Algérie

Les forçats des temps modernes



Les forçats des temps modernes
Effarant. L'enquête menée par l'Office national des statistiques sur l'emploi et le chômage couvrant le dernier trimestre de l'année 2013 révèle l'énorme étendue de la précarisation qui frappe la population active. 42,4 % des travailleurs sondés affirment qu'ils ne sont pas affiliés à la Sécurité sociale. Des centaines de milliers de travailleurs sont ainsi privés de leurs droits les plus fondamentaux pourtant garantis par la loi régissant les relations du travail.Ils sont arbitrairement privés de l'essentiel de la législation sociale et par conséquent jetés dans une situation de forte précarité et de vulnérabilité. Les ouvriers non déclarés se trouvent souvent contraints de travailler dans les pires conditions, en échange de salaires faibles. Signe d'un champ de l'informel conquérant qui dévore en toute impunité les derniers espaces de droit. Un crime social dont l'Etat s'est rendu responsable car censé faire respecter la loi et surtout protéger les couches les plus vulnérables.Le ministère du Travail et de la Protection sociale, ? qui vient de pondre un avant-projet de loi portant code du travail liberticide ? qui dispose des instruments nécessaires pouvant permettre de lutter efficacement contre le «travail au noir», est coupable d'une situation intenable qui asphyxie les milliers de travailleurs à qui les gouvernements successifs exigent des efforts insupportables. L'Inspection du travail fortement sollicitée par les travailleurs se montre complaisante avec les entreprises frauduleuses. Elle est complice par son inaction.Depuis des années que des syndicalistes alertent sur l'exploitation des ouvriers par des entreprises nationales et étrangères au mépris des lois. Dans le sud du pays, où les conditions de travail rappellent tragiquement les images avilissantes d'asservissement, les cris des travailleurs sont étouffés. De nombreux syndicalistes, qui ont simplement osé dénoncer les lois de la jungle imposées par des sociétés étrangères dont le seul souci est d'engranger un maximum de profits, sont traînés devant les tribunaux, licenciés et pourchassés par les services de police comme des malfrats.Exploités par des entreprises «voyous», réprimés par les pouvoirs publics, les forçats des temps modernes sont abandonnés par une centrale syndicale bureaucratisée, totalement inféodée au pouvoir politique en échange de privilèges. L'UGTA de Sidi Saïd qui squatte illégalement la légendaire Maison du peuple ? jadis antre des luttes sociales ? a divorcé d'avec le monde du travail. Après avoir fait avaler aux travailleurs les couleuvres des plans d'ajustement structurels et des choix politiques antisociaux, la centrale a fini par achever le dernier wagon d'une résistance sociale à réinventer.En somme, l'enquête de l'ONS dévoile comment le gouvernement, le syndicat officiel et des patrons véreux se sont ligués contre ceux qui n'ont que leur force de travail à vendre. Les conséquences sont désastreuses non seulement pour le monde du travail, mais pour tout le pays, car cette situation génère le dépérissement de la société, favorise l'exclusion et, au final, contribue dangereusement à une dislocation sociale.




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