Concocté en vase clos et dans la précipitation sans aucune considération pour les acteurs économiques que les rédacteurs du texte n'ont même pas pris la peine de consulter, il est peu probable que le nouveau code des investissements produise les effets bénéfiques escomptés.Mis à part quelques déclarations officielles, confirmant notamment le maintien de la règle des 51/49% qui est en grande partie à l'origine du blocage des investissements directs étrangers rien n'a, de surcroît, filtré du contenu de ce énième code, présenté comme la panacée contre tous les maux dont souffre l'industrie algérienne. Plutôt que de susciter l'espoir, cette manière de traiter dans l'opacité un sujet aussi délicat, contribue au contraire à jeter le trouble chez les hommes d'affaires incités encore davantage à l'immobilisme. Il faut en effet savoir que ce que les investisseurs redoutent par-dessus tout quand il s'agit de risquer son argent dans de nouvelles affaires, c'est l'opacité et l'instabilité juridique, ce que le gouvernement algérien s'est, cette fois encore, arrangé à leur servir à la faveur de cette quatrième refonte du code des investissements. On ne voit vraiment pas ce que cette nouvelle version du code des investissements peut apporter de positif à la dynamique de repeuplement industriel que le gouvernement souhaite amorcer par ce moyen, alors qu'il n'échappe à personne que le recul dramatique de l'investissement durant ces quinze dernières années, n'est pas dû au dispositif juridique existant, mais aux agissements néfastes des administrations publiques (douanes, fisc, domaines, banques, directions du commerce, Sonelgaz, etc.) et aux comportements exagérément bureaucratiques de la Banque d'Algérie qui mène la vie dure aux investisseurs, sous prétexte de préserver le fragile équilibre de la balance des paiements.De nombreux investisseurs algériens et étrangers sont effectivement bloqués et, parfois même, poursuivis en justice pour des futilités. Payer des travailleurs expatriés, transférer des encaissements ou des dividendes relèvent du parcours du combattant, sans que la Banque d'Algérie songe à clarifier une bonne fois pour toutes la réglementation à l'origine de blocages récurrents. Echaudés par cette faune de prédateurs institutionnels qui avaient déjà conduit de nombreux promoteurs à la ruine ou à l'abandon de projets, ce nouveau code de l'investissement dont ils ne savent déjà pas grand-chose, ne parviendra certainement pas à mettre en confiance ceux qui ont les moyens d'investir dans un pays qui recèle pourtant beaucoup d'opportunités d'affaires. Certains attendront d'y voir plus clair, d'autres, sans doute plus nombreux, s'en iront investir sous des cieux plus cléments.Comme motif tout à fait légitime de crainte, il y a, de surcroît, cette pratique pour le moins anormale, mais dont nos gouvernements ne veulent pas se départir, qui consiste à établir leurs politiques économiques à coups de lois de finances mais, plus grave encore, à coups de lois de finances complémentaires qui ne font même l'objet de débats parlementaires.Un important industriel algérien installé dans la zone industrielle de Rouiba nous affirmait tout récemment qu'il «se tenait le ventre» à la veille de la promulgation de chaque loi de finances dont certaines, à l'instar des lois de finances complémentaires pour 2009 et 2010 qui avaient, se rappelle-t-il, produit l'effet d'un séisme sur de nombreuses entreprises industrielles algériennes. Environ 55 000 d'entre elles avaient fait, selon les statistiques de l'ONS, faillite ou ont été contraintes de changer rapidement d'activité en l'espace d'à peine trois années.N'oublions pas enfin le rôle néfaste que joue le Conseil national de l'investissement (CNI) que préside le Premier ministre lorsqu'il s'agit d'agréer de gros investissements privés. Ce dernier se comporte beaucoup plus comme un filtre contre l'expansion de certaines entreprises privées algériennes que comme stimulateur de création de nouvelles richesses et d'emplois. Cette gestion politicienne du CNI a privé l'Algérie d'au minimum 20 milliards de dollars d'investissements productifs de diverses natures.L'homme d'affaires Issad Rebrab aurait, à lui seul, une dizaine de grands projets en souffrance au niveau de cette institution, pour certains depuis plus de cinq ans.La réponse du ministre de l'Industrie et des Mines, M. Bouchouareb, à la requête de ce grand industriel algérien, sonne comme un refus délibéré et définitif d'approuver tous les projets que ce dernier a déposés au CNI.On l'a bien compris, il n'y a pas derrière cette énième refonte du code des investissements une réelle volonté de promouvoir l'économie productive, mais seulement le souhait de faire gagner du temps et de l'argent aux importateurs pour lesquels la législation actuelle fonctionne à la perfection. Le pouvoir politique semble avoir délibérément assis le régime de croissance algérien sur ce modèle dont il tire largement profit à l'occasion des échéances électorales importantes.Ce régime de croissance, qui a permis l'émergence de très grosses fortunes n'aura, à l'évidence, de chance de changer qu'à la faveur d'un changement de régime politique dont personne ne peut aujourd'hui entrevoir ni l'échéance ni l'issue du fait des turbulences géostratégiques qui affectent la région.
Posté Le : 13/10/2014
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Nordine Grim
Source : www.elwatan.com