La langue amazighe a été reconnue langue officielle dans la Constitution algérienne le 7 février 2016. Sept années après la reconnaissance officielle de la langue amazighe, les chercheurs et les universitaires font face à de grands défis dont le plus important est sans doute la codification de cette langue plusieurs fois millénaire. Il s'agit d'un immense chantier dont la prise en charge nécessite de gros moyens aussi bien matériels qu'humains, des compétences aussi et surtout. La langue amazighe se décline, en Algérie, sous une dizaine de variantes dont les principales sont le kabyle, le chaoui, le mozabite, thaterguit, tazenatit et le chenoui. Il s'agit donc de travailler dans le sens de standardiser toutes ces variantes dans un processus d'unification et de normalisation qui aboutira à long terme, selon de nombreux scientifiques, à une intercompréhension inter-variantes linguistiques. Mais avant cela, un autre travail de recherche s'impose, toujours de l'avis de tous les scientifiques, dans ce même domaine. C'est celui de la collecte et de la sauvegarde de tout le lexique amazighophone de l'ensemble des variantes algériennes, dont certaines sont carrément menacées de disparition. Le fait que tamazight soit désormais doté du statut de langue nationale et officielle permet de mener ces chantiers de manière plus facile et surtout de façon coordonnée et organisée. Des centres de recherches ont été créés pour ce faire ainsi qu'une Académie. Parmi les centres en question, on peut citer le Centre national pédagogique et linguistique pour l'enseignement de tamazight et le Centre national de recherche en langue et culture amazighes situé dans la ville de Béjaïa. Pour sa part, l'Académie algérienne de langue amazighe, présidée par le professeur Mohamed Djellaoui, qui dirigeait le département de langue et culture amazighes de l'université Mohand-Oulhadj de Bouira, a du pain sur la planche. Il faut noter que bien avant l'officialisation de la langue amazighe, les départements de tamazight des universités de Tizi Ouzou, Béjaïa, Bouira et Batna, avaient déjà réalisé un immense et remarquable travail dans le domaine et formé des milliers de licenciés en langue amazighe et des centaines de magisters et de doctorats. De ce fait, il s'agira de capitaliser tout le travail scientifique effectué souvent de manière séparée, voire isolée. Par ailleurs, malgré la reconnaissance de tamazight comme langue nationale et officielle, l'enseignement de cette langue maternelle de millions d'Algériens tarde à prendre son envol, surtout en dehors des régions berbérophones pour une multitude de raisons. Le fait que la langue ne soit pas encore standardisée constitue le principal écueil à la généralisation de l'enseignement de tamazight. Les enseignants qui assurent l'enseignement de tamazight sont des diplômés des universités suscitées et ils ont reçu leur formation dans les variantes kabyle ou chaoui. Ils ne peuvent de ce fait pas assurer l'enseignement de tamazight dans des régions berbérophones où les locuteurs pratiquent d'autres variantes où même l'intercompréhension n'est pas acquise. Un autre problème se pose avec acuité. Il s'agit de celui de l'enseignement de la langue amazighe aux non-amazighophones. Ce point a, à maintes fois, été déploré. Mais l'expérience a plusieurs fois démontré que ce problème est surmontable. On a vu des non- berbérophones, résidant en Kabylie, qui ont suivi l'enseignement de la langue amazighe le plus normalement du monde. Certains se sont même distingués et brillé. Le cas de l'écrivain et chercheur en langue amazighe, Habib-Allah Mansouri, non-amazighophone, qui a commencé à apprendre tamazight à l'âge de 24 ans, est l'un des plus édifiants. Mais, comme tous les scientifiques s'accordent à le préconiser, traduire sur le terrain le statut de langue officielle conféré à tamazight nécessitera beaucoup de temps. Certains parlent d'une ou plusieurs générations. Beaucoup de retard est à rattraper. Mais ce qui compte le plus, c'est que sur le plan politique, la langue amazighe a enfin repris entièrement la place qui devait être toujours la sienne. Car personne ne doit oublier que tamazight «est revenue de loin».
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Posté Le : 08/02/2022
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Aomar MOHELLEBI
Source : www.lexpressiondz.com