Algérie

Les étudiants ont réussi hier leur 14e "mardi"



Les universitaires ont, une nouvelle fois, fait preuve de beaucoup de sang-froid et d'ingéniosité pour réussir leur pari de marcher massivement au centre de la capitale, et ce, malgré la présence en force des éléments anti-émeutes.Pour ce 14e acte de mobilisation dans la capitale contre le système politique en place, les étudiants ont rivalisé, hier, d'astuces et d'ingéniosité pour contourner tous les "barrages" des forces antiémeutes fermant tous les accès menant au nouveau haut lieu emblématique de la contestation, la place des Martyrs. Ce nouveau lieu de ralliement des manifestants vient ainsi remplacer celui de la Grande-Poste après sa fermeture, sous prétexte de "fissures constatées sous l'escalier" du bâtiment en question. Outre des barrières métalliques érigées tout le long des escaliers de l'édifice emblématique, des fourgons de police sont immobilisés autour du monument, bloquant ainsi le passage aux piétons et aux automobilistes allant vers la rue Larbi-Ben M'hidi et/ou vers l'avenue Mustapha-Ben Boulaïd. Affluant des différents campus universitaires d'Alger, et même de Blida et de Boumerdès, les jeunes universitaires ont, une nouvelle fois, fait preuve de beaucoup de sang-froid et d'ingéniosité pour réussir leur pari de marcher massivement au centre de la capitale, et ce, malgré l'impressionnant dispositif sécuritaire déployé en ce 14e mardi. "Du jamais vu dans les rues d'Alger depuis les années 1990", témoignera un sexagénaire. Les jeunes universitaires ont scandé haut et fort les slogans du hirak populaire : "Libérez l'Algérie !", "Dawla madania machi askaria" (Etat civil, pas militaire), ou encore "Qoulou lesserrakine maranache habssine" (Dites aux pilleurs qu'on continuera à marcher). De gros engins, des chasse-neige, de gros camions à eau et autres fourgons de CRS étaient visibles depuis l'ex-siège de la Bibliothèque nationale au Télémly, jusqu'au Tunnel des facultés, en passant par l'avenue Docteur-Saâdane.
Les escaliers menant à l'esplanade du Palais du gouvernement ont été fermés par un cordon de policiers et de fourgons bleus. Même les ruelles attenantes à la Fac centrale, soit Ghara-Djebilet, Ferhat-Tayeb et la rue du 19-Mai-1986, étaient également bouclées. Un état de siège qui ne dit pas son nom, pour paraphraser un étudiant en biologie à l'université Saâd-Dahleb de Blida. Tout Alger-Centre est quadrillé. En fait, tous les accès qui mènent à la place des Martyrs ont été bouclés. L'avenue Asselah-Hocine ou le boulevard Zighoud-Youcef et les ruelles adjacentes étaient annexés et placés sous l'autorité des brigades antiémeutes mobilisées ce jour pour repousser même violemment les étudiants qui oseraient franchir les digues policières élevées contre eux. En fait, les premiers cortèges des contestataires se sont mis en branle depuis la Fac centrale, en direction de la place des Martyrs. Les étudiants entament leur 14e mardi du hirak, avec la ferme détermination de déloger les locataires du système politique, en scandant "Gaïd Salah dégage", "Makache intikhabet ya el îssabat" (pas d'élections avec la mafia), ou encore "Ya hna ou ya ntouma, el houkouma dégage !" (ou c'est vous qui partez ou c'est nous, gouvernement dégage !). Des grandes banderoles reprenant des extraits de la déclaration historique du chahid Larbi Ben M'hidi ou des citations interpellant Gaïd Salah et el-îssaba de partir ont été brandies par les jeunes protestataires résolus à "déloger les pillards du pays". "Nous sommes aujourd'hui à la croisée du hirak, les étudiants ne sont pas du tout prêts à lâcher du lest. Ces nouveaux tenants du pouvoir doivent comprendre qu'ils finiront par partir, parce que nous continuerons à protester dans la rue", soutiendra Mehdi, un étudiant en biologie. Cependant, les manifestants parviennent à contourner "l'état de siège" du jour, en empruntant la descente du boulevard Khemisti avant de bifurquer à gauche pour prendre par le pont Tafourah en direction de la Pêcherie.
Ils saluent tout de même les policiers immobilisés à l'entrée des avenues Asselah-Hocine et Zighoud-Youcef. Surprises par cette irruption inattendue, des brigades antiémeutes courent dans tous les sens pour rattraper les étudiants et les empêcher de rejoindre la place des Martyrs. Après avoir parcouru la rue d'Angkor qui longe le front de mer, les contestataires se heurtent alors à un nouveau cordon sécuritaire non loin de la Pêcherie. Ils criaient "Silmiya,
silmiya !" ou "Chaâb chorta, khawa khawa !". Mais rien à faire, les forces de police bloquaient la route et se sont montrées prêtes à rééditer les scènes désolantes qui ont émaillé le 13e mardi à hauteur de la salle Ibn-Khaldoun où des étudiants ont été matraqués et d'autres bousculés et arrosés de gaz lacrymogènes.
Après plus d'une heure de vaines négociations, le étudiants remontent tout le long de la rue d'Angkor vers le jardin Khemisti, pour battre de nouveau le pavé jusqu'à la Fac centrale. Près de quatre heures de manifestation, les étudiants commencent à se disperser en scandant "Hé, viva l'Algérie, yetnahaw gaâ !", tout en se donnant rendez-vous pour le 15e mardi.
Hanafi H.


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