Algérie

Les malheurs du même sang


Les malheurs du même sang
Le proverbe berbère répandu qui signifie que «le mal provient du proche et mes malheurs de mon sang», est toujours d'actualité!Il y a un adage berbère des Aurès, Lememcha, qui dit exactement que «le mal provient du proche et le malheur, du même sang». Les dossiers relatifs aux violences faites entre familles, alliés, proches, voisins, associés, etc... sont légion. Et comme la majorité de nos juges en 2014 sont quasi jeunes, il y a un risque pour ces magistrats de ne pas savoir écouter les bobards et balivernes.Rarement, il nous arrive d'assister à des audiences publiques consacrées au «référé». Eh bien, samedi, de passage à Koléa, nous avions assisté à un procès mettant aux prises deux frères âgés. L'un d'eux évoque les us et coutumes. Les deux frères s'avancent à l'appel de leurs noms et prénoms. Le premier entre dans la soixantaine, le second en sort. Ils ont les cheveux gris et une mine défaite.Le juge jovial, frais et dispos invite le plaignant à cracher le morceau. «M. le président, je suis en train d'installer les conduites de gaz. Mon frère aîné, qu'Allah lui pardonne, m'empêche de procéder aux travaux. Je ne comprends pas», dit Ahmed que le magistrat interrompt presque en ire: «A vous, Hamid, quel est votre argument, car le lien du sang doit être nul pour que vous empêchiez vos neveux de dormir au chaud, votre belle-soeur de manger chaud et votre frère d'avoir chaud au coeur par le stress continu qu'il vit», gronde le juge qui aurait tant voulu que les deux frères adversaires se jettent dans les bras l'un de l'autre... Le prévenu, si l'on peut dire en «référé», marque un temps avant d'éclater: «M.le président, vous n'êtes pas sans savoir que notre société arabo-islamique ne supporte pas certains comportements», récite le vieux avant d'ajouter que son frère est venu avec des ouvriers alors que lui était absent du domicile. Et ici, le magistrat d'éclater à son tour: «Eh ben, la charia si elle devait être appliquée. Les us et coutumes' Si on devait les respecter on commencerait d'abord par rester chez soi lorsqu'un de nos frères nous informe de son probable passage». Les deux frangins évitent de se regarder. L'aîné est gêné, le président de l'audience en profite pour enfoncer le clou: «Je vous somme de laisser votre frère procéder à l'installation des coudes de gaz. Vous avez jusqu'au 16 de ce mois pour respecter cette décision de justice.» L'aîné a dépassé la gêne, c'est la honte d'être maltraité au nom de la loi. Confus et désarmé, l'inculpé veut placer un mot en ce beau samedi. Avec le regard, le juge laisse faire.«D'accord, M. le président, qu'il vienne exécuter les travaux mais qu'il fasse attention aux us de la famille.» Le juge regarde bien les deux frères et leur assure que cette histoire est précédée d'autres plus graves. Il les rassure cependant en les informant que ce n'est pas le rôle de la section «référé». La victime, le frangin cadet, remercie le président qui laisse échapper en guise d'avertissement: «Attention, c'est facile d'envoyer son frère en taule mais on le regrettera par la suite car l'action publique est un mécanisme terrifiant et une fois lancée, plus rien ne l'arrête sauf un sain et juste verdict qui n'est pas sûr d'être indulgent.» Le 16 du mois, le gaz a brûlé. Le juge a pardonné mais les deux frères n'ont pas oublié... Et ils ont intérêt à ne pas l'oublier car la justice a le bras long, plus long que les plus malins justiciables ne le croient. Et dans ce dossier, le président a fait jouer la «carotte» en laissant «le bâton» montrer le bout du nez. Et puis, ces histoires de famille commencent à bien faire. Il faut que l'on sache une bonne fois pour toutes que Dame Justice a autre chose à faire, notamment suivre le ministre, garde des Sceaux, chargé de la Réforme de la justice, initiée ouvertement par Bouteflika qui attend beaucoup des magistrats tels le courage, la volonté d'agir, le souci précieux de se former, le suivi des dossiers sérieux... Tout pour un juge indépendant, intègre et surtout courageux!


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