Algérie

Les mémoires d'un autre témoin du siècle


L'auteur parle de certaines «affaires» qui continuent à faire couler beaucoup d'encre jusqu'à nos jours. Ainsi, dans les 3e et 4e parties de l'ouvrage, il est question de «la mort de Abane Ramdane» et du procès de Chihani Bachir. Au Chapitre XVI intitulé «Des excès injustifiés», le sujet est la fameuse «Bleuite». Le chapitre suivant dont le titre est «Des pertes irréparables», l'auteur parle de «la mort des colonels Amirouche et Si El Haouès» et des «vérités sur la mort du colonel Lotfi et de ses compagnons».«La mort injuste de Abane Ramdane a ébranlé dangereusement l'édifice encore fragile à la tête de la Révolution. Sa forte personnalité et le poids de ses idées novatrices et courageuses ont certainement manqué dans l'appréhension et le règlement des dysfonctionnements et des crises qui ont secoué le FLN par la suite», estime Dahou Ould Kablia, dans son livre Boussouf et le Malg. La face cachée de la Révolution, paru chez Casbah éditions.
«L'Histoire ancienne et récente a montré que dans les grands mouvements révolutionnaires, surtout au sein des directions collégiales, les dissensions générées par des divergences de doctrine ou de stratégie, des conflits de clans ou de personnes attirés par le pouvoir, se règlent inéluctablement par la violence (...) La Révolution algérienne n'y a pas échappé. Dans son parcours, elle a coûté la vie à de très grands responsables, mais elle a toujours avancé car elle est demeurée plus grande que les hommes», écrit encore l'auteur.
Les ouvrages historiques, particulièrement sur la période de la guerre de Libération nationale, sont les plus demandés par le lectorat algérien, ces dernières années. Boussouf et le Malg. La face cachée de la Révolution de Dahou Ould Kablia est un véritable pavé dans la mare littéraire algérienne autant par son contenu que par son volume (446 pages). Son auteur est un témoin et acteur de la Révolution, lui qui avait assumé des hautes responsabilités dans les services de renseignement du ministère de l'Armement et des Liaisons générales.
«à travers la rédaction de cet ouvrage, je vise à accompagner tous ceux qui ont eu la volonté et le courage de lever le voile sur l'histoire de notre grande Révolution, mise sous l'éteignoir au lendemain de l'indépendance et maintenue dans cet état des décennies durant. Ayant appartenu au Malg, il est évident que c'est celui-ci qui occupera une grande partie de mon témoignage, mais l'histoire du Malg n'est pas isolée de celle de la révolution», écrit Dahou Ould Kablia, dans l'introduction de son ouvrage.
En plus des biographies de l'auteur et du colonel Abdelhafid Boussouf et d'un grand nombre de photographies et de documents, l'ouvrage est composé de cinq parties : «Aux origines du Malg, «Le soutien multiforme du Malg», «épisodes particuliers de la guerre d'Algérie, «Les problèmes internes du FLN» et enfin «L'héritage de la Révolution» qui aborde la période de l'indépendance à travers des titres de thèmes comme «Crise de 1962 : la déchirure», «La Révolution confisquée » ou «Le socialisme spécifique».
D'où viennent les éléments du Malg ' «Pour les moyens humains, l'apport venait en grande partie des masses de lycéens et d'étudiants issus de la grève de mai 1956 et par la suite des meilleurs produits de la formation militaire aux frontières. Leur typologie se caractérisait par la diversité de leurs origines, pratiquement de toutes les régions d'Algérie, par leur niveau intellectuel sensiblement équivalent, par leur jeune âge variant entre dix-huit et vingt-cinq ans et par leur volonté partagée d'aller au bout de leur engagement», écrit Ould Kablia.
