Algérie

Les instruments de contrôle ne sont pas exécutés



La surfacturation des importations demeure l'une des techniques les plus courantes qu'utilisent les opérateurs indélicats pour les transferts illicites de fonds vers l'étranger. Multinationales et industriels locaux recourent à ce moyen illégal en gonflant les factures des produits, voire des infrastructures "clé en main", importés.Ce phénomène engendre des pertes sèches en devises au pays et remet en cause sa crédibilité et sa capacité à attirer des investisseurs d'outre-mer. Même si cette pratique frauduleuse est devenue sport national chez nous, l'ONG Global Financial Integrity a toutefois classé l'Algérie, dans son rapport entre 2006 et 2015, à la 95e place sur un ensemble de 148 pays.
Néanmoins, si l'on se fie à la déclaration du feu Bakhti Belaïb, alors ministre du Commerce, qui a porté le taux de la surfacturation à 30% des importations du pays, l'on peut dire que l'Algérie perd des sommes colossales de ses devises. Si l'on considère que les importations de notre pays avoisinent chaque année en moyenne les 45 milliards de dollars.
Les 30% de surfacturation équivalent à environ 13 milliards de dollars. Ce qui représente une enveloppe énorme dont est dépossédée injustement l'Algérie tous les ans. L'on imagine la contribution d'un tel montant dans le développement et la croissance du pays. Ce n'est pas par pur hasard d'ailleurs, si le président de la République en parle dans son discours. Il faut dire que la réglementation de change dans notre pays ne fait qu'accentuer ce fléau.
Ne pouvant pas disposer de devises de manière officielle et compte tenu de l'interdiction de leurs transferts à l'étranger, les opérateurs trouvent la solution à cette contrainte dans la surfacturation de leurs importations. Le double taux de change et la non-convertibilité du dinar constituent l'une des raisons à l'origine de cet acte antiéconomique pratiqué par des entreprises.
Cela dit, l'Algérie détient, en principe, les moyens nécessaires pour au moins atténuer cette fraude qui prend des proportions alarmantes même si les institutions en charge du contrôle notamment les douanes restent passives, voire apathiques devant pareilles incongruités dans le commerce extérieur. Notre pays a, en effet, signé des accords et autres conventions avec d'autres pays et peut obtenir des renseignements sur les comptes en devises des hommes d'affaires algériens.
Les révélations de "Panama Papers" et de "Wikileaks", pour ne citer que ces deux exemples, peuvent être une piste à suivre dans ce sens. L'objectif, c'est d'identifier les sources et les pays. Et le premier fournisseur de l'Algérie n'est autre que la Chine avec un montant évalué à 8 milliards de dollars. En outre, il existe dans le code des douanes un article sur le contrôle qui, a priori, est appliqué par certains pays.
L'administration des douanes peut solliciter conformément à cette disposition l'aide de sociétés spécialisées mondialement connues telles que Veritas, SGS, Cotecna, Intertek? pour vérifier le coût réel payé par un importateur à son fournisseur au moment de l'achat avant expédition de la marchandise. Les douanes sont en mesure d'établir une DPI (Demande préalable à l'import) pour le contrôle des prix authentiques payés surtout avec les pays où les flux d'importations sont plus importants.
Une chose est certaine, les institutions en charge du contrôle sont tenues de mettre à exécution tous les instruments à leur disposition consacrés dans les différents accords paraphés par l'Algérie comme celui signé avec l'Union européenne qui aborde la transmission d'informations et prend en compte des aspects liés à la transparence, à la traçabilité... Ces structures de contrôle peuvent également faire valoir les lois de la charte des Nations unies portant sur la corruption.
Il est de ce fait facile de connaître les dépôts en France, par exemple, et de savoir si l'origine est légale ou illégale. Il est grand temps que l'Algérie change de cap et passe de l'étape où la surfacturation et la corruption étaient monnaie courante à une autre où les institutions douanières et judiciaires combattent ce phénomène dans le respect des lois de la République.

Badreddine KHRIS


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