« Les Colporteurs » de bonheur

Elles ne passaient pas inaperçues dans le décor, se promenant dans les travées de l'enceinte de la maison de la culture où était dressée une armature bizarre de ronds de fer et de câbles tendus. Autour de la petite esplanade un public curieux attendait. Même patience aux étages, les coudes sur les balustrades. Et puis voilà que ces deux femmes, l'une jeune et l'autre moins, se mettent dans l'idée de se faire tirer le portrait, assises sur un câble de cette fameuse structure métallique qui trônait au milieu de la place. Un « agent » ne l'entend pas de cette oreille et leur demande de déguerpir. Les deux dames ne se laissent pas faire et « l'énergumène » fait jouer ses biceps. Muettes de colère, elles sont repoussées sans ménagement. La plus jeune y retourne pour récupérer un portable perdu dans la bousculade, elle se prend le pied dans un câble et tombe comme un chiffon, arrachant à l'assistance un « ooooh ! » médusé par cette affligeante scène. Elle essaie de se relever mais elle s'est faite mal au pied, et tente vaille que vaille de se dépêtrer de ce fouillis de fer et de câble, l'air d'être complètement disjonctée devant la difficulté. Triste spectacle ' Non, car c'était du théâtre et les deux dames des artistes dont l'entrée spectaculaire a complètement mystifié le public. Elles font partie de la troupe « Les colporteurs », venus de France pour participer au Festival du théâtre de Bejaïa, dont les spectacles mêlent cirque, théâtre, musique et danse. Les deux dames, qui n'ont pas peur du burlesque, sont des artistes funambules. Elles ont tôt fait de susciter l'admiration d'un public qui a retenu son souffle à chaque exercice, surtout au final, quand, sur le fil tendu, l'une dansait comme une folle heureuse tandis que l'autre jouait sur son violon un air endiablé. Un pur bonheur. Applaudissements nourris plus que mérités. C'est du théâtre cirque. A voir, par les grands et les petits.