Concernant les femmes dans les services du Malg : «le personnel féminin, en titre, était très réduit en raison de l'exigence d'une vie communautaire dans les bases clandestines. Pour les missions ponctuelles, par contre, le colonel Boussouf y fait appel très tôt, dès la fin 1956. Il engagea et forma personnellement une dizaine de jeunes filles pour une mission de contrôle au niveau des maquis de l'intérieur, à côté d'un nombre égal d'hommes. Une mission longue et difficile au cours de laquelle deux d'entre elles tomberont au champ d'honneur : Hadj Smaïn Aouicha et Chellali Khadidja.»
Dans son volumineux livre, Dahou Ould Kablia parle, donc, notamment, de la création du réseau de renseignement, de transmissions et d'approvisionnement en armes, dans des conditions draconiennes de la plus stricte clandestinité ainsi que de ses missions (politique et militaire) et ses réalisations. En toile de fond, le lecteur voit les développements de la Révolution et de la lutte multiforme des Algériens pour la liberté. L'auteur parle également de faits et même de certaines «affaires » qui continuent à faire couler beaucoup d'encre jusqu'à nos jours. Ainsi, dans les 3e et 4e parties de l'ouvrage, il est question de «La mort de Abane Ramdane» (page 299) et du procès de Chihani Bachir. Dans la 4e partie et au chapitre XVI intitulé «Des excès injustifiés», le sujet est la fameuse «Bleuite». Dans le chapitre suivant, dont le titre est «Des pertes irréparables», l'auteur parle de «la mort des colonels Amirouche et Si El Haouès» et des «vérités sur la mort du colonel Lotfi et de ses compagnons».
«Les combats durent toute la journée et c'est le commandant Amor Driss, blessé, qui indique la présence, parmi les combattants, des colonels Amirouche et Si El Haouès avant de rendre son dernier souffle. La mort de ces deux grands héros insaisissables fait grand bruit et tous ceux qui portent étoile, dont le général Massu, convergent vers Bou Saâda pour saluer la victoire (...) cet exemple de courage, d'abnégation et de sacrifice n'a malheureusement pas eu le respect et la reconnaissance attendus après l'indépendance. Les corps de ces deux grands martyrs enterrés secrètement par leurs bourreaux ont pu être retrouvés grâce au témoignage d'un officier français présent lors de leur enfouissement. Ils ont été récupérés en 1963 par des éléments de la Gendarmerie nationale et transférés au siège central de leur unité. Ils y feront l'objet d'une séquestration odieuse et amorale durant plus de vingt années. C'est le Président Chadli, informé, qui réparera cette forfaiture en leur donnant une sépulture digne de leur rang et de leur sacrifice dans le carré officiel des martyrs au cimetière El Alia, à côté de leurs illustres pairs», lit-on en page 324.
«Outre l'hommage appuyé au fondateur du Malg et aux nombreux martyrs de ce réseau héroïque, ce livre est un itinéraire de vie qui offre de nombreuses pages chargées d'émotion», est-il expliqué en quatrième de couverture de ce très intéressant ouvrage dont les dernières pages évoquent la fin mouvementée du quatrième mandat de Abdelaziz Bouteflika.
Né le 4 mai 1933 à Tanger au Maroc, de parents originaires de Mascara, Dahou Ould Kablia est bachelier en 1954. Gréviste de l'université de Toulouse où il faisait des études de droit, il retourne en 1956 à Mascara et adhère à l'organisation urbaine du FLN avant de rejoindre en 1958 les rangs de l'ALN en Wilaya V.
En septembre à la formation du GPRA (Gouvernement provisoire de le République algérienne), les meilleurs éléments de l'école des cadres sont choisis par le colonel Boussouf pour renforcer les effectifs de son ministère, le Malg (Ministère de l'Armement et des Liaisons générales). C'est le début d'une longue carrière dans les services de renseignement. À l'indépendance, Dahou Ould Kablia, nommé wali de Mostaganem en octobre 1963, occupera plusieurs postes dans la haute administration dont celui de ministre de l'Intérieur de 2010 à 2013.
Kader B.
Boussouf et le Malg. La face cachée de la Révolution de Dahou Ould Kablia. Casbah éditions. 446 pages.
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