Le général Mohamed Ould Abdel Aziz, chef de la junte qui a renversé mercredi dernier le président mauritanien, s'est posé, jeudi, en défenseur de la démocratie à l'issue d'une marche organisée pour le soutenir, alors que la police dispersait une manifestation dénonçant le coup d'Etat.
Au plan international, la pression s'accentuait sur la junte pour qu'elle remette en liberté le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi et son Premier ministre Yahya Ould Ahmed Waghf, alors que les Etats-Unis annonçaient, jeudi, avoir suspendu leur aide bilatérale non humanitaire à la Mauritanie, après avoir condamné le coup d'Etat mercredi. Dans la nuit, le conseil de 11 militaires dirigé par le général Ould Abdel Aziz avait annoncé avoir « mis fin au pouvoir du président » élu en mars 2007. Il avait promis une élection présidentielle « libre et transparente » dans « une période qui sera la plus courte possible ». Une marche organisée en soutien aux putschistes a réuni, jeudi à Nouakchott, quelque centaines de véhicules et un millier de personnes qui ont défilé aux cris de « Aziz ! Aziz ! ».Le nouvel homme fort de Nouakchott, a choisi de faire sa première apparition publique à la fin de ce rassemblement, où ses portraits géants étaient exhibés. « Je m'engage à résoudre tous les problèmes qui se posent au pays, à faire régner la justice et l'égalité », a alors déclaré le militaire de 52 ans, coiffé d'un béret vert. Puis il a affirmé : « Les forces armées demeureront au côté du peuple pour l'ancrage de la démocratie, ce sont elles qui l'ont apportée, elles s'engagent à y veiller ». Mais, quasiment au même moment, la police a dispersé « à coups de grenades lacrymogènes » un rassemblement en faveur du chef de l'Etat renversé, selon le secrétaire général du parti présidentiel, Mohamed Mahmoud Ould Dahmane. Cette manifestation contre le putsch était organisée par quatre partis politiques constitués en Front national pour la défense de la démocratie. Dans son premier communiqué, ce Front a affirmé que Sidi Ould Cheikh Abdallahi restait le « seul et unique président légitime » et a invité les militaires « à regagner leurs casernes ».L'Union africaine a « exigé » la libération du président et « des autres personnalités arrêtées », ainsi que le « rétablissement sans délai des institutions que le peuple mauritanien s'est démocratiquement choisi ». A Bruxelles, la Commission européenne a demandé la libération du président et du Premier ministre, comme préalable à l'organisation de nouvelles élections. L'Egypte s'est dite « consternée » par le coup d'Etat, et la Ligue arabe faisait part de son « extrême » inquiétude. Une délégation de la Ligue arabe devait se rendre hier, en Mauritanie pour tenter une « approche diplomatique directe avec les différentes parties ». La France, ex-puissance coloniale, a « réaffirmé sa totale condamnation du coup d'Etat inacceptable » et menacé la junte de « conséquences sur les relations » de ce pays avec l'Union européenne s'il n'y avait pas de « retour à la légalité constitutionnelle ». Washington a annoncé, jeudi, avoir suspendu son aide non-humanitaire à la Mauritanie.Le général Abdel Aziz, un proche du président devenu putschisteLe général Mohamed Ould Abdel Aziz, à la tête des putschistes qui ont renversé mercredi dernier, le président mauritanien Sidi Ould Cheikh Abdallahi, était un proche du chef de l'Etat, il était à la tête de la garde présidentielle, avant de se retourner contre lui. Né en 1956 à Akjoujt (au nord-est de Nouakchott), il est issu de la tribu maraboutique des Oulad Bousba, fortement présente en Mauritanie et au Maroc voisin. Il rejoint l'armée mauritanienne en 1977, à sa sortie de l'Académie royale militaire de Meknès au Maroc et` est à l'origine de la mise en place du bataillon formant la garde présidentielle qu'il dirige depuis le régime Ould Taya (1984-2005). Il a transformé ce corps de l'armée en un élément particulièrement influent sur la vie politique mauritanienne, la garde présidentielle étant déjà à l'origine du coup d'Etat militaire ayant renversé le président Maâouiya Ould Taya en août 2005.Il a, d'ailleurs, fait partie de la junte qui a dirigé le pays de 2005 à 2007, avant de donner le pouvoir aux civils à la suite d'élections démocratiques saluées par la communauté internationale. Très discret mais connu pour sa franchise et sa détermination, il s'était distingué par son soutien actif, maintes fois dénoncé par l'opposant Ahmed Ould Daddah, à la candidature de Sidi Ould Cheikh Abdallahi lors de l'élection présidentielle de 2007. En janvier 2008, le colonel Abdel Aziz avait été nommé au grade de général et chef d'état-major particulier du chef de l'Etat. Mais certains observateurs lui prêtaient la volonté de continuer à avoir son mot à dire en politique aux côtés du président Ould Cheikh Abdallahi. Il était particulièrement actif dans la lutte contre le terrorisme, se démarquant de la ligne du chef de l'Etat estimant que le terrorisme n'existait pas en Mauritanie. Certains observateurs ont estimé que ce général de 52 ans, se trouvait derrière le mouvement de « fronde » d'une cinquantaine de parlementaires qui avaient démissionné lundi dernier, du parti au pouvoir en critiquant notamment le « pouvoir personnel » du président. Voulant se soustraire à son influence, le président l'a remplacé par décret mercredi matin. Quelques heures plus tard, le général Abdel Aziz a pris la tête des putschistes pour le renverser et a fait publier un communiqué annulant toutes les récentes nominations présidentielles au sein de l'armée.
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Posté Le : 09/08/2008
Posté par : sofiane
Ecrit par : Agences
Source : www.elwatan.com