Les enjeux géostratégiques du Maghreb, pont entre l'Europe, les Etats-Unis d'Amérique et l'Afrique

Je tiens au préalable à remercier vivement Emile H. Malet, délégué général du Forum mondial du développement durable, l'amiral Jean Dufourcq, rédacteur en chef de la revue Défense nationale française, de cette invitation à laquelle j'ai été très sensible sur un sujet combien important qui engage l'avenir des deux rives de la Méditerranée.Aussi, le compromis des années 2012/2020 tant de la zone nord que sud du Maghreb doit donc concilier l'impératif de productivité et la cohérence sociale, les principes d'une société ouverte et le devoir de solidarité. Il faut éviter toute ambiguïté. L'égalité n'est pas l'égalité du modèle passé mais recouvre la nécessité d'une transformation de l'Etat providence par la mutation des services collectifs par la formulation d'un nouveau contrat social. C'est dans ce cadre que le nouveau rôle tant des institutions supranationales, de l'Etat régulateur stratégique et comme un chef d'orchestre, non pas de propriétaire gestionnaire , au sein d'espaces larges et relativement homogènes, comme facteur d'adaptation à la mondialisation, pour un développement durable est dou- ble : à la fois favoriser l'efficacité économique pour une croissance durable reposant sur l'entreprise et son fondement le savoir, et garantir le principe d'équité en préservant notre environnement au profit des générations futures. Ces défis concernent évidemment l'ensemble des pays du Maghreb qui connaît des mutations dans tous les domaines mais accompagnées d'une croissance faible, d'une répartition inégalitaire du revenu national qui a des incidences sur le chômage et la pauvreté, pouvant remettre en cause la cohésion du tissu social. La situation géopolitique actuelle impose d'analyser les grandes questions stratégiques donc du devenir de l'Afrique du Nord au sein duquel s'insère le Maghreb, surtout après les événements du monde arabe, notamment en Tunisie, Libye, Egypte, sans oublier les tensions au niveau du Sahel, au Moyen- Orient, notamment la situation en Palestine, en Syrie et en Iran. En termes géostatégiques, nous ne devons pas oublier le Maghreb dont les tensions l'influencent, expliquant que l'intégration maghrébine est pour les USA et l'Europe une donnée fondamentale stratégique, poussant les dirigeants du Maghreb à s'entendre. Dans ce cadre, il n'y a pas de divergences stratégiques mais, pour paraphraser les militaires, il existe des divergences tactiques de court terme, avec la mondialisation la stratégie de réseaux des transnationales ayant une tendance à uniformiser les actions des politiques socioéconomiques des Etats. II- Quelle est la situation des économies maghrébines ' Peut-on imaginer un seul instant si la richesse virtuelle - les réserves de change de l'Algérie estimées à 190 milliards de dollars fin 2011, y compris les réserves d'or, et les réserves de change de la Libye estimées à 170 milliards de dollars avant la chute du régime Kadhafi, soit au total 360 milliards de dollars, plus de 80% de ces montants étant déposés à l'étranger, étaient transformées en richesses réelles au Maghreb ' Or, le Maghreb a un poids économique insignifiant au sein du commerce mondial, et même les échanges intramaghrébins sont dérisoires - moins de 2% de leurs échanges globaux. Or l'Europe du Sud (Italie, France, Grèce, Espagne) totalise environ 170 millions d'habitants. L'Algérie, le Maroc et la Tunisie totaliseront 80 millions d'habitants, soit un total de 240 millions d'âmes. Si l'on inclut les riverains méditerranéens dont la Syrie, le Liban, Israël, l'Egypte, Malte, la Turquie, l'Albanie, la Libye et l'ex- Yougoslavie, dont la stabilité conditionne le développement de l'ensemble des Balkans, nous aurons une population en 2011 qui dépasse les 500 millions. Cette région est frappée actuellement par une récession économique avec un écart croissant entre les pays de l'UMA 380 milliards de dollars de PIB en 2010, selon le FMI, et l'Europe -2,23% du PIB européen (la Grèce, malgré la crise qui la secoue, a un PIB de 305 milliards de dollars pour moins de 12 millions d'habitants). Cette récession s'explique par différents facteurs dont le manque d'homogénéisation économique pour des raisons essentiellement politiques, qui fait fuir les capitaux vers d'autres cieux plus propices à un moment où la concentration des échanges est dans le Nord, avec une nette percée en direction des pays émergents. Les entreprises publiques sont fortement dominantes au Maghreb, imbriquées dans le système administratif lieu de relation de clientèles avec des intensités différentes selon le modèle de développement choisi étant plus importantes en Algérie et en Libye. Leur gestion est défectueuse, croulant sous le poids des dettes, et sont à l'origine de l'essentiel du déficit budgétaire et du niveau élevé de la dette publique. (Suivra)