Algérie

Les intouchables



Les intouchables
Il est devenu coutumier, à chaque grande affaire judiciaire comme celle jugée cette semaine devant le tribunal d'Alger, relative au trafic de drogue organisé autour d'un réseau de stewards d'Air Algérie, que les avocats se lâchent dans leurs plaidoiries pour dénoncer la justice à deux vitesses : une pour les pauvres et l'autre pour les riches. Des noms d'enfants de hautes personnalités qui seraient impliqués dans cette affaire et non poursuivis par la justice sont cités dans la presse sans que cela interpelle les magistrats pour les faire venir à la barre comme tout justiciable.Le dossier du scandale Sonatrach et SNC-Lavalin dans lequel est impliqué le neveu de l'ancien ministre des Affaires étrangères, Mohamed Bedjaoui, n'aurait jamais livré ce secret d'alcôve qui consiste à protéger les intérêts des réseaux et des groupes d'influence qui gravitent autour du pouvoir s'il n'avait pas été pris en main par des juridictions étrangères. Ce sont les magistrats italiens, suisses et canadiens qui ont brisé les chaînes de l'omerta observée en Algérie autour du personnage de Farid Bedjaoui, cité comme une des pièces maîtresses de la corruption institutionnelle qui a porté un grave préjudice à «l'image» du pays.Les anecdotes pullulent dans la vox populi qui rapportent des récits tout aussi délirants des frasques et délits, parfois gravissimes, relevant du pénal, commis par des rejetons, des proches et amis de personnalités influentes du pouvoir, civiles et militaires, sans qu'ils aient eu à rendre des comptes devant les tribunaux. Au moins deux enfants, l'un d'un ministre et l'autre d'un apparatchik du FLN, sont cités dans des affaires similaires de trafic de drogue. Les rares indiscrétions qui ont filtré dans la presse sur ces accusations ont été vite étouffées dans l'?uf sans que les personnes incriminées aient jugé nécessaire d'apporter un démenti, des éclaircissements ou encore de porter plainte pour diffamation, si tel était le cas sur ce qui s'est dit et écrit dans les journaux. La consigne, dans le milieu, est de faire le dos rond, convaincu que la caravane finira par passer.Cette justice sélective, qui n'est pas une vue de l'esprit mais bien une réalité, a alimenté une abondante littérature populaire judiciaire sur les barèmes autour desquels se négocieraient les affaires selon la nature du dossier et la gravité du délit. La meilleure parade pour convaincre les citoyens que la justice est réellement souveraine, rendue en leur nom et qu'un justiciable en vaut un autre, quels que soient son rang social ou sa puissance, c'est la transparence et l'indépendance de la justice des autres pouvoirs. Lorsqu'on instaure un privilège de juridiction parallèle aux cours classiques destiné à juger les ministres et les hauts responsables de l'Etat passibles, pour leurs délits, de la Cour suprême, on légitime forcément l'existence de deux collèges de justiciables.La justice algérienne se réconciliera avec les citoyens le jour où l'on verra, comme dans les pays démocratiques, les juges et les procureurs affronter l'opinion publique et les médias en acceptant de se mettre sous les feux des projecteurs et des critiques. Mis à part les avocats et le personnel du secteur de la justice qui peut citer un nom de magistrat, de président de Cour. C'est tout dire.




Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)