Les marées des migrants et l'empoignade des jeux politiques

Onze mille migrants de différentes nationalités ont débarqué cette semaine en Italie. Pour la seule journée de mardi, 5.000 ont mis pied à terre dans l'île italienne de Lampedusa. Il est permis de se demander comment une flottille aussi spectaculaire ait pu prendre la mer, en un même temps, transportant hommes, femmes et enfants engagés dans une aventure bravant un sort et une destinée incertains.Ayant la manie de se répéter, l'histoire ne déroge pas à sa règle car un tel débarquement aux larges péripéties migratoires, de millions d'Italiens, de Chinois, d'Irlandais et d'autres encore, en marées et flots regroupés ont traversé les mers et les océans au cours des derniers siècles passés à la recherche d'une autre vie. Cette redite historique embarrasse aujourd'hui les pouvoirs européens et l'embarras est amplifié par l'éternelle empoignade des jeux politiques qui leur sont communs.
Alors que plus de 2.000 personnes ont été englouties dans les profondeurs de la mer cette année, l'Europe, elle, donne l'impression de se noyer dans un verre d'eau. Chaque Etat européen tire la couverture sur lui au détriment d'une union pour laquelle chacun prétend cravacher. Au moment où la liberté de circulation est érigée en sacerdoce, chacun est décidé à murer ses frontières. Le paradoxe est à son comble face à un phénomène historique renouvelé confirmant que la sédentarisation humaine est un leurre. On rabâchera encore la nécessité de l'aide au développement pour contenir l'actuel fabuleux exode sans reconnaître que la floraison des murs et des barricades à chaque frontière est un sérieux appel d'air. Devenue de plus en plus et sans ironie mais avec une véhémente contre-vérité un fruit défendu, l'Europe ne peut qu'attirer ceux que la nécessité et les guerres ont dégradés.
L'idée de la vague aide au développement souvent rabâchée est déjà contrariée par le flou politique, social et économique des pays pauvres supposés en bénéficier.