Yasmina Khadra l’auteur de “À quoi rêvent les loups” n’arrive pas à se défaire de ses angoisses même après s’être confessé dans “L’Écrivain” et “L’Imposture des mots”. Il s’en va cette fois cueillir les hirondelles de Kaboul avec une plume fidèle et inspiratrice. Comme son héros Mohsen, il parcourt les rues de cette ville rongée par la barbarie intégriste pour nous restituer un climat de terreur et de suspicion.
Les personnages de Yasmina Khadra ont cette particularité de s’incruster en nous pour nous tourmenter et nous tenir en haleine des pages durant, ceux qui n’ont pas oublié l’affreux nain de le seigneur des agneaux retrouveront cette même ambiance de terreur et de sueur et cet univers noir de Yasmina Khadra, qui, pour implanter les décors de son nouveau roman, a choisi Kaboul, Kaboul des mollahs et de l’inquisition. Les Hirondelles de Kaboul, oiseaux représentatifs de finesse et de légèreté, sont sans doute ces femmes afghanes, victimes d’une société qui ne sait pas pourquoi elle se bat, lutte et vit en définitive tant les repaires sont faussés. Ces femmes voilées de bleu. Bleu linceul ou bleu espoir ?
comme l’attachante et courageuse Zuneira, la femme de Mohsen, qui fut une enseignante brillante et que les talibans ont réduit à l’état d’une chose insignifiante soumise à des règles strictes. C’est dans Kaboul de l’an 2000 que se situe toute la trame du roman partagé par quatre personnages : Mohsen, qui descend d’une famille de commerçants prospères que les talibans ont ruinée.
Sa femme, enseignante. Il y a aussi Atiq, le gardien de prison et sa femme Mussarat qui se meurt de maladie et de désespoir. Ces quatre personnages tentent de survivre sous le règne d’un régime atroce en tentant de se préserver, mais la violence est là tout autour.
Pour nous faire pénétrer au mieux dans son univers, Yasmina Khadra nous convie de suivre le personnage principal Mohsen qui erre, oisif, dépressif dans les rues de Kaboul, et au fil des pages, nous est dévoilé une ville méconnue rompue par la violence et où l’homme est réduit à l’état de bête et contraint de réagir de la même façon qu’elle. Ainsi, quand Mohsen participe à la lapidation d’une femme accusée d’adultère, il le fait mécaniquement, sans vraiment mesurer la gravité de son geste.
Le couple Mohsen-Zuneira rêve d’un autre monde et s’accroche à cet univers virtuel par la force de leur amour.
Mais est-ce suffisant ? Dehors, rien n’a plus de sens, encore moins la vie. Yasmina Khadra a cette capacité de tenir en haleine son lecteur. Pourtant, il n’y a guère de gaieté dans son univers sombre, tragique et horrible, mais sa plume sait si bien conter et décrire que tout est acquis d’avance.
Après l’Écrivain, affectueux et nécessaire pour l’auteur tant une halte s’imposait, est venu L’imposture des mots, beaucoup plus calculé que spontané et dont le contenu a une impression de déjà-vu et où parfois les confessions et l’écriture ne font pas toujours bon ménage.
Avec les Hirondelles de Kaboul, Yasmina Khadra reprend sa plume d’écrivain pour nous faire une nouvelle démonstration de cette force créatrice qui l’anime et qui nous reconquit aussi.
Rarement un écrivain a su mettre au jour avec autant de clarté et de pénétration la complexité des comportements et des situations dans les sociétés musulmanes déchirées par l’intégrisme religieux.
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Posté Le : 03/09/2002
Posté par : nassima-v
Ecrit par : Nassira Belloula
Source : www.liberte-algerie.com