Algérie

Les émeutes du logement illustrent aussi l'impasse du modèle de financement



Batna, Alger, Oran, Annaba ... Les émeutes du «logement social» de ces dernières semaines ne traduisent pas seulement des «dysfonctionnements» de l'administration locale. Elles illustrent plus fondamentalement l'impasse que constitue le modèle de financement du logement mis en Å“uvre dans notre pays. Le logement en Algérie c'est encore 280 milliards de dinars de ressources fournies chaque année par le Trésor public contre à peine 50 milliards de dinars de crédits bancaires.

Le montant des transferts alloués au secteur de l'habitat par la loi de finances 2011 renseigne sur l'ampleur du financement public du logement des Algériens. Les programmes de réalisation de logements sociaux locatifs entièrement financés par les ressources du Trésor public et qui portent, bon an mal an sur 50 à 60.000 unités, sont dotés de plus de 100 milliards de dinars. Le logement public aidé en milieu rural et urbain recevra pour sa part, un peu plus 180 milliards de dinars. En comparaison, la dotation au titre de la bonification des crédits immobiliers qui ne dépasse pas 1 milliard de dinars est très modeste, confirme la part relativement marginale du crédit hypothécaire.

Une diversification contrariée

Les premiers efforts de diversification d'un modèle de financement du logement dominé initialement, hors auto-construction, par le seul logement social et la contribution exclusive du Trésor public remontent aux années 90. Cela s'est fait avec l'introduction de la formule des «logements sociaux participatifs» et la libéralisation de la promotion immobilière privée. Ces nouvelles formules d'accès au logement étaient censées recourir au crédit hypothécaire que l'ensemble des banques publiques et privées ont été invitées à dynamiser en lieu et place de l'ancien monopole de le CNEP. Associé à l'attribution d'une aide frontale gérée par la Caisse nationale du logement (CNL) , bras financier de l'Etat dans le secteur de l'habitat, le nouveau dispositif a tardé à produire les effets attendus. La revalorisation progressive du montant de l'aide de l'Etat -portée en 2010 à 700 000 dinars - a été à l'origine d'un recours limité au crédit bancaire en particulier en milieu rural. Un responsable du crédit de la BADR souligne le rôle joué dans ce domaine par «la faiblesse des coûts des terrains et la simplicité des constructions qui sont souvent d'ailleurs des aménagements ou des extensions apportées à une construction déjà existante, tout autant que la réticence traditionnelle des populations rurales à recourir à l'endettement» pour des programmes de construction ruraux qui ont représenté 40% du million de logements livrés entre 2005 et 2009. Le souci de «fixer les populations rurales» est en outre à l'origine d'une augmentation sensible de la part des logements ruraux aidés qui doit passer à près de 60% (700 000 logements) dans le 1,2 million programmés pour le prochain quinquennat, la clientèle potentielle du crédit immobilier se trouve réduite d'autant.

Entre 6 et 7% du portefeuille des banques

C'est donc essentiellement en milieu urbain et dans le cadre des programmes d'auto-construction, de logements promotionnels aidés par l'Etat ou de promotion immobilière privée que se situent les gisements de clientèle des banques commerciales. Le délégué général de l'ABEF, Abderrahmane Benkhalfa a indiqué récemment que les crédits immobiliers en «croissance rapide» représentent actuellement «entre 6 et 7% du portefeuille des banques». En 2010 le montant des crédits immobiliers accordés par le secteur bancaire se situe entre 45 et 50 milliards de dinars. La Cnep reste en tête avec plus de 17 000 dossiers traités l'année dernière et 24 milliards de dinars de crédits (55% de part de marché). La seule vraie concurrence de la CNEP est venue de la BDL qui a fait de ce créneau l'un des moteurs de sa croissance. Ses crédits ont été de près de 15 milliards de dinars en 2009 et en 2010. Les autres banques commerciales publiques et privées ont manifesté, jusqu'à une période récente, plus de réticences vis-à-vis d'un produit dont le développement reste, selon un banquier privé, contrarié principalement par «l'insuffisance de l'offre de biens ainsi qu'une spéculation importante qui fait que le prix des biens disponibles dépasse souvent de beaucoup la capacité d'endettement des clients des banques». Pressées par l'Etat actionnaire de développer le crédit immobilier, toutes les banques publiques ont néanmoins défini au cours des derniers mois des programmes ambitieux dans ce domaine à l'image par exemple de la BEA qui se fixe un objectif global de 26 milliards de dinars de crédits accordés entre 2010 et 2012

Démarrage tardif pour les crédits bonifiés

Pour stimuler le développement du crédit immobilier, la LFC 2009 a créé un dispositif de bonification des taux d'intérêt extrêmement avantageux pour les emprunteurs. Ce dispositif dont est exclue la seule auto-construction se traduit dans la plupart des cas par un taux d'intérêt effectif qui ne dépasse pas 1%. Après avoir connu quelques retards, la mise en place de ces mesures est effective dans la plupart des banques publiques depuis le début de l'été 2010.Les banques privées ont été un peu plus longues à l'adopter .L'insistance du régulateur a conduit la plupart d'entre elles à proposer ce produit à partir du mois d'octobre dernier. Les premiers bilans disponibles traduisent un certain engouement.

Au cours du 1er trimestre 2011, le montant des crédits accordés par la CNEP a quasiment doublé et dépasse 8,6 milliards de dinars dont près de la moitié sont des crédits bonifiés. Les banques privées sont nettement en retrait. Société Générale Algérie annonce 500 crédits immobiliers accordés depuis le lancement de ce produit.




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