Algérie

Les complaintes sans écho des handicapés de Tizi-Ouzou



Photo : S. Zoheir
De notre correspondant à Tizi-Ouzou
Lakhdar Siad

Plus que les personnes dites valides, les handicapés manquent cruellement de prise en charge sur les plans des moyens matériels spécialisés, des loisirs et de la couverture sociale adéquate. La douleur de cette catégorie fragile de la société est d'autant plus inquiétante qu'elle n'est pas toujours visible dans le champ des préoccupations publiques mises en avant dans les débats et projetions des faiseurs d'opinion. Elle ne l'est qu'à l'occasion des rituels et cérémonies annuels de remise de «cadeaux» instaurée par l'administration locale via les associations des handicapés, elles-mêmes sans pouvoirs et sans moyens nécessaires pour répondre à la demande des adhérents dans les chefs-lieux urbains alors que dans les villages et localités encore plus déshérités de la région de Kabylie, ces malades souffrent presque dans l'anonymat. Dans ces derniers espaces, la plupart des personnes handicapées ne comptent souvent que sur les traditions de solidarité de la composante sociale, l'activisme et l'engagement d'une poignée de militants associatifs, la générosité de quelques donateurs et les aides aléatoires de membres de la famille directe des nécessiteux. Beaucoup parmi ces malades ne sont même pas connus des services concernés. La règle reste la même : plus on est loin des canaux officiels et des directions de wilaya concernées, plus on manque du soutien (qui sont en fait des droits) des ordonnateurs de budgets, de subventions et de dons divers. Dans la wilaya de Tizi-Ouzou, on compte officiellement près de 25 000 handicapés dont plus de 11 000 inadaptés mentaux. Ces chiffres de la Direction de l'action sociale (DAS) sont la seule indication disponible pour mesurer localement l'ampleur de la détresse des handicapés en l'absence de réseaux rodés et introduits pour porter leur voix sur la place publique en vue d'améliorer leur situation ou du moins faire connaître leur cas. Les problèmes récurrents du manque de moyens d'appareillage ne doivent pas occulter d'autres insuffisances encore plus lamentables telles que la dérisoire pension de quelques milliers de dinars et qu'on ne verse pas toujours dans les délais, l'éloignement du médecin de la CNAS dont la griffe est indispensable pour le maintien de la minable pension, le manque et le coût déraisonnés des moyens de transport et l'absence d'insertion sociale dans des postes d'emploi catalogués pour handicapés ainsi que la marginalisation de beaucoup d'enfants handicapés non scolarisés et très mal soignés. Globalement, la situation générale des handicapés est aggravée par le chômage qui les achève à petit feu. «On n'est pas bien, on souffre», vous répondra la quasi-totalité des handicapés de la wilaya de Tizi-Ouzou. Les concernés se souviennent, par exemple, du calvaire des malades mentaux de la région qui étaient en rupture de médicaments pendant des mois à cause d'un problème qui relevait de la coordination des services de la CNAS et des pharmacies agréées par la même caisse. Les parents des ces malades avaient déposé les anciennes cartes de soins et renouvelé les dossiers des malades mentaux, mais l'attente de nouvelles cartes de soins avait trop duré multipliant ainsi l'angoisse des malades et celle de leurs parents déjà fortement éprouvés par le calvaire de leur vie quotidienne.
Il ne suffit donc pas de parler de handicap le 14 mars de chaque année pour signifier qu'on prend bien soin des handicapés.


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