Algérie

Les marques s'inquiètent Des millions de produits contrefaits à l'air libre



Désormais, la contrefaçon ne sera plus considérée comme une simple infraction mais plutôt un délit dans le code des douanes. L'article 22 sera revu pour la délictualisation de l'infraction de la contrefaçon. L'évolution de la contrefaçon sur le marché algérien risque de repousser davantage les investisseurs notamment étrangers. Plusieurs représentants de marques étrangères comme Michelin, OSRAM, Henkel, ont saisi l'occasion hier, lors d'une conférence-débat sur «l'ouverture du marché et protection de la propriété industrielle» à la Chambre algérienne de commerce et de l'industrie (CACI), pour dénoncer la contrefaçon dont ils sont victimes. Le directeur général d'OSRAM a exprimé son désarroi et son inquiétude. Il a affirmé que 80 % des produits OSRAM qui sont sur le marché sont contrefaits. «Nous produisons des lampes d'une durée de vie de 15 ans, mais une grande quantité de lampes contrefaites a envahi le marché. Ces lampes qui sont en train de concurrencer la marque d'origine ont une durée de vie de deux jours et dans la plupart des cas, elles explosent après deux ou trois jours d'utilisation», a-t-il précisé. Et d'ajouter que les services des douanes ont été alertés et que deux conteneurs de lampes contrefaites ont été saisis, mais, a-t-il insisté, des millions de lampes contrefaites circulent encore sur le marché. La représentante juridique de Michelin a elle aussi fait part de l'inquiétude de son entreprise. Elle déclare que 65% des pneus Michelin sur le marché sont contrefaits. Et les services des douanes n'ont saisi aucun conteneur de pneus Michelin contrefaits. Et l'intervenante de s'interroger: par où transite cette marchandise contrefaite ? Le représentant de Henkel s'est dit plutôt déçu après une décision de justice sur une affaire de contrefaçon dont son entreprise est victime. Il a affirmé qu'après avoir prouvé auprès de la juridiction compétente qu'un des produits Henkel a été contrefait, la juge avait condamné le contrefacteur (local), à une peine de 5 mois de prison avec sursis et une amende de 50.000 DA «seulement». Le directeur général de la Chambre algéro-allemande de commerce et d'industrie (AHK), Andereas Hergenrother, organisant conjointement cette conférence-débat avec la CACI et le FCE, a exprimé la préoccupation des entreprises allemandes. «De plus en plus de sociétés allemandes nous font signe de leur préoccupation concernant la protection de la propriété industrielle en Algérie», a-t-il affirmé. L'intervenant a précisé que le cadre législatif algérien traitant la protection de la propriété industrielle et intellectuelle correspond aujourd'hui, en grande partie aux exigences de l'OMC, mais sa mise en oeuvre n'est pas évidente sur le terrain. Le directeur général d'AHK a expliqué cette faiblesse par le manque de personnel qualifié et par l'absence d'équipements nécessaires capables de détecter des produits contrefaits. Intervenant à son tour, l'inspecteur divisionnaire des douanes algériennes, Mokrane Hanoun, a annoncé de nouvelles mesures contre la contrefaçon. Il a annoncé que l'administration des douanes a procédé récemment à la refonte de l'article 22 du code de la douane. Ainsi la contrefaçon «ne sera plus une simple infraction». Le représentant des douanes a précisé que cet article qui a été modifié sera introduit officiellement dans la loi de finance 2008. Et d'ajouter que d'autres mesures sont en projet, telle la poursuite des auteurs de la contrefaçon par la douane, même si le premier concerné ne juge pas utile de le faire, notamment pour des produits qui mettent en danger la santé et la vie des citoyens. Aucune classe de produits n'a été épargnée par la contrefaçon en Algérie, notamment avec l'importation anarchique. Les produits contrefaits sont importés et ils ne sont pas contrefaits localement. L'Algérie compte seulement 10 % de marques locales et 90 % des marques sont étrangères, précisera un intervenant. Notre pays n'est ni un grand producteur de marques ni même un imitateur de marques. Il est tout simplement un grand consommateur de marques d'origine et de marques contrefaites. Enfin, pour conclure, le président du Forum chefs d'entreprises (FCE), Réda Hamiani, a estimé que la contrefaçon est un phénomène qui a évolué dans un contexte de mondialisation globale. Hamiani a expliqué que si les Algériens consomment des produits contrefaits au lieu des produits d'origine, c'est parce que les produits contrefaits sont moins chers. Sachant que les conditions socio-économiques des Algériens ne permettent pas l'achat des produits de marque d'origine. La contrefaçon par les chiffres L'inspecteur divisionnaire des services des douanes, Mokrane Hanoun, a indiqué que pas moins de 40 demandes d'intervention dénonçant des contrefaçons ont été déposées par des entreprises. Et d'ajouter que plus d'un million d'articles contrefaits ont été retenus sous douane en 2007. Le douanier a précisé que les produits contrefaits proviennent de la Chine en premier, des pays du Golfe, de Taïwan, de la Turquie et en dernier lieu de l'Inde.Le DG de la Chambre de commerce algéro-allemande a rappelé que selon les statistiques de la Direction de la lutte contre la fraude (DLCF), une évolution alarmante de produits contrefaits a été enregistrée au cours de ces dernières années. Il a indiqué que les produits contrefaits sont passés de 298.102 en 2005 à 831.786 en 2006, sans parler des produits qui ont inondé le marché. Le directeur général de l'AHK a également rappelé que les pertes pour l'économie algérienne sont estimées, selon une publication de la Mission économique française, à 200 millions d'euros.


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