Les ingrédients de l'indifférence

Morosité, désintérêt des citoyens, panneaux d'affichage (dont le placement a coûté cher aux collectivités locales) quasiment vides et timidité des rencontres de proximité résument le bilan de cette première décade de la campagne aux élections législatives. Une campagne durant laquelle les candidats usent de tous les moyens, même illégaux, pour convaincre les électeurs d'aller aux urnes le 10 mai prochain. Donc, en plus d'être maussade, cette campagne est celle des dépassements. A chaque parti, sa façon de transgresser la loi organique sur les élections. L'essentiel est de convaincre les citoyens et de remporter le maximum de sièges au Parlement pour soi-disant représenter le peuple. Or, ce même peuple déjà gavé par des promesses sans lendemains ne croit plus à ces desseins électoralistes. Il aspire certes à la démocratie et à de meilleures conditions socioéconomiques. Mais quel pouvoir pour les députés dans ce cadre ' L'APN n'a-t-elle pas déjà montré qu'elle n'est qu'une simple boîte aux lettres des textes de loi proposés par l'exécutif et une tribune pour défendre certains lobbies comme l'ont fait les députés avec les importateurs de friperie en essayant de faire passer la loi autorisant ces importations ' Sans plus. L'on se souvient de l'enquête parlementaire sur la hausse des prix du sucre et de l'huile qui n'a finalement rien dévoilé. Elle a seulement confronté le constat du ministère du Commerce. Difficile donc de convaincre connaissant le passif de l'APN. Difficile aussi de convaincre les citoyens d'aller accomplir l'acte du vote dans une conjoncture marquée par des tensions sociales et des hausses vertigineuses des prix qu'un représentant du gouvernement explique par la boulimie des achats chez les consommateurs après les dernières augmentations de salaires. Parler du 10 mai et arracher l'enthousiasme des électeurs dans une campagne truquée de déraillements à travers des discours prônant le changement sans conviction palpable, sans rupture avec les anciennes pratiques et de surcroît sans idées innovantes ne se présentent guère faciles comme missions. L'indifférence des citoyens aux sorties de la campagne électorale est un indice révélateur. Une indifférence accentuée par le mépris affiché par les membres du gouvernement occupés à animer cette course à la députation, aux préoccupations des citoyens, lesquels font de plus en plus face à de rudes quotidiens meublés de privations et d'attente. Tout est suspendu jusqu'à l'après-10 mai. Entretemps, les prix poursuivent leur ascension et les spéculateurs continuent à dicter leur diktat sur un marché toujours en quête d'organisation.
S. I.