Faut-il qu'à
chaque débâcle se dissimuler derrière le régime politique et d'autres
considérants ? Ou faut-il changer résolument de comportement ? Tenter vainement
de lutter contre l'hydre systémique et cela de l'aveu même du premier magistrat
du pays, ou bien de restructurer notre matériel neuronal pour une autre
approche dans la perception des défis de l'heure.
De plusieurs
ordres, de la sécurité hydrique à celle des nutriments et de celle du
médicament à celle de la technologie, ils ne semblent inquiéter personne en
dehors du cercle restreint des initiés.
L'épuisement des ressources énergétiques
fossiles n'est pas un effet d'annonce, mais une réalité de demain. Et c'est à
moins de deux décennies qui ont déjà commencé à courir. En matière d'alternance
au sommet de la pyramide, nous sommes à six ou sept mandatures, nous talonnons
beaucoup de pays dit libéraux. Malheureusement, les résultats obtenus sont loin
des attentes. Il est clairement établi, par les lois de la nature, qu'il n'y
pas de bon grain sans un bon terreau tout autant que l'inverse puisse être
vrai.
Les donneurs de leçons démocratiques seront
les premiers à bâillonner la parole. Les prédicateurs péroreront sur la
stigmatisation de leurs propres travers ; la Commedia Dell'Arte se déroule tous
les jours sous les yeux de tout le monde. Le détournement est devenu une
pratique nationale, elle s'exerce impunément par le piquage de la conduite
d'eau, au branchement illicite de l'énergie électrique à partir d'un candélabre
public, de l'empiètement sur le domaine public à l'accaparement des richesses
nationales. Il y a à tous les goûts et à tous les coûts. L'enfance et
l'adolescence n'en sont pas exemptes. La tricherie est enseignée à l'école,
elle est pédagogiquement menée ; elle commence par l'offrande de douceurs à la
maîtresse jusqu'aux liasses de billets glissées ingénument dans la poche
profonde de la blouse du maître. Ne dit-on pas que la fin justifie toujours les
moyens ? Ces derniers sont irrésistibles et percutants, ils viennent à bout de
tous les remparts.
La morale mise à
mal s'est effilochée face à l'appauvrissement, d'ailleurs tout relatif, car
tout le monde a été nourri à la corne d'abondance de l'Etat providence. Cette
propension à gaver ne semble pas avoir diminué ; aux dernières nouvelles,
Algérie Telecom compte offrir aux membres des services de sécurité et à la
Famille révolutionnaire des tarifs préférentiels allant jusqu'à 50% de
dégrèvement. Il n'est nul besoin d'être grand devin pour prédire un funeste
avenir pour l'opérateur historique. Les opérateurs arabes installés par le
miracle de l'ouverture économique, ne pouvaient même pas s'illusionner d'une
telle aubaine. La partition, dans les deux sens étymologiques, se jouera sur du
velours. La suite est connue d'avance, déséquilibre budgétaire, velléitaire
perfusion financière, travailleurs sur le carreau ; le scénario est aussi fade
que celui d'un navet de série B. Il y aura toujours un gestionnaire bouc
émissaire et un magistrat pour déclarer la faillite consommée.
Personne n'a le
droit, fût-il historique, de brader le patrimoine des générations à venir. De
petits pays, sans «Histoire», passent le plus clair de leur temps à organiser
des votations pour toute décision concernant le citoyen. S'agirait-il même d'un
simple petit minaret. Etre ou ne pas être, la question est posée depuis plusieurs
siècles ailleurs. Les petits consensus aguerrissent et préparent le citoyen aux
décisions majeures dont il sera tenu pour l'unique comptable. Ce même citoyen,
tenu à l'écart, transformera son énergie vitale en force d'inertie. Il
gesticulera autour de l'injonction pour faire croire à son entière adhésion par
sa vassalisation qui ne peut être qu'intéressée. Les exemples ne manquent hélas
pas, la machine bureaucratique locale est le meilleur prototype de la
duplicité. Elle dénigre en aparté son propre discours officiel et toute honte
bue, elle se désolidarise fréquemment des collaborateurs auteurs de couacs. On
leur trouvera un chapelet de motifs pour faire sonner le glas de leur
déchéance. Au suivant !
