Algérie

Les mains et les poupées



La théorie de la « manipulation » n?est pas morte. Elle ressemble à un sac géant où l?ont peut tout jeter, y compris des êtres humains. La preuve : le chef du gouvernement, secrétaire général du RND également, est revenu, à l?occasion d?une réunion de son parti ce week-end, sur les troubles qui ont secoué Béchar et Tamanrasset pour dire : « Les jeunes ont été manipulés. » Par qui ? Il ne l?a pas dit. En 2001, lorsque la Kabylie s?était embrasée, on avait dit la même chose avant de considérer « le mouvement citoyen » comme interlocuteur officiel au dialogue. Lorsque les jeunes de Ghardaïa, de Ouargla, de Khenchela, de Batna et d?El Bayadh, pour ne citer que ces villes, s?étaient soulevés pour dénoncer le mépris des autorités locales et attirer l?attention sur leur situation dramatique, les hauts responsables d?Alger avaient dit la même chose. Ils n?ont visiblement réussi à convaincre que des juges qui, pour punir les jeunes manifestants, se montrent rapides, efficaces et sévères. Mais, enfin, quelle est cette force qui, d?une manière cyclique et presque ordonnée, arrive à créer de l?instabilité dans plusieurs villes du pays ? Cette force est-elle supérieure à l?Etat ? La théorie de la manipulation - qui a pour vocation de neutraliser toute contestation et de réduire les citoyens à des poupées en chiffon - semble obéir cette fois-ci à une tactique de défense : les gouvernants, qui trouvent des difficultés à s?assumer, cafouillent et ne trouvent pas de réponses aux appels du pays profond. Ils donnent l?impression de chercher à fabriquer de la diversion. Evoquant Béchar, le chef du gouvernement a, c?est une habitude là aussi, accusé des « mains étrangères ». Alors, une question simple : pourquoi ne pas déclarer la guerre à ces pays qui veulent tant de mal à l?Algérie et pour « couper », une fois pour toutes, ces mains malfaisantes ? Depuis des années les Algériens entendent ce discours qui a tendance à se renouveler et qui, à la longue, est devenu agaçant, ennuyeux... Il est la preuve vivante d?un manque inquiétant d?imagination des autorités. Personne ne dira aux gens de Béchar, de Tam ou d?ailleurs que les problèmes qu?ils posent sont réels et qu?ils vont trouver des solutions. Il est vrai que la méthode de « la casse » n?est jamais la bonne, mais les citoyens n?ont pas de moyens de s?exprimer et de dire leur mal. Les wilayas sont devenues des forteresses. Le Parlement est avalé par le confort bureaucratique d?Alger, de ses jardins et ses salons. Le paradoxe est qu?avec au moins 48 milliards de dollars de réserves de change, le pays est riche. Tellement riche que toutes les difficultés liées à l?eau, à l?électricité, au logement, à la santé, aux routes et même au chômage peuvent être réglées... si l?argent public est bien utilisé. Mais cà, c?est une autre histoire.


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