Algérie

Les dures conditions de vie des immigrés algériens durant la guerre d'Algérie (M. Horvo)



Les dures conditions de vie des immigrés algériens durant la guerre d'Algérie (M. Horvo)
La militante anticolonialiste et humaniste Monique Hervo est longuement revenue mardi soir, lors d'une rencontre-débat organisée à Paris, sur les dures conditions de vie des travailleurs immigrés algériens en France, parqués dans le bidonville dit "La Folie", rue de la Garenne à Nanterre (Hauts-de-Seine) durant la guerre d'Algérie.
La rencontre, animée par les historiennes Naïma Yahi et Peggy Derder, a permis à l'auteur du livre témoignage "Nanterre en guerre d'Algérie chronique du bidonville 1959-1962" de décrire l'hostilité et la banalité du mal qui ont profondément rongé la vie en France de milliers d'Algériens, contraints à l'exil par le système colonial.
Ils avaient fui leur pays colonisé exposé à une misère économique et sociale pour atterrir dans une situation où ils souffraient de tous les maux attachés à l'univers concentrationnaire du bidonville où il s'entassaient dans la promiscuité la plus totale.
Monique Hervo a ainsi expliqué que la plupart d'entre-deux, venus au départ en célibataire, n'avaient pas pour objectif de se fixer en France mais de permettre à leur famille, au pays, de survivre avec ce qu'ils envoyaient de leur paie, en préparant leur retour.
La recrudescence des actions répressives et meurtrières durant la guerre d'Algérie, ont toutefois changé la donne, a-t-elle dit, et des centaines de milliers de familles ont été contraintes de quitter les zones dites "interdites" où les villages étaient désertés, brûlés et où l'économie rurale a été détruite.
Elle a souligné que l'émigration de ces familles pour rejoindre le chef de famille a été un moyen pour échapper aux ratissages et aux "camps de regroupement" où elles vivaient dans un dénuement total.
"Et comme rien n'a été prévu en France pour les loger, eux qui pourtant ont été acceptés pour venir en métropole contribuer à l'effort de reconstruction d'un pays dévasté par la deuxième guerre mondiale, les travailleurs immigrés ont construit eux-mêmes leur toit de fortune, sur des terrains inoccupés, des zones de non-droit absolu. Ce fut le point de départ du bidonville ", a-t-elle dit.
Monique Hervo révèle alors que c'est en 1959, lors des moments les plus durs de la guerre d'Algérie" qu'elle entend parler pour la première fois du bidonville "La Folie" de Nanterre. C'était dans le cadre du Service civil international (SCI), une association humanitaire qu'elle avait rejoint en 1956.
Aider les habitants du bidonville à améliorer leurs constructions précaires
"J'ai décidé de m'y rendre avec des collègues du SCI pour me rendre compte par moi-même des conditions de vies très dures des habitants et décidé d'y rester et y mettre en place une coopérative de matériaux et d'outillage pour aider les habitants de ce bidonville à améliorer leurs constructions précaires", s'est-elle souvenue.
Les habitants du bidonville lui avait confié alors que les promesses de les reloger depuis des années n'ont jamais été tenue et qu'ils voulaient avoir du travail chez eux en Algérie, et pas en France.
"Ces gens là ont forcé mon admiration par leur courage", a-t-elle dit, ajoutant qu'avec son équipe, elle avait aidé à construire ou améliorer les baraques, et fournit une assistance scolaire et administrative, aux habitants du bidonville "La Folie " où elle logeait avec se collègues du SCI, sur instruction de la Fédération de France du Front de libération nationale (FLN) pour aider aux éventuelles évacuations du bidonville, en cas d'urgence.
Elle a affirmé qu'avant la répression sanglante de la manifestation pacifique du 17 octobre 1961, sur ordre du préfet de police Maurice Papon, et depuis des mois, "on avait toutes les nuits, des descentes de police, de harkis, de gendarmes. Et toutes les nuits, ils arrêtaient des habitants du bidonville, tabassaient d'autres, tailladaient des matelas pour chercher de supposées armes, allaient jusqu'à déshabiller entièrement des bébés".
"Le bidonville était en permanence encerclé et les fusées éclairantes tirées nous donnaient l'impression d'être en plein jour. C'était des nuits de terreur absolue" s'est-elle rappelée.
"Après le 17 octobre 1961, le bidonville n'était qu'un hôpital de campagne. Dans toutes les baraques, gisaient des blessés graves qui ne voulaient pas se rendre à l'hôpital de crainte d'être de nouveau arrêtes" s'est souvenue Monique Hervo, témoin exceptionnel de cette époque.
Monique Hervo a été honorée en novembre dernier par l'Algérie dont elle a défendu courageusement la cause. Une attestation de reconnaissance de sa noble action et une médaille honorifiques lui ont été remises au nom du président de la République M. Abdelaziz Bouteflika lors d'une cérémonie organisée dans la vielle de Nanterre, à la faveur de la double commémoration du 1er Novembre 1954 et du cinquantenaire de l'Indépendance nationale.
"Nanterre en guerre d'Algérie-chronique du bidonville 1959-1962" a été publié en 2001 aux éditions du Seuil sous le titre "Chronique du bidonville". Il a été réédité en 2012 aux éditions Actes Sud. Il a reçu le Prix de l'Ethique en 2002.
La rencontre ûdébat avec Monique Hervo a été organisée à la faveur de la commémoration de la Journée nationale du souvenir instituée depuis novembre 2012 en France par le gouvernement socialiste. Elle coïncide avec le 19 mars 1962, date du cessez-le-feu et de la signature des accords d'Evian qui consacrent l'indépendance de l'Algérie.


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