Algérie

Les dossiers prioritaires



Pour Alger, l'élection de Nicolas Sarkozy constitue une situation inédite: c'est la première fois depuis l'indépendance que le nouveau présidentfrançais n'est ni gaulliste ni socialiste. Libéral et pro-américain, obsédé parla rupture avec l'ère de Jacques Chirac, M. Sarkozy ne semble pas posséder unevraie vision du rôle de la France dans le monde. Moins diplomate que JacquesChirac, il possède néanmoins deux qualités qui pourrait s'avérer décisive pourl'avenir des relations franco-algériennes : la franchise et le pragmatisme.Mais, au regard de la complexité des dossiers en suspens entre Alger et Paris,sa mission ne sera pas de tout repos. Les relations bilatérales, déjà malmenéesdu temps de Jacques Chirac, devraient connaître des moments difficiles : Repentance et mémoire. « Je veux remettre à l'honneur la nation etl'identité nationale. Je veux rendre aux Français la fierté d'être Français. Jeveux en finir avec la repentance qui est une forme de haine de soi, et laconcurrence des mémoires qui nourrit la haine des autres » . Dans son premier discours prononcé dimanche soir, quelques minutes aprèsl'annonce des résultats qui le donnaient vainqueur, Nicolas Sarkozy n'a laisséaucune place au doute sur la question de la mémoire. En excluant toute repentance sur les crimes passés de la France, lenouveau président français vient d'envoyer un message sans ambiguïté à Alger.Il confirme ainsi ses engagements de la campagne électorale qui lui avaientdéjà valu de violentes critiques du Premier ministre algérien AbdelazizBelkhadem. Ce dernier, dans un entretien au quotidien « Le Monde » avait eneffet accusé Nicolas Sarkozy de vouloir réhabiliter l'Organisation de l'arméesecrète (OAS). Le nouveau président français n'a toujours pas répondu à cesaccusations. Traité d'amitié. Nicolas Sarkozy ne l'a jamais caché : il est hostile àla signature d'un traité d'amitié avec l'Algérie. Symboliquement, le nouveauprésident français devrait annoncer rapidement l'abandon de ce projet : un telgeste constituerait en effet un message très fort qui va dans le sens de larupture annoncée avec la politique de son prédécesseur Jacques Chirac. Leprésident sortant est en effet à l'origine de cette initiative à laquelle iln'a jamais caché son attachement jusqu'au bout de son mandat, et ce, malgré lesréticences algériennes apparues au lendemain du vote en février 2005 par leParlement français d'une loi sur « les bienfaits » de la colonisation. En échange de cet abandon, Nicolas Sarkozy devrait proposer aux Algériensde faire partie du grand projet de partenariat qu'il compte bâtir avec les paysde la Méditerranée et dont les premiers contours ont été esquissés dans sondiscours de dimanche soir : « Je veux lancer un appel à tous les peuples de laMéditerranée pour leur dire que c'est en Méditerranée que tout se joue, et quenous devons surmonter toutes les haines pour laisser la place à un grand rêvede paix et de civilisation. Je veux leur dire que le temps est venu de bâtirensemble une Union Méditerranéenne qui sera un trait d'union entre l'Europe etl'Afrique ». Mais une telle proposition semble avoir peu de chance de plaireaux Algériens. L'échec du processus de Barcelone montre en effet que la mise enplace d'un ensemble méditerranéen a peu de chance d'aboutir.Immigration et visas. La question de l'immigration devrait constituerl'un des points de désaccords profonds entre l'Algérie et la France dans les prochainsmois. Lors de son passage au ministère de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy avaitdéjà tenté de convaincre Alger de participer activement à la lutte contrel'immigration clandestine. En échange, il avait promis des souplesses enmatière d'accueil des Algériens en France. En vain : l'Algérie ne veut pas queses forces de l'ordre soient mise au service d'une politique européenne, jugéehystérique, de lutte contre les clandestins africains qui fuient la misère etles violences dans leurs pays.L'Algérie estime notamment que ses forces de sécurité ont déjà beaucoup àfaire avec la lutte contre le terrorisme, le grand banditisme et la protectionde ses frontières. Par ailleurs, Alger estime que les efforts de Paris pour améliorer lasituation des Algériens demandeurs de visas pour la France ne sont passuffisants. Certes, fin 2006, à l'initiative de Nicolas Sarkozy, la Franceavait mis fin à la procédure de consultation qui rallongeait inutilement lesdélais de réponse. Mais pour les Algériens, cette mesure n'est pas suffisantesi elle ne s'accompagne pas d'une hausse significative du nombre de visasdélivrés à ses ressortissants. Une demande à laquelle Nicolas Sarkozy pourrait difficilement répondrefavorablement sans mécontenter une grande partie de son électorat, hostile àl'accueil de nouveaux immigrés en France. Economie et investissements. Depuis quelques années, les relationséconomiques entre la France et l'Algérie se portent bien. Les investissementsfrançais sont en constante progression, les groupes hexagonaux souhaitantprofiter pleinement du dynamisme exceptionnel de l'économie algérienne.L'accession de Nicolas Sarkozy au pouvoir devrait contribuer à une accélérationde cette coopération. Dans ce contexte, l'alliance Sonatrach-Gaz de France (GDF)devrait figurer au cÅ“ur des relations franco-algériennes dans les prochainsmois. Candidat, Nicolas Sarkozy avait proposé d'adosser le groupe publicfrançais à Sonatrach : en échange du gaz algérien, la France fournirait à l'Algérieune coopération dans le nucléaire civile. Lors de cette annonce, Alger avaitpréféré ne pas répondre, sans doute pour ne pas perturber le déroulement de lacampagne des présidentielles françaises mais aussi pour prendre le temps demieux étudier une proposition complexe. L'Algérie possède en effet déjà desaccords dans le nucléaire civil avec la Russie, la Chine et l'Argentine. Un nouveau partenariat dans ce domaine avec la France ne semble pasnécessaire. Alger sait également que Sonatrach peut profiter pleinement de laméfiance des Européens du russe Gazprom, en augmentant sensiblement ses partsde marché dans la distribution du gaz en Europe. Or, un accord avec GDF risque de réduire considérablement ses marges demanÅ“uvre et de desservir sensiblement ses intérêts.


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