous avoir sitôt dédommagés de la perte d’Ebn Thaher.» A suivre...
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)