Algérie

Les femmes rêvent des gradins



Ville du sud-est algérien, fondée il y a plus de 2500 ans, et qui a connu le passage et les influences de plusieurs civilisations, Biskra, cosmopolite et accueillante et qui a été un lieu de repos et de ressourcement pour les visiteurs et touristes du monde entier dans un passé récent, s'est transformée en géhenne pour la gent féminine, selon les témoignages de plusieurs femmes interrogées çà et là.C'est qu'elles sont souvent prises à partie, aussi bien dans les espaces privées que sur les lieux publics, par des énergumènes en mal de sensations, ayant vite oublié que celle-ci est une mère, une s?ur, une épouse, une collègue de travail, une amie, voire un soutien indéfectible pour la plupart des hommes. «Il y a des lieux où je n'oserai jamais mettre les pieds, tels que les cafés, le marché central et ses alentours et le stade d'El Alia, bien que je sois une fervente supportrice de l'USB, vibrant à chacune de ses victoires et pleurant de ses déboires et déconvenues», confie une jeune fille de 25 ans.
Vrai. A Biskra, comme par une entente collective et traditionnelle, les femmes font leurs emplettes dans tous les marchés de la ville sans anicroches et les quartiers marchands de Z'Gag Ben Ramdhane et d'El Boukhari leur sont réservés, mais très rares sont celles qui s'aventurent au marché central, ou iraient s'attabler à la terrasse d'un café. Pour sûr, le lieu où il est impensable de voir une femme dans les tribunes en simple spectatrice est évidemment le stade de l'OPOW d'El Alia quand y joue l'USB.
A travers les réseaux sociaux, les supportrices de l'équipe fanion de Biskra ne manquent pas d'exprimer leur passion et ferveur pour le football. «Malheureusement, on ne peut pas aller au stade pour voir un simple match, car on risque de pâtir de la mentalité rétrograde et de la violence des garçons et des hommes entassés dans les gradins», déplore une jeune fille.
Il est de notoriété publique que les stades de football algériens se transforment en chaudrons où, sous l'effet d'une hystérie collective incontrôlable, les supporters extériorisent leur acédie, leurs ferveur et haine de l'autre et des politiciens en proférant des insanités, des slogans à caractère homophobe et phallique et en entonnant des chansonnettes touchant à la dignité de la mère, à la virilité des arbitres et des autorités locales et à celle des joueurs des équipes adverses.
Biskra ne fait pas exception à la règle. «Une fois, j'ai commis la grosse bêtise d'aller au stade avec mon fils et j'ai regretté, cela du fait de l'ambiance empreinte d'agressivité des supporters chauffés à blanc et n'ayant dans la bouche que des noms d'oiseaux infamants et autres grossièretés. J'ai quitté les lieux au bout de 5 minutes.
Je ne voudrais pas que mes filles et ma femme soient soumises à de tels dépassements et agressions verbales», tempère un universitaire. «Nous serions taxées de dévergondées, voire de péripatéticiennes ou de suppôts du diable si jamais on allait au stade, lequel nous est interdit jusqu'à preuve du contraire. Je suis sûre qu'une femme osant aller voir un match de football sera dépecée, insultée et agressée, alors vaut mieux s'abstenir en attendant des jours meilleurs», explique une professeure d'EPS dans un lycée de Biskra.
«Certes, le football est essentiellement un sport masculin, mais il rassemble des spectateurs et des admirateurs des deux sexes à travers le monde entier. Les Algériens semblent encore réfractaires à autoriser les femmes à fréquenter les stades de football.
L'exemple que leur montrent les gradins des stades européens remplis de supporters et de supportrices venus en famille suivre les joutes footballistiques n'écornent pas leurs convictions. Nous sommes encore loin du compte. La preuve est qu'il faille séparer les supporters entre eux et des joueurs avec des grillages métalliques, déployer des forces sécuritaires proportionnelles au danger et interdire aux femmes de s'y rendre pour ne pas envenimer les choses et y ajouter des prétextes de crispations et de frictions», conclut une psychothérapeute de la Reine des Ziban.


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