Qui est derrière la flambée de certains produits de construction et la pénurie très souvent dénoncée par les opérateurs exerçant dans le secteur? Depuis des années, les entrepreneurs, en particulier les privés, dénoncent régulièrement tantôt la hausse des prix du ciment, tantôt la cherté du rond à béton qui a connu des augmentations sur le marché mondial. De leur côté, les autorités publiques, à leur tête le ministère de l'Habitat, n'ont eu également de cesse d'expliquer et d'assurer qu'il n'y a jamais eu d'augmentation des prix du ciment dans les cimenteries relevant du secteur public. Et pour ce qui est des produits importés, comme le rond à béton par exemple, l'Algérie doit se plier, à l'instar de tous les autres pays, aux fluctuations des prix dictés par le marché, nous dit-on du côté des officiels qui assurent, toutefois, que « l'Etat prendra sur son compte le surplus » pour permettre, dans un but évident à toutes les entreprises privées ou publiques, d'être au rendez-vous de 2009. En fait, la question de la spéculation et de la hausse des prix des matériaux de construction a été tellement « rabâchée », ces derniers temps, que le ministre de l'Habitat, Nordine Moussa, a évité de répondre quand la question a été posée par une journaliste lors d'une conférence de presse organisée après l'inauguration du salon BATIMATEC en début de semaine. C'est justement au niveau de ce salon, qui prendra fin jeudi, que nous avons rencontré plusieurs exposants et entrepreneurs dans le BTPH. Ce qui est frappant, c'est que la version des opérateurs, relevant du secteur privé, est aux antipodes de celle du secteur public, alors que les deux exercent souvent sur les mêmes chantiers. Exemple, l'Union nationale des entreprises du bâtiment (UNEB), qui est présente au salon de BATIMATEC, est catégorique sur le sujet. Selon ses membres que nous avons rencontrés, faire aujourd'hui une étude des prix, avant de soumissionner pour un projet quelconque, est un véritable « casse-tête chinois » à cause de la spéculation entretenue, disent-ils cycliquement autour de certains produits. Selon le président du bureau de l'UNEB à M'Sila, la situation est devenue tellement kafkaïenne que, récemment, un projet de réalisation de 300 logements dans cette wilaya n'a vu aucun soumissionnaire faire une offre de marché. Â Il soutiendra que devant l'absence « d'indices de révision des prix qui tiennent réellement compte des augmentations des prix des matériaux de construction, aucun entrepreneur n'a voulu s'aventurer dans le projet ». Pour un autre membre de cette organisation, le ciment est produit en quantité suffisante dans les cimenteries, sauf lors de périodes où surgissent des problèmes techniques ou d'entretiens à l'intérieur des usines. Le problème réside, souligne-t-il encore, dans la gestion puis la distribution de ce produit. Ainsi, explique-t-il, très souvent les demandes des entrepreneurs ne sont satisfaites que deux mois après, alors que les chantiers ne peuvent pas attendre autant. Il affirmera que 70% des entreprises algériennes du bâtiment du secteur privé ne font plus de demandes au niveau des cimenteries, ce qui fait qu'elles se rabattent, « pour faire vite » sur les revendeurs. Ces derniers, soutient notre interlocuteur, ne trouvent, par contre, aucune peine pour « satisfaire » les demandes. « Il y a une mauvaise organisation à l'intérieur des cimenteries et une très mauvaise distribution de ce produit », dira, pour sa part, le président du bureau de l'UNEB à Alger, M. Cherifi, qui soulignera qu'il faudrait instaurer des cahiers des charges et veiller scrupuleusement à leur application. En fait, précise-t-il, le problème réside dans l'application de la réglementation qui régit ce secteur. « Des textes existent mais ils ne sont pas appliqués », se désole-t-il en soulignant que cet état de fait ouvre la porte à tous les spéculateurs ce qui, du coup, provoque des tensions périodiques. Â Mais le problème, qui semble « irriter » l'Union nationale des entreprises du bâtiment, c'est les entreprises étrangères qui ont accaparé les meilleurs chantiers avec, disent-t-ils, les meilleurs prix, à savoir 32.000 DA le mètre cube de béton, alors que les entreprises locales sont maintenues dans les anciens prix qui dépassent rarement les 22.000 DA pour la même quantité de béton réalisée. « Bien sûr qu'on ne peut pas être compétitifs devant les entreprises étrangères si les prix ne sont pas pareils pour toutes les entreprises », a déclaré M. Cherifi. Les membres de l'UNEB étaient unanimes pour dire, qu'en réalité, ce sont les entreprises algériennes qui réalisent les chantiers « raflés » par les compagnies étrangères. Ces dernières, déclarent nos interlocuteurs, très souvent acculées et dépassées, n'hésitent pas à faire de la « sous- traitance » avec des entreprises locales moyennant 22.000 DA le mètre cube de béton, alors que la réglementation interdit strictement cela. Pour « GESI- TP », une filiale du groupe GENI SIDER, présente également au salon de BATIMATEC, le problème des matériaux de construction ne s'est jamais posé à la société. Avec un effectif de 1.630 employés et un chiffre d'affaires de 1.833 millions de DA réalisé en 2006, cette entreprise a connu un essor important, ces dernières années, à la faveur des innombrables chantiers lancés dans le cadre du plan de relance économique. Selon le directeur du développement et de l'ingénierie de GESI- TP, M. Achabou Mohamed, le problème de la disponibilité des matériaux de construction ne s'est jamais posé à l'entreprise. La seule perturbation qui a eu lieu, dit-t-il, concernant le ciment notamment, c'est lors des pannes survenues dans les chaînes de production de certaines cimenteries, il y a de cela trois mois. « Tout le matériel nécessaire pour la construction est disponible », a-t-il déclaré, en soulignant toutefois qu'il existe une certaine spéculation autour de l'acier qui est cédé à 8.500 DA le quintal chez les revendeurs. Concernant le rond à béton, le responsable de cette entreprise publique, qui ambitionne de devenir leader sur le marché national, affirme qu'il est disponible entre 8.000 et 9.000 DA le quintal alors que certains entrepreneurs affirment qu'il a atteint les 12.000 DA. « Nous utilisons une moyenne de 70 tonnes par mois de béton armé et nous n'avons jamais connu de problèmes majeurs qui puissent affecter nos chantiers », a-t-il affirmé, en précisant que son entreprise s'approvisionne dans les mêmes cimenteries et les mêmes points de vente que le privé. Le plus difficile, poursuit-il, c'est de décrocher des marchés et de respecter les conditions fixées par le maître de l'ouvrage. En tous les cas, le salon de BATIMATEC a permis de constater les avancées dans le secteur du bâtiment, des travaux publics et de la construction. La quasi-totalité des produits et autres matériaux de construction sont disponibles, indique-t-on. L'un des problèmes est de s'adapter à chaque fois aux fluctuations des prix.
Posté Le : 07/05/2008
Posté par : sofiane
Ecrit par : Z Mehdaoui
Source : www.lequotidien-oran.com