La fraternisation
par le bouss-bouss est passée depuis longtemps dans les mÅ“urs d'Etat. Un membre
du gouvernement en visite d'inspection est lamentablement «aseptisé» (il serait
plus approprié de dire contaminé) dès sa descente de son moyen de locomotion.
La congratulation humide et résonnante est, en toute apparence, une frime
pratiquée de manière grotesque pour impressionner l'assistance qui est loin
d'être dupe. D'ailleurs, le port de la tenue d'appart n'est apparemment
exigible que pour trois personnalités de la structure étatique. A partir de cette
exception, tous les autres seront inconsciemment fourrés dans la loge de la
collégialité. Les services protocolaires ont souvent du mal à différencier le
sénateur du député, tellement les différences sont ténues. La différenciation
se fera empiriquement selon l'intensité de l'accolade exercée sur l'invité du
jour. Il faut conquérir sa place à l'auditorium et surtout à la salle à manger.
Il y va du devenir politique de l'élu national. L'élu local sera heureux qu'on
ne l'ait pas oublié et qu'il se contentera d'un évanescent et fugace plan sur
l'écran TV au moment du JT. Le soir, entouré de sa progéniture, il guettera les
images merveilleuses, le doigt fébrile sur le bouton du DVD. La postérité doit
savoir qu'elle est de bonne ascendance. Tout ce micmac va à l'encontre de
l'intérêt public. Sans autodiscipline, les grands objectifs de développement
seront immanquablement dévoyés et leurs effets mis en péril. On crée le malaise
par des promesses non tenues ou qui viennent tardivement pour ensuite
réquisitionner la force publique pour calmer les esprits, le temps d'autres
promesses. Un général colonial de sinistre mémoire ne disait-il pas à sa
hiérarchie, au lendemain des massacres de 1945 : «Je vous ai ramené la paix
pour dix ans, à vous maintenant d'en tirer la leçon !». S'il est vrai que la
comparaison est excessive et largement disproportionnée, la lugubre sentence
est dans ce cas toujours d'actualité.
Les décisions
tardives font toujours l'objet de marchandage populaire et parfois populiste.
Ils apportent de l'eau au moulin des attentistes et des dénigreurs, ils
entretiennent les braises du malaise social. Le simple fait d'occulter les
besoins biologiques de l'administré par l'absence de vespasiennes, le met dans
un inconfort insoutenable quand on sait que certaines pathologies sont
profusément productrices de déchets organiques. Prosaïques certes, mais les
désagréments sont intensément mal vécus. On pestera contre le maire, même issu
d'une prestigieuse université. Les décisions prospectives d'anticipation,
prises en amont, inhibent toute tentative de dérèglement de la structure
sociale bien arrimée aux fondements de la République dans son acceptation
moderne, ou séculière autour du consensus communautaire. Les pare-feu
ancestraux sciemment disqualifiés n'ont pu être avantageusement supplantés par
un tissu associatif encore immature. La communication, mère de toutes les
vertus dirions-nous, est sans nul doute l'actuel tendon d'Achille de tous les
décideurs potentiels. Utilisée comme moyen de domination, elle préparera le lit
de la contestation et de la remise en cause. Chaque fois que l'individu est
informé, plus son engagement est affirmé et son ego respecté. Ce besoin
viscéral de considération est tellement important qu'il en devient une quête
permanente. Le sentiment de frustration peut mener parfois à des comportements
inconsidérés, allant à contresens du propre intérêt de l'individu. D'où le
curieux adage populaire : «Nif ou el khssara !». C'est tout dire !
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Posté Le : 13/05/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Farouk Zahi
Source : www.lequotidien-oran.com