« Coup de froid» entre Bruxelles et Rabat. «Bras de fer»… Ce sont les
expressions qui reviennent le plus, après la décision du parlement européen de
bloquer l'accord de pêche qui liait les Européens aux Marocains. L'accord en
question permettait à 125 bateaux de pêche européens de se livrer à leurs
activités, au large des côtes marocaines mais également au large du Sahara
Occidental.
Les députés européens ont ainsi
répondu positivement aux demandes de nombreuses ONG qui estimaient inacceptables
que l'Europe paye des indemnités pour des activités qui se déroulent, en
partie, au large du Sahara Occidental. Les eurodéputés ont estimé que l'accord
en question ne prenait pas clairement en compte des intérêts de la population
sahraouie. Ils ont souligné que l'une des conditions essentielles de l'accord,
signé en 2006, à savoir l'existence d'un «bénéfice certain» pour le peuple
sahraoui, n'a pas été respecté. Le Maroc a réagi rapidement en demandant aux
bateaux de pêche opérant dans le cadre de l'accord de quitter les «eaux
nationales». Mesure appliquée immédiatement par l'Union européenne. Les bateaux
de pêche européens, pour l'essentiel espagnols (110 sur 119 licences de pêche
accordées), ont fait demi-tour. L'Espagne qui profite le plus de l'accord de
pêche a demandé que ses pêcheurs soient indemnisés rapidement et qu'un nouvel
accord soit trouvé au niveau européen. La France, qui soutient totalement le Maroc sur la
question du Sahara Occidental a regretté «vivement» cette opposition du parlement
européen. L'accord en question «s'inscrit dans le cadre de la relation
privilégiée que l'UE entretient avec le Maroc» et «constitue le cadre de
partenariat, le plus important, conclu par les 27 avec un pays tiers, en
matière de pêche», a indiqué le porte-parole du ministère français des Affaires
étrangères, Bernard Valero.
Bruxelles versait une contrepartie annuelle de 36,1 millions d'euros au
Maroc. Un audit de la
Commission européenne a souligné que l'accord n'était pas
intéressant économiquement, le chiffre d'affaires généré par la pêche dans les
eaux marocaines est inférieur aux 36 millions d'euros versés au Maroc.
UN ENJEU ECONOMIQUE MODESTE, UN EFFET POLITIQUE CERTAIN
En tout état de cause, l'enjeu économique de l'accord est des plus
modestes. Les réactions provoquées par la décision des eurodéputés montrent que
c'est sa portée politique qui embarrasse Paris, Rabat et accessoirement Madrid.
La remise en cause de l'accord, en partie pour des raisons liées au statut du
Sahara Occidental, est un revers diplomatique pour le Maroc. Ce qui explique la
«rigueur» de la réaction de Rabat qui ne s'est pas contenté de demander aux
bateaux européens de quitter les eaux territoriales du Maroc. Le gouvernement
marocain évoque, en effet, un «développement regrettable, aux conséquences
sérieuses sur l'avenir de la coopération entre le Maroc et l'UE, en matière de
pêche». Le communiqué des Affaires étrangères marocaines évoque même une
éventuelle «réévaluation globale de son partenariat avec l'UE», au moment où «des
négociations sont en cours avec l'UE, dans le cadre de perspectives
mutuellement prometteuses sur d'autres volets de coopération». Rabat fait
apparemment allusion au feu vert donné, mercredi à Genève, par les ministres
européens du Commerce, à la
Commission européenne en vue d'entamer des négociations
commerciales avec le Maroc, la
Jordanie, la
Tunisie et l'Egypte. Ces négociations visent à aboutir à des
accords de libre-échange «profonds et complets» en matière d'échanges de biens
et services avec ces pays. Ce discours «ferme» du Maroc paraît purement
médiatique. L'économie marocaine est très fortement dépendante de l'Europe.
Rabat devra se faire une raison. Ou compter sur Paris
pour essayer d'effacer le fait qu'en refusant la prorogation de l'accord, les
eurodéputés rappellent que le Sahara Occidental n'est pas marocain et qu'il y a
des «intérêts» du peuple sahraoui à prendre en compte.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 17/12/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Salem Ferdi
Source : www.lequotidien-oran.com