Algérie

Les gardes communaux à Boufarik : «Nous ne rentrerons pas chez nous !»



Les gardes communaux toujours présents. C'est en substance ce qu'a voulu nous faire saisir le représentant national des gardes communaux rencontré avant-hier au niveau de ce qu'ils (les gardes communaux) appellent «le camp de la dignité» situé à la sortie ouest de Boufarik.
Il a fallu parcourir quelques kilomètres à pied, sous un soleil de plomb, en plein mois de Ramadhan pour arriver au camp. Sur les lieux, des huttes de fortune faites avec des roseaux arrachés des abords d'un verger tout près, avec au-dessus des morceaux de tissus pour les plus ‘nantis', des branches d'arbres desséchées et du carton pour les autres. Certains de ces abris étaient au milieu du champ. D'autres avaient érigé leurs nouvelles demeures sous les brise-vent plantés aux abords des vergers qui font la fierté de la Mitidja.
Il était dix heures environ et beaucoup de gardes communaux dormaient encore, enveloppés de couvertures qui ont vu des jours meilleurs alors que d'autres discutaient entre eux ou lisaient les journaux dont la plupart parlaient de leur cas. M. Aliouat Lahlou qui nous accompagnait le long de notre visite, nous présentait les uns autres et nous présentait à eux, tous nous ont accueillis avec un large sourire. Au-dessous d'un pin assez grand, quelques gardes communaux s'affairaient à réparer la hutte qui servait de cuisine et qui avait été détruite par un coup de vent une journée auparavant. Un réchaud à gaz rouillé, des marmites cabossées et une grande louche étaient les ustensiles utilisés pour la préparation du f'tour de dizaines de gardes communaux qui se trouvent ici depuis la veille du Ramadhan. Quelques-uns se sont rendus quand même chez eux pour faire les courses et revenir partager la vie de leurs camarades d'infortune.
En dépassant la «cuisine», M. Lahlou nous informa que le «Croissant-Rouge algérien» qui était «prompt à aider tous les peuples de la terre quand ils ont besoin de lui, nous a oubliés royalement, personne de cette institution faite pour porter aide et assistance à ceux qui se trouvent dans le besoin ne nous a rendu visite ni ne nous a apporté, au moins une fois durant le mois du Ramadhan, un repas chaud».
Ses propos traduisaient une amertume certaine car il se sentait abandonné même par ceux qui avaient pour mission d'aider les autres, sans chercher à savoir quoi que ce soit de leurs actes, «même si nous sommes fautifs, nous sommes aussi des êtres humains dans le besoin», a-t-il déclaré avant de continuer pour nous dire que des citoyens emmenaient chaque jour un nombre d'entre eux pour leur offrir le f'tour chez eux. Revenant sur le communiqué du ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales, M. Lahlou affirma que «vous savez que la plupart des gardes communaux sont malades, ils présentent des maladies professionnelles contractées dans les maquis où ils ont vécu de longues journées à traquer les terroristes. Ils sont diabétiques, asthmatiques, ont des maladies incurables et si, un jour, ils sont obligés de prendre un congé de maladie de longue durée, il ne leur restera que le salaire de base qui est de 14 000 DA, beaucoup moins que le SMIG», a-t-il tenu à affirmer d'un trait. Concernant la retraite anticipée à 18 000 DA, le représentant national des gardes communaux estime qu'elle est insuffisante, surtout qu'il leur est interdit de travailler ailleurs. Il rappelle que les gardes communaux ont travaillé au moins 17 années en H24 et qu'ils ne sont payés que pour 8 h, comme les fonctionnaires, alors «l'Etat nous doit encore toutes ces heures supplémentaires, et nous voulons rentrer dans nos droits ». « Donnez-nous 30.000 DA par mois comme retraite et nous partirons satisfaits, même si ce n'est pas vraiment suffisant», a-t-il ajouté avant de rappeler que lorsqu'ils ont pris les armes, les citoyens n'avaient qu'une idée en tête, celle de sauver l'Algérie coûte que coûte.
«A cette époque, il n'y avait aucune législation, aucune loi, il suffisait de présenter une photocopie de la CNI et un acte de naissance pour nous voir remettre un kalachnikov ou un Semenov et on était recruté», précisa-t-il, en affirmant que «notre seul diplôme en ces temps c'était «l'Algérie avant tout» et notre niveau c'était le «Nif» qui nous ont poussés à sauver l'Algérie du GIA et des autres groupes terroristes qui voulaient la mettre à genoux».
Questionné sur le devenir de la marche qu'ils devaient organiser et qui est reportée de jour en jour, notre interlocuteur nous déclara que «il n'y a jamais de marche arrière pour la dignité, nous avons commencé à Blida, nous avons été arrêtés à Boufarik, nous ne reviendrons pas à Blida et ne rentrerons pas chez nous, nous allons continuer jusqu'à Alger afin de recouvrer nos droits, nous marcherons même s'il nous faudra le faire d'ici l'Aïd ou après et dès que nous le pourrons nous avancerons, même de quelques centaines de mètres».
D'autres actions sont préparées par les gardes communaux qui ne veulent en parler qu'en temps opportun.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)