Algérie

les grands défis du gouvernement d'Abou Chagour Retour des Libyens «déportés» et rétablissement de la sécurité



les grands défis du gouvernement d'Abou Chagour                                    Retour des Libyens «déportés» et rétablissement de la sécurité
Le Conseil national de transition de Mustapha Abdeljalil et le gouvernement de Abderrahim Al Qib ont continué à verser des pensions
aux ex-soldats de l'armée d'El Gueddafi qui se sont déclarés auprès de commissions spécialisées.
Les rentrées scolaire et universitaire rappellent aux Libyens l'impitoyable exil vécu par des centaines de milliers de leurs concitoyens à l'étranger et, même, en Libye. Achraf n'a pas repris le chemin de l'école en début de semaine. Son père, Jemaâ, ne sait pas s'il va rester encore au quartier populaire de Bouslim à Tripoli, ou rentrer à Mezda, à 170 km au sud de la capitale libyenne. Cette famille a été obligée de quitter sa maison à Awaynia sur la route de Zentane au Djebel Gharbi, avec le repli de l'armée d'El Gueddafi. C'était en mai 2011. La plupart des hommes de cette tribu faisaient alors partie des troupes de l'ex-dictateur de Libye.
Achraf et sa famille ont alors élu domicile du côté de Mezda, situé à 70 km au sud de Gharyan, où une autre branche de la tribu Awaynia vivait depuis des centaines d'années. Or, en juillet 2012, ces familles ont été chassées de leurs terres et ont dû se replier sur Tripoli, suite aux incidents avec d'autres tribus à propos de l'appropriation des terres. «Sans ce garage offert par une personne charitable, je serais dans la rue, ma femme, mes six enfants et moi», lance Jemaâ dont la pension de 500 dinars suffit à peine pour survivre. Le Conseil national de transition de Mustapha Abdeljalil et le gouvernement de Abderrahim Al Qib ont continué à verser des pensions aux ex-soldats de l'armée d'El Gueddafi qui se sont déclarés auprès de commissions spécialisées. Depuis, Jemaâ et sa famille ont essayé de rentrer à l'occasion de l'Aïd Al Fitr, mais leurs voisins à Mezda les ont de nouveau chassés malgré la présence des brigades de sécurité. «On nous a promis d'essayer de nous réinstaller la semaine prochaine», a-t-il répondu sans véritable conviction.
Des Libyens coincés à Tunis
Fatma et Leïla sont des habituées du café Trait d'Union à El Menzah 6, un quartier huppé de Tunis. Rappelant le style occidentalisé des Tunisiennes dans leur tenue vestimentaire, ces deux jeunes libyennes sont installées avec leurs familles en Tunisie depuis août 2011. «Je poursuis des études de gestion dans une université privée à Tunis», indique Fatma qui n'a pas nié rencontrer des difficultés dans les études, notamment sur le plan linguistique.
«En Libye, les études sont en langue arabe, alors qu'ici, certaines matières sont en langue française, voire anglaise», constate-t-elle. Interrogée sur les origines de leurs revenus familiaux pour se permettre un tel rythme de vie à l'étranger, Leïla avoue que son père est un riche homme d'affaires dans le commerce international. «Il continue à faire des affaires à partir de la Tunisie», raconte-t-elle, sans le moindre regret apparent.
«Les Tunisiens sont très accueillants à notre égard et nous allons continuer à vivre en Tunisie le temps qu'il faut», explique Fatma sur la question des perspectives d'une telle situation.
Les deux jeunes filles évoquent toutefois leur participation au workshop «oui au retour à la patrie », organisé en août dernier à Tunis par le bureau des droits de l'homme et du droit humanitaire international au ministère de la Défense libyen, en collaboration avec plusieurs organismes des droits de l'homme, en Libye et dans la région.
Des solutions qui tardent à venir
«Ce workshop indique que les autorités libyennes sont, elles aussi, conscientes de la gravité du problème dans la mesure que l'on recense près de 500 000 résidents libyens permanents en Tunisie», estime Abdessattar Ben Moussa, président de la Ligue tunisienne des droits de l'homme qui a contribué à la tenue de cette rencontre.
Evoquant cette problématique lors du workshop de Tunis, Mohamed Al Allagui, président de l'Assemblée nationale des libertés et des droits de l'homme en Libye a rappelé de l'impératif «d'un retour en sécurité à la patrie». Il s'est interrogé : «Qu'avons-nous préparé pour ceux qui désirent rentrer au pays '» En guise de réponse, Allagui a insisté sur la nécessité «d'être pragmatiques, faire le bilan de la situation et asseoir une justice transitionnelle, qui lève le voile sur la vérité, fait justice et débouche sur la réconciliation». «Il n'est plus possible d'enraciner la culture de la vengeance, il faut au contraire enraciner la culture de l'amour et du rassemblement», a-t-il conclu.
Achraf, Leïla et Fatma, ainsi que leurs familles représentent des échantillons d'une situation libyenne très complexe à laquelle doit faire face le nouveau gouvernement de Mustapha Abou Chagour qui vient d'être élu par le Congrès national général. A l'intérieur du pays, le phénomène de «déportation» a concerné essentiellement les tribus de Aweynia du côté du Djebel Gharbi et les Tawergha du côté de Mesrata. A l'étranger, la Tunisie et l'Egypte accueillent les tranches les plus importantes de la population libyenne qui a été obligée à l'émigration après la chute régime d'El Gueddafi.
Sécurité, le principal casse-tête
Toujours en rapport avec cette confrontation entre les divers intérêts dans la nouvelle Libye, la question de la sécurité se pose avec acuité dans ce pays où certaines estimations évaluent à vingt-huit millions le nombre de pièces d'armes aux mains de la population. On parle même de circulation de missiles sol-air comme celui qui s'est abattu sur le consulat des Etats-Unis à Benghazi. C'est dire l'importance des risques encourus par le nouveau gouvernement.
«La faiblesse du gouvernement central, le manque de ténacité de l'appareil judiciaire et la présence massive des milices en dehors des grandes villes ont fait que la sécurité est encore plutôt aux mains des brigades de rebelles et des tribus. Même la force ' bouclier de la Libye ' se cherche encore et évite d'entrer en conflit avec ces forces paramilitaires», pense Suliman Brahim, doyen de la faculté de droit de Benghazi, qui estime que «du rétablissement de la sécurité dépendra le reste des tâches du gouvernement de Mustapha Abou Chagour». «Sans sécurité, il n'y aura ni investissements, ni reprise économique et, encore moins, le retour des Libyens installés à l'étranger», conclut-il.


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