Depuis quelques années, le marché informel défigure la plupart des villes algériennes. Un véritable chancre qui n'a cessé de s'étendre et de s'amplifier. Grandes ou petites, nos villes ont perdu les règles élémentaires de civilité indispensables à la vie en commun. Vivre dans certains quartiers est devenu infernal et se promener a perdu son sens dans des ruelles livrées à l'anarchie et à la saleté. Le commerce informel ne se confine pas dans les « dellalates » de périphérie, réplique des marchés aux puces qui possèdent leur charme et leur utilité. Il a poussé ses tentacules vers les centres villes. De nombreux habitants n'ont cessé d'interpeller les pouvoirs publics pour contenir ce phénomène qui charriait toutes sortes d'atteintes à leur tranquillité et à celle de leurs familles. Il serait injuste d'incriminer seulement ces milliers de jeunes issus souvent de quartiers défavorisés qui s'adonnent, faute de mieux, à des activités commerciales illicites. La détérioration du cadre de vie a d'autres raisons dont la moindre n'est pas la déficience des services publics ou l'incivisme devenu un trait de culture chez de nombreux concitoyens . Pourtant, à y bien voir, les effets néfastes de l'informel dépassent ses bienfaits apparents. Les prix accessibles qui font plaisir à la ménagère ne peuvent faire écran à ses ravages. Le chômage existe sous tous les cieux et ne se combat nullement par le recul, encore moins l'indifférence de la puissance publique devant des phénomènes qui piétinent allégrement les lois. Au niveau économique, c'est le Trésor public qui perd des revenus importants qui échappent au fisc. Les pertes financières de l'Etat du fait de la formidable prolifération sont estimées, en 2011, à plus de 10 milliards d'euros par an. La fraude fiscale n'est certes pas du fait des petits revendeurs qui, souvent, ne sont qu'une main-d''uvre taillable et corvéable. Erigée en sport national, voire en philosophie de vie, elle discrédite l'Etat et pourrait même menacer ses fondements. Poussé à l'extrême, c'est le cas de la Grèce mise à genoux par les tricheurs qui rechignent à payer leurs impôts. Les commerçants qui s'acquittent de leur devoir fiscal n'ont d'ailleurs jamais cessé de tirer la sonnette d'alarme. Pire, les marchés informels sont devenus des espaces propices à tous les trafics, recyclant l'argent sale et permettant l'écoulement de marchandises inavouables . Les dégâts les plus graves relèvent pourtant d'un autre ordre. En fermant l''il sur la prolifération du commerce parallèle, c'est en fin de compte la dépréciation des diplômes, du travail manuel... S'adonner au trabendo n'était plus perçu comme une activité provisoire ou dévalorisante. A défaut d'exercer des tâches dont a besoin la collectivité et dont le manque cruel se fait ressentir en ces périodes de fêtes où les boulangers et les serveurs rejoignent leurs villages d'origine, le citadin a perdu le sens de l'effort. Certes, en procédant à l'éradication de ces marchés, les pouvoirs publics n'ont pas tout réglé. Il reste encore à recycler les jeunes qui y tirent des revenus dans des activités et espaces soumis à la loi. C'est une autre bataille qui commence.
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Posté Le : 29/08/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : H Rachid
Source : www.horizons-dz.com