Algérie

Les mauvaises allocations des ressources ciblées



Les failles du modèle économique algérien, basé notamment sur la prédominance du rôle de l'Etat en tant que régulateur et investisseur, et les réformes à entreprendre pour relancer la machine économique, sur des bases solides et en toute transparence, ont été au centre d'un débat animé hier, dans le cadre des matinales du Cercle d'action et réflexion autour de l'entreprise (CARE).Le diagnostic a été posé à travers une conférence animée par Zoubir Benhamouche, membre de la Commission économique des Nations unies pour l'Afrique du Nord, intitulée «La qualité des institutions, vecteur de diversification de l'économie algérienne». Basées sur les résultats d'une étude consacrée aux pays nord-africains, les données exposées par l'expert ont mis en lumière les lourdes insuffisances de la stratégie économique nationale, malgré le fort potentiel de croissance que recèle notre pays.
L'expert fait notamment observer que pour créer de la croissance, il ne s'agit pas uniquement de booster les investissements, mais surtout de s'assurer de la bonne répartition des allocations de ressources.
Il en déduit que les réformes nécessaires en Algérie ? qui peuvent être favorisées par le contexte de crise actuelle ? devraient conduire à mettre notamment en place «un environnement plus favorable à une meilleure répartition des allocations, à plus de transparence, plus d'inclusion, moins de pouvoir discrétionnaire, moins de bureaucratie et moins de barrières pour la création d'entreprises». Il juge à ce propos que l'existence d'une instance en charge d'examiner les demandes d'investissement est un non-sens.
Lors du déroulé de sa conférence, Zoubir Benhamouche a estimé que la mauvaise allocation des ressources est une des causes de la faiblesse de la croissance de la productivité.
Il s'agit notamment, selon lui, des distorsions du marché du travail. «En Algérie, même si sa part est en baisse, l'emploi public demeure important. En outre, les primes salariales du secteur public faussent le marché du travail, tandis que les rigidités en matière d'embauche et de licenciement ont pour effet de compromettre la création d'emplois et de soutenir l'emploi informel.» Pourtant, soutient-il, les contraintes imposées par le marché du travail, ou par sa réglementation, sont moins souvent pointées du doigt par les entreprises que les contraintes auxquelles elles sont confrontées pour accéder au crédit ou au financement.
Mais il semblerait, selon lui, qu'il s'agisse d'un problème général. «Cette observation concorde d'ailleurs parfaitement avec les scores très faibles des pays d'Afrique du Nord sur la dimension ??accès au crédit'' de l'indice Doing Business de la Banque mondiale.
De même, des marchés boursiers ou d'actions peu développés impliquent que les marchés de capitaux continuent à jouer un rôle limité dans la distribution du capital entre les secteurs économiques. Or, il existe un lien très fort entre la contrainte que représentent le financement et la faiblesse de productivité au niveau des entreprises», a indiqué encore M. Benhamouche.
De simples simulations suggèrent, selon l'expert, que «l'assouplissement des contraintes de capitaux pourrait accroître la production de 9 à 22 points de pourcentage par une augmentation importante de la productivité du travail et de l'afflux de capitaux en Afrique du Nord. Toutefois, la mise en place d'un environnement stable et fondé sur des règles pour les entreprises est une condition préalable à une allocation optimale des capitaux».
Il souligne que la capacité des marchés à assurer l'accès aux capitaux dépend essentiellement de la capacité de l'Etat à assurer la protection des droits de propriété, d'un système judiciaire efficace et de lois adéquates en matière de faillite des entreprises par exemple. Un tel environnement devrait également être en mesure d'attirer les entreprises étrangères, ce qui stimulerait la concurrence et améliorerait encore davantage l'allocation des ressources, conduisant à une croissance accrue de la productivité.
Selon l'étude dirigée par Zoubir Benhamouche, les entreprises signalent que la corruption et le manque de compétence de l'administration sont des contraintes considérables en Afrique du Nord. D'autres sources de distorsions importantes proviennent, selon le même document, du manque de transparence des politiques publiques.
L'étude met en relief en outre «les distorsions générées par les entreprises politiquement connectées, qui peuvent capturer les politiques publiques en leur faveur». Pour accroître l'impact du changement structurel sur la productivité, des réformes importantes sont à réaliser, note encore l'expert, en vue de réduire les distorsions sur le marché du crédit, sur le marché du travail, et pour améliorer la transparence des institutions et leur redevabilité, et accroître la «capacité de l'Etat».


